Come back sur la « nouvelle fraternité franco-britannique »

Revenons  sur le premier jour de la  visite d’Etat  de trente-six heures en Angleterre du  Président Français pour n’en retenir en dehors des fastes de la réception,  que l’essentiel politique.

 Mercredi 26 Mars,  peu après son arrivée et après un déjeuner "informel", le président français a ouvert la phase  politique de la journée en s'exprimant devant les Chambres des Communes et des Lords réunies dans la Galerie royale du Parlement de Westminster.

Présentant le  système politique anglais comme  "la pierre angulaire de toute démocratie", M. Sarkozy a d'abord adressé le "merci éternel" de la France "pour les sangs anglais, écossais, gallois, irlandais mêlés au sang français dans la boue des tranchées",  ….pour "l'accueil du peuple britannique au général de Gaulle"  …… pour sa "belle jeunesse se sacrifiant sur les plages et les bocages de Normandie".

Puis  le chef de l'Etat s’est plut à comparer  la France et le Royaume-Uni à "deux frères plus forts l'un à côté de l'autre que l'un face à l'autre".

Cette  vision prospective franco-anglaise n’est pas nouvelle  chez M. Sarkozy qui avait tenu meeting  pendant la campagne présidentielle à Londres, ville qu’il  qu'il considère comme "la septième ville française".

Considérant l’Entente cordiale dépassée, Monsieur Sarkozy  déclare que  Paris veut "une entente amicale", voire une "nouvelle fraternité franco-britannique pour le XXIe siècle".

Il est à noter qu’au  titre  de la "fraternité d'armes" entre les deux pays, il a également annoncé qu'il proposerait la semaine prochaine d'accroître la présence militaire française en Afghanistan, sans toutefois chiffrer ces renforts  souhaités par ses partenaires de l'Otan.

En prémices de la future Présidence Européenne de la France, Nicolas Sarkozy soucieux  d’entraîner  la Grande Bretagne dans son sillage  pour le soutenir dans sa vision politique Européenne, l’a invité  à participer pleinement à l'aventure européenne, en plein débat britannique sur la ratification du traité de Lisbonne.

Alors que les Britanniques doivent ratifier par voie parlementaire  le traité de Lisbonne avant le 1er juillet, il a tenté  d’atténuer  les réticences européennes de ses hôtes. "Nos deux pays veulent une Europe qui respecte les identités, qui refuse les tentations bureaucratiques, qui ne cherche pas à imposer les mêmes normes partout", a-t-il plaidé en invitant le Royaume-Uni,  à prendre toute sa place parmi les Vingt-Sept : "Aujourd'hui plus que jamais, l'Europe a besoin du Royaume-Uni" a affirmé M. Sarkozy  qui entend fortifier l'axe Paris-Londres  en expliquant   : "Aujourd'hui, le moteur franco-allemand reste indispensable mais il n'est plus suffisant.

Un coup de griffe au passage donc pour se venger de la résistance d’Angela Merkel qui tout récemment  avait remis au pas Nicolas Sarkozy au sujet de ses projets méditerranéens

Ndlr : Vu du coté anglais,  la question n’est pas de constater que l’Europe a besoin du Royaume Uni, la question est de savoir si il est de l’intérêt  de la  Grande Bretagne  de « prendre toute sa place en Europe » en renonçant progressivement à toutes les dérogations Européennes dont elle bénéficie actuellement sans mettre en péril son équilibre économique et sa croissance.

 Faisant indirectement  l’impasse sur la défaite de L’UMP aux municipales, Le chef de l'Etat a réaffirmé sa volonté de réformer  la France. "La France d'aujourd'hui s'est remise en marche, a-t-il assuré,  ……. Je n'ai pas été élu pour m'incliner devant des fatalités.

Pour ce……" S'il devait prendre un exemple de réforme, il le choisirait au Royaume-Uni. "Vous êtes devenus pour nous un modèle, une référence, et nous devons nous inspirer de ce que vous avez su faire, quelle que soit la couleur politique de vos gouvernements, ces vingt ou ces trente dernières années, dans une référence  commune (sans les nommer)  à la conservatrice Margaret Thatcher et au travailliste Tony Blair, ainsi qu'à son successeur Gordon Brown. Selon son analyse, il estime  que le Royaume-Uni "a montré que dans l'économie globale, il existait une voie pour atteindre une croissance forte, le plein emploi, la solidarité. La France doit apprendre à regarder ce que ses voisins ont fait plus fort et avant elle".

Pour M. Sarkozy,  l'appui de Londres est déterminant pour atteindre ses  buts  au plan international. Citant l’ONU, le FMI, et la Banque Mondiale, dont il avait déjà parlé  dans son discours Américain Monsieur Sarkozy  qui a de la suite dans ses idées  a déclaré : « Nos deux pays ont une place éminente dans les institutions issues de la seconde guerre mondiale,  ….. Ces institutions doivent être réformées pour être plus justes, plus légitimes, plus fortes."

Monsieur Sarkozy avait définit préalablement  ses intentions : "Je suis venu proposer au peuple britannique …….  une nouvelle fraternité franco-britannique" fondée sur une action commune "pour la paix", la stabilité économique et la lutte contre le réchauffement climatique » ………

Ndlr : Thèmes  d’actualité de nos jours

 "Ce que le peuple français et le peuple britannique peuvent accomplir ensemble est beaucoup plus grand que ce qu'ils peuvent réaliser séparément", a souligné M. Sarkozy  tout en proposant  "plus d'entente, plus de coopération" entre les deux pays.

 Il souhaite que les deux pays aillent  plus loin que l'Entente cordiale décidée entre Londres et Paris en 1904. "Honnêtement, depuis le temps qu'on ne se bat plus, on devrait parler de l'Entente amicale!"

"En additionnant nos forces, nous pouvons contribuer à faire émerger une nouvelle mondialisation plus libre, plus équitable, plus responsable et plus juste", a-t-il notamment déclaré, faisant écho aux déclarations du Premier ministre britannique Gordon Brown. Les deux hommes affirment entretenir une excellente relation et partager de nombreuses préoccupations.

 Selon The Associated Press -(26/03/08)-, Nicolas Sarkozy a  proposé que les deux pays se mobilisent contre "la tempête économique qui se lève" et,  pour réformer le capitalisme, " pour que l'entrepreneur prenne le pas sur le spéculateur". Il a particulièrement  insisté sur la lutte contre le réchauffement climatique, persuadé que les deux "amis les plus sincères" de Washington sont capables d'arracher une mobilisation des Etats-Unis sur ce dossier. "Si le Royaume-Uni et la France parlent d'une même voix, qui pourra refuser de nous entendre?", a-t-il interrogé.

"Ce que nous ferons ensemble n'aura son sens que si nous l'accomplissons d'abord au sein de l'Europe", a  insisté le président français, soucieux d'intégrer la Grande-Bretagne, traditionnellement eurosceptique, à la réussite de sa présidence de l'Union européenne. "Le traité de Lisbonne est imparfait mais il met fin pour longtemps à des affrontements du passé", a-t-il mis en avant, rappelant aussi que l'immigration serait en tête de ses priorités.

"Si vous voulez peser sur les affaires de l'Europe, eh bien!, ayez les deux pieds dans l'Europe", avait-il plaidé  dans la matinée, lors d'un entretien à la radio publique.

 "L'Europe a besoin du Royaume-Uni", a insisté Nicolas Sarkozy, sous les applaudissements des législateurs. »

Selon une technique éprouvée qui consiste à servir à un auditoire ce qu’il  apprécie d’entendre le mieux,  le discours du Président de la République émaillé de compliments , a été  tout à  fait  « britannique » à Londres, tout  autant qu’il  fut  « américain » à Washington.

 M. Sarkozy  n’a pas ménagé  son admiration et  a  cédé à la facilités d’une  confidence   affective en  assurant que "la grandeur britannique avait souvent nourri ses rêves de jeunesse"  mais là encore  là encore il faut se souvenir que devant le Congrès Américain il  avait joué la  même  sérénade en consacrant  tout un chapitre « au rêve américain » de sa génération d’après guerre.

Certains médias  à l’eau de rose  voient  dans cette finale « une passion » de Nicolas Sarkozy  pour la Grande Bretagne  et l’interprète comme une déclaration d’amour.

Pour ma part je considère que dans ce premier discours Monsieur Sarkozy en développant ses thèmes politiques favoris très atlantistes a pour objectif de se faire de la Grande Bretagne une alliée pour soutenir sa propre politique Européenne, quand à ses  protestations de fraternité, ses déclarations d’admirations tout à fait courtoises sinon courtisanes, véritables exercices de style,  elles sont là non seulement  pour jouer sur la corde sensible, mais surtout pour  renforcer  son intervention, on imaginerait mal un Président  en visite d’état se mettre à cracher dans la soupe de son hôte

 Comme il se doit en pareilles circonstances, l’ensemble du  Parlement britannique (Chambre des lords et  Communes)  l'ont applaudi debout  une bonne minute au terme de son discours et Madame la speaker de la Chambre des lords a remercié notre Président  d’un  "Thank you for your tremendous « passion »", pour  répondre courtoisement aux accents affectifs de l’orateur.

 "L'Entente cordiale entre dans une nouvelle ère mais cela implique que la Grande-Bretagne soit au centre de l'Europe et non pas isolée", a déclaré en écho le Premier ministre Gordon Brown.   

Ndlr : Monsieur Gordon Brown qui  n’a pas tellement réussi à séduire les sujets de sa Gracieuse Majesté Britannique, espère lui aussi « briller en Europe » pour tenter de se remonter sa « popularité ».

 

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 Noblesse oblige : La soirée Royale à Windsor :

 "J'espère que vous apprécierez l'habit que j'ai fait faire pour la soirée royale", avait déclaré mercredi matin le président français sur les ondes de la BBC.

En fin  de cette première journée, la reine Elizabeth a célébré les bonnes relations entre les deux pays, lors d'un banquet de 146 couverts offert à Windsor.

 La reine Elizabeth II  est habillée d'une robe blanc-gris  et porte un diadème de diamants.

 Mme. Bruni Sarkozy  est  vêtue d'un fourreau bleu marine rehaussé d'une mousseline aérienne et se trouve assise entre le Premier ministre britannique Gordon Brown et le prince Philip, duc d'Edimbourg, voisin de la ministre de la Justice Rachida Dati, en fourreau noir. Le Président de la République Française était placé entre la souveraine, voisine du ministre des Affaires étrangères Bernard Kouchner, et  de Camilla, duchesse de Cornouailles.

 Très attentif, Monsieur Nicolas  Sarkozy, en queue de pie, portée sur un baudrier rouge, et le  cou cerné d’un nœud  papillon  blanc assez agressif qui remonte presque jusqu’au menton,  se trouve assis  à la droite de sa Gracieuse Majesté.

La reine Elizabeth II  souhaite aimablement  "une agréable visite au couple présidentiel  et porte un toast à l’amitié franco-britannique, avant de prononcer son allocution d’un ton neutre.

 "Dans un esprit croissant de compréhension mutuelle à tant de niveaux, nous sommes prêts à affronter les défis à venir, sachant que nous pouvons produire des résultats efficaces et durables lorsque nous travaillons ensemble", a déclaré  la souveraine britannique.

 La reine a  soutenu  ce rapprochement dans son allocution, saluant "l'esprit de compréhension mutuelle" … ‘’ entre les deux pays et entre leurs habitants. "Proches en tant que voisines, plus proches en tant que partenaires et de plus en plus proches en tant qu'amies, nos nations ont beaucoup à célébrer", a-t-elle déclaré.

A son tour  Monsieur Nicolas Sarkozy prend  la parole.

"C'est bien notre compétition fraternelle qui a nourri l'ascension de nos deux peuples, assuré leur rayonnement et façonné le monde",  déclare  Nicolas Sarkozy, qui  de nouveau appelle  à "une nouvelle fraternité franco-britannique".

"Nous n'oublierons pas les innombrables sourires du peuple de Londres, qui nous a accueillis, qui nous a encouragés", a-t-il conclu.

 

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Dès jeudi matin, le président français devait retrouver « son frère »  M. Brown pour aborder les travaux pratiques de la "nouvelle fraternité" lors de leur premier sommet bilatéral depuis leur accession au pouvoir.

A l’ordre du jour de ce rendez-vous organisé dans le stade de l'équipe de football d'Arsenal figurent  l'Otan et l'Afghanistan, la coopération nucléaire, la défense européenne et l'immigration. Le Président Français et le Premier Ministre anglais ont affirmé  leur volonté commune de travailler ensemble à la  réforme des institutions internationales, en plaidant pour  l'ouverture du G8 ou du Conseil de sécurité des Nations unies à de nouveaux membres. Ils se sont  engagés à travailler de concert   à une plus grande transparence et une meilleure stabilité des marchés financiers, en évoquant une réforme du Fonds monétaire international.

Pour le nucléaire, Paris et Londres veulent  coopérer pour mettre en place un "système d'assurances pour le combustible nucléaire pour réduire les risques de prolifération"

En matière de défense, il a été question de la mise en place d'une "capacité de frappe maritime combinée".

 Nicolas Sarkozy n'a pas renouvelé  formellement l'envoi de renforts militaires en Afghanistan.

Ndlr : En effet en raison d’une levée de boucliers en France  de l’opposition et de certains membres  de droite du Parlement Français, Monsieur Sarkozy a proposé de  porter la question de  l’envoi de renforts militaires  en une prochaine séance au Parlement.

 Parallèlement, le groupe EADS a fait savoir qu'il avait signé un accord pour le ravitaillement en vol des avions de l'armée de l'air britannique, pour 27 ans et près de 17 milliards d'euros.

Pour la question de l’immigration que Nicolas Sarkozy a mise en avant en s’efforçant  de convaincre l'opinion britannique de la politique Française en la matière , les deux dirigeants ont simplement convenu de renforcer les contrôles sur les côtes de la Manche.

Enfin, Nicolas Sarkozy et Gordon Brown sont convenus de se  rencontrer  tous les six mois, avec en plus  des consultations intermédiaires  avant les grands rendez-vous internationaux. Monsieur Gordon Brown a annoncé  ce pacte  qui ressemble à celui scellé  entre Paris et Berlin,  sans entrer pour le moment  dans ses détails.

Conclusion : de nombreuses réminiscences du discours américain qui dénotent une fois de plus la politique atlantiste du Chef de l’Etat Français,  et au plan Européen, son désir de recevoir le soutien « fraternel »  de la Grande Bretagne  pour appuyer en Europe ses ambitions politiques à trois mois de la Présidence  de l’Union Européenne par la France.

Le Jeudi 27 mars fera l’objet d’un nouvel article.

 

Une réflexion sur « Come back sur la « nouvelle fraternité franco-britannique » »

  1. Nouvelle du couple franco-allemand
    Greenpeace a dénoncé lundi les manœuvres politiques de la chancelière allemande Angela Merkel et du président français Nicolas Sarkozy, qui menacent selon elle d’aboutir à un affaiblissement des normes européennes pour les émissions de CO2 des voitures.

    L’organisation écologiste estime que M. Sarkozy est en passe d’accepter un assouplissement de propositions européennes en la matière en échange du soutien allemand à son projet d’Union pour la Méditerranée. L’Allemagne, dont les constructeurs produisent beaucoup de grosses cylindrées, s’oppose au projet de la Commission européenne de réglementer plus strictement les émissions de C02 des voitures.

    Jusqu’à présent, la France a défendu la position opposée parce que les nouvelles normes pourraient favoriser sa propre industrie, qui fabrique des voitures plus petites et moins polluantes. Selon Greenpeace, Paris s’apprête à infléchir sa position pour obtenir le soutien de Mme Merkel au projet d’Union méditerranéenne.

    L’organisation a lancé une pétition qui a déjà récolté plus de 15.000 signatures et sera remise au président du Conseil européen dans le courant de la semaine.

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