Les chinois soutiennent bon nombre de gouvernements fâchés avec la liberté d’expression et le droit des peuples, donc indirectement, les représailles perpétrées par ceux-ci sur leur population, tout cela au nom d’une « certaine » conception de la neutralité… Pire, ils ne se privent pas d’accuser d’ingérence les pays occidentaux, accusés de défendre leurs propres intérêts (ce qui est, hélas, vrai). Dans l’espèce d’amnésie sélective qui les caractérise, ils oublient d’évoquer la façon dont ils ont mis le Tibet en coupe réglée et la manière dont il traite leurs minorités. Toujours prompt à faire la morale au monde entier sur la manière, très contestable, c’est vrai, dont ceux-ci mènent leurs propres affaires, ils oublient négligemment d’évoquer leur extrême souplesse en matière de droit du travail, du respect du commerce et du copyright. En gros, c’est « ouvrez vos portes en grand, et nous les entrebâillerons à peine pour vous ». Il faut dire qu’ils bénéficient d’une grande complaisance de la part de L’OMC et des pays clients (instances européennes, par exemple, qui ont tout intérêt à faciliter l’entrée de produits peu chères pour des populations en perte constante de pouvoir d’achat. Corollaire, au passage : effondrement du commerce européen.
Bien évidemment, tout cela n’est que de la « real politic », ce cynisme habillé de beaux principes. C’est-à-dire le double langage. Dans la manière dont elle conduit sa politique extérieur, Il est évident, et la Chine plus que d’autres pays en ce moment du fait de son besoin de croissance intérieure, qu’elle a tout intérêt à ce qu’un certain statu quo perdure là où, justement, elle a pu installer sa sphère d’influence à coup d’argents et d’investissements face à des gouvernements plus que conciliants. Ses besoins énergétiques grandissants, son désir de jouer un rôle de plus en plus important sur la scène internationale, la pousse à s’ouvrir sur le monde. Même au prix d’une diplomatie maladroite et hasardeuse.
Cependant, en ce qui concerne la Lybie, cette démarche risque de lui revenir en pleine figure. En effet, le CNT, gouvernement provisoire et révolutionnaire Lybien n’apprécie pas les promesses de contrat de ventes d’armes passées avec Kadhafi au début du mouvement. En retour, la rébellion triomphante a bien fait sentir au gouvernement chinois qu’il ne serait pas prioritaire dans la distribution des marchés de l’après-Kadhafi.
Il se passe la même chose avec la Syrie, où la Chine, là encore, est d’une prudence de sioux comparée au haussement de ton de la communauté internationale devant le comportement de son dirigeant face à son peuple. En ne misant pas sur la démocratisation des pays mais plutôt sur l’entretien de gouvernement aux attitudes inflexibles, la Chine risque de faire un mauvais calcul sur le long terme qui pourrait bien se solder par un effet boomerang, l’obligeant à corriger l’erreur de trajectoire de sa diplomatie.