Selon Zhara Abid, de Kapitalis, Ezzedine Adellaoui aurait indiqué à la justice tunisienne qu’Ansar Charia aurait donné l’ordre de liquider Chokri Belaïd et Mohamed Brahmi, les deux opposants d’Ennahdah. Voilà qui tombe fort bien pour le parti au pouvoir – ou mal pour la partie de sa direction la plus liée à Ansar Charia – qui multiplie les opérations anti-terroristes dans les montagnes tunisiennes.

Ezzedine Ben Guennaoui Ben Mohamed Adellaoui, ancien policier passé dans la mouvance salafiste radicale, aurait avoué sa participation aux exécutions, en compagnie de Boubaker El-Hakim, de Chokri et de Brahimi. Ses déclarations sont « crédibilisées » par un démenti : non, ce ne serait pas la même arme – contrairement aux déclarations officielles – qui auraient servi pour ces deux exécutions.

On l’aura compris : sans le moindre élément en appui, je tente de soutenir la thèse qu’Ansar Charia a bon dos, et qu’Ennahdha sort de sa poche des aveux opportuns pour se dédouaner de toute responsabilité. Soyons honnêtes : ce n’est qu’une hypothèse.

D’une part je ne crois pas qu’Ennahdah soit monolithique, d’autre part j’estime qu’effectivement, ces confessions tardives viennent à point nommé…

Mais supputer n’est pas établir. Tout, selon les déclarations présumées d’Adellaoui, accable Seifallah Ben Hassine, dit Abou Iyah, le porte-parole d’Ansar Charia. Cela tombe bien.

La presse internationale a préféré mettre en avant Amina Sboui, dite Amina Tyler, la Femen libérée qui pose à présent, fumant une cigarette pour allumer un cocktail molotov. Seins nus, évidemment. Son message est particulièrement stupide : « Nous n’avons pas besoin de votre démocratie ». Même slogan que celui des Frères musulmans égyptiens ou de Tariq Ramadan qui considèrent, à forte juste raison, que la démocratie n’est que l’expression d’un renoncement, d’un « choix » pour le moins pire, adoubé ou toléré par des puissances tant internes qu’extérieures. De fait, tout comme les Égyptiennes et Égyptiens, les Tunisiennes et Tunisiens devraient se remémorer qu’ils ont estimé que les moins pires étaient celles et ceux qu’ils ont élus. Slogan stupide, parfaitement réaliste, cependant. Sauf qu’Amina Tyler a bien besoin, faute d’alternative, de ce simulacre de démocratie.

C’est d’ailleurs aussi pourquoi l’extérieur, résumons : « diverses puissances occidentales », indiquent à Ennahdah qu’elles laissent du temps au temps. Message reçu par tout le monde, le patronat, l’UGTT (la centrale syndicale tunisienne), diverses formations politiques, dont la direction dominante de celle au pouvoir.

La choura d’Ennahdha va accoucher de propositions. Cela fait suite à une rencontre, à Paris, entre Béji Caïed Essebsi (Nidaa Tounès) et Ghannouchi (Ennahdah). Une partie de l’opposition dénoncera sans doute la collusion discrète encouragée par les « diverses puissances occidentales ».

En fait, en cas de faillite économique totale, imminente semble-t-il, il faut bien privilégier les réelles priorités. Quant on n’assure même plus la distribution d’eau à Djerba, destination touristique rapportant des devises, il faut peut-être se reprendre. Quant la grêle dévaste les cultures autour de Sousse et Kairouan, les réalités se rappellent aux esprits. Quant les touristes algériens s’envolent pour la Turquie, boudant la Tunisie, certains milieux d’affaires veulent le retour au calme. Et en attendant la suite, qui mieux qu’Ennahdah pour faire régresser l’emprise des salafistes les plus déterminés ? Ou, en tout cas, la partie de sa direction ayant mieux appréhendé ses propres intérêts financiers…

L’UGTT, par la voix de Sami Tharia, a indiqué que les derniers indicateurs économiques témoignent « de la profondeur de la crise (…) et montrent qu’aucun retard n’est tolérable pour parvenir à un consensus national ». Il finira bien par arriver.