« Si une ville est appelée a un grand avenir sur notre côte roussillonnaise, c’est Banyuls sur Mer…

Sa situation le lui permet, et la fertilité de son territoire ne s’y oppose pas. Ses vins, particulièrement recherchés pour l’exportation, sont les meilleurs du département ; son huile est excellente, son miel est de bonne qualité. Le micocoulier et le châtaignier abondent dans les environs : ce dernier est exploité pour la fabrication des futailles. Mais la principale industrie des banyuléens est la pêche…

Il parait que, depuis la réunion du Roussillon a la France, jusqu’à la Révolution, les habitants de Banyuls furent les plus habiles contrebandiers des Pyrénées…

Tous les ans, a la belle saison, Banyuls est fréquenté par un grand nombre de baigneurs, et il est probable qu’avant peu de temps nous aurons la une des meilleures stations de bains de mer de la cote méditerranéenne… », ainsi parlait Pierre Vidal, en 1899, tout à la veille du XXe siècle, comme en adieu aux temps d’autrefois et en présage à un bel avenir.


L’avenir, – Bannils de Maritimo, Banyuls del Maresme, Banyuls de la Marenda -, Banyuls sur Mer, station balnéaire la plus méridionale de France fréquentée en toutes saisons, le tient toujours à pleines mains et l’embrasse bien serré. L’autrefois, le passé, eh bien disons qu’il était déjà à peu près tel, il y a cinq siècle que le décrit Pierre Vidal à la veille de 1900 ! Oui, groupant autour de sa baie la vieille ville, le port, une plage de galets et de sable et une jetée prenant appui sur l’île Grosse, un îlot rocheux où se trouve le monument aux morts de 1914-1918, œuvre du grand sculpteur Aristide Maillol, la commune était encore en 1900, est et restera, bien que prise par la frénésie du tourisme, telle que jadis au Moyen Age, un village de pêcheurs et de vignerons .


Les vignes s’accrochaient aux pentes des Albères, comme avant-hier, comme hier, comme aujourd’hui, comme demain, bien sûr pour la gloire de Banyuls sur Mer. Les « olivedes », – les oliveraies-, embaumaient en juin, « cara al sol », – face au soleil -, en pleine « solana », – adret -, et les abeilles s’y enfouissaient après avoir câliné les cistes mauves. Si les micocouliers n’avaient pas, comme aujourd’hui, ce volume imposant qui donne à leurs troncs lisses et gris l’allure d’énormes pattes d’éléphant, c’est qu’ils mouraient très jeunes, coupés et refendus pour servir à façonner les fouets des « traginers », – des transporteurs -.


Certes les « Banyuléens » s’appelaient, comme ils s’appellent et s’appelleront toujours les Banyulencs, et la pêche ayant été et étant leur « principale industrie », leur essentielle passion…, Bannils de Maritimo, Banyuls del Maresme, Banyuls de Marenda, fut, est et demeurera ad vitam æternam tournée vers la mer…


Quant à la contrebande…! La contrebande était une spécialité de Banyuls. Ses pêcheurs ont, pendant au moins deux siècles et selon les époques, transporté du sel, du tabac, des piastres, du sucre, du riz, des draps ou des peaux, le tout dans une impunité presque totale. Louis XIV, impuissant face au caractère incontrôlable et insoumis des habitants déclara, même, Banyuls de la Marenda « République contrebandière. » Que diable j’aurais l’occasion, en un autre thème, d’étendre largement son domaine bien avant 1660 et bien au-delà de 1789. Et, par décence, je n’irais pas jusqu’à nos jours.


Ainsi, quittant les jeux de la plage, les touristes auront-ils peu de peine, dans leurs promenades, à retrouver le visage, certes rajeuni, mais encore vivant, de ce qu’était autrefois et demeure et demeurera encore très longtemps cette « vallée de Banyuls » qui comprenait, tout autour du Puig del Mas et de la Rectoria, les Abelles et leur Château, la Cova Fordada, – la grotte trouée -, qui fut durant des décennies l’entrepôt des marchandises illicites, la Vallée de Cosprons et, plus loin, Cerbère et ses cols… de contrebande, disons simplement de passage et d’échanges traditionnels aussi vieux que le monde, que les Albères, que la mer et que le soleil !


C’était tout cela la « Vall de Banyuls », la Vallée de la Vallauris que les Celtes et les Grecs, dès 400 avant J.C., drapèrent de vignes, d’oliveraies et de boisements de micocouliers et qu’Hannibal Barca et ses légendaires éléphants foulèrent et piétinèrent en 218 avant J.C.