Un commentaire récent m'encourage a être plus optimiste. Pas si facile.

Quand j'étais jeune, il y a une trentaine d'années, je pensais que le monde de demain, c'est à dire aujourd'hui, serait différent de celui dont nous avions hérité. Etant sous entendu qu'il serait plus juste, qu'il serait plus sécurisé pour les populations.

Je pensais qu'inéluctablement les hommes, et les femmes bien sûr, s'émanciperaient, que l'éducation leur permettrait d'échapper à la superstition et au culte de la personnalité.

Je pensais que nous fabriquerions de nouvelles traditions, de nouvelles règles sociales en adéquation avec nos besoins et nos aspirations. Que nous sortirions de la culture de la fête et du repos.

Je pensais que nous prendrions notre destin en main. J'étais optimiste…


Force m'est de constater que cet optimisme n'est plus de mise. Les choses ont changé, certes. Mais rien de ce que je croyais ne s'est réalisé. Rien.

Nous n'avons fait que sur-rajouter sur nos propres tares culturelles les tares d'autres cultures. Nous n'avons rien rejeté de nos propres handicaps et nous nous sommes appropriés des handicaps étrangers.

L'immobilisme culturel se pare de prestigieux diplomes acquis à l'étranger, mais sous le parchemain je retrouve l'archaïsme de mon grand père !

Cet archaïsme était vécu naturellement par cet ancètre, il lui était naturel, sans ambiguité, en quelques sortes constitutif. L'archaïsme se pare aujourd'hui d'un vocabulaire technocratique anglo-saxon, manie des concepts de sciences sociales, d'ailleurs souvent dévoyés. Les structures de la pensée, les non-dits collectifs, les contraintes sociales sont toujours les mêmes, juste un peu maquillés…

La marche vers la modernité, vers la démocratie ne sont que des jeux. Nous jouons à nous éduquer, nous jouons à nous croire dans un processus démocratique. Ce faire semblant nous permet de vivre dans l'archaïsme et l'immobilité en toute bonne conscience.

Le Sénégal est aujourd'hui plus pauvre qu'il y a 30 ans. Pas en valeur absolue, quoique ce ne soit pas sûr ! Mais il l'est certainement en richesses disponibles par habitants. Les gens vivent plus mal qu'il y a 30 ans. Je parle évidemment de la majorité de la population qui ne fait partie ni de la petite classe bourgeoise Compadores ni des fonctionnaires.

La population du Sénégal a quadruplé depuis l'indépendance. L'industrialisation du pays est quasiment la même.

La différence ? La seule différence perceptible doit se chercher du côté de notre technique de mendicité, technique dans laquelle nous avons fait de gros progrès…

Je sais qu'inéluctablement les hommes s'émanciperont, que la société sénégalaise, un jour, deviendra plus sécurisée pour ses habitants et plus juste. Un jour… Mais je ne crois plus que je verrai ce jour là… Dommage, j'aurai pourtant bien aimé.

L'auteur du commentaire a sans doute raison de m'inviter à l'optimisme. Il est marocain, cela se passe peut-être mieux chez lui, je ne sais pas, il a peut-être des raisons de croire, parce qu'il voit… Personnellement, ici, je ne vois pas…