CCP France, basée à Levallois-Perret, va éprouver quelques difficultés à trouver des partenaires auprès des banques et établissements de crédit français pour qu’ils fourguent à leurs clients des assurances supplémentaires couvrant les vols ou détournements de cartes de débit ou crédit. Sa maison-mère, Car Protection Plan Ltd, s’est fait copieusement épingler par l’équivalent britannique de l’Autorité des marchés financiers et de la Direction de la concurrence, la FSA. Amendes et dommages et intérêts se montent à 25 millions de livres. Ses « distributeurs », les banques HSBC, Santander, Barclays et d’autres, risquent de se retrouver en délicatesse. CCP fourguait des garanties superflues, redondantes ou en grande partie illusoires.
Non seulement la FSA (Financial Services Authority) a épinglé et condamné fortement CCP Ltd, censée apporter des garanties supplémentaires aux détenteurs de cartes bancaires faisant appel (directement ou selon l’insistance sollicitation de leurs banquiers) à ses services, mais elle a mis en ligne ses décisions. Ce sous la forme d’un document PDF de 24 pages qui narre par le menu les pratiques préconisées par l’assureur mais aussi le caractère souvent illusoire de ses garanties.
CCP est présente dans une foultitude de pays de par le monde, mais notamment en France. Le site français ne liste pas les « partenaires », « entreprises prestigieuses et institutions financières de premier plan », fourguant ses garanties contre la perte, le vol, l’utilisation frauduleuse de cartes bancaires (débit, crédit) ou de téléphones portables. Au Royaume-Uni, c’était (et reste) HSBC, Barclays, Santander et bien d’autres organismes ou banques émettant des cartes.
Parfois, des publicités pour CCP parvenaient aux clients lorsqu’ils recevaient leur première carte ou sa remplaçant. Un numéro d’appel incitait à téléphoner à CCP pour activer la carte ou confirmer qu’elle avait bien été reçue. Santander y avait recours, HSBC vendait directement, d’autres incitaient leurs employés à faire souscrire.
Pour les particuliers, il en coûtait de 35 à 85 livres par annuellement. Relativement « indolore » et il était théoriquement possible de renoncer aux garanties « supérieures » alléguées, et de rompre le contrat à tout moment. Dans les faits, une fois dans le portefeuille de la compagnie, il était très ardu d’en sortir.
Amendes et condamnations à dommages et intérêts ne concernent, pour le moment, que les clients directs de CCP Ltd. La société a d’ailleurs réussi à obtenir une rémission de près d’un tiers de l’amende initialement envisagée, en « négociant ». Une économie de près de 5 millions de livres sur l’amende, fixée à présent à dix, mais 15 autres millions devront être reversés en compensations.
Mais les banques ou établissements financiers impliqués pourraient eux aussi se voir poursuivis.
CCP exagérait systématiquement les risques et conséquences d’une usurpation d’identité bancaire puis renouvelait automatiquement ses contrats chaque année. Non seulement des clients étaient incités à souscrire des garanties qu’ils ne désiraient pas ou n’avaient nul besoin, mais les restrictions apportées aux couvertures des risques étaient importantes.
CCP France vante une assistance sous forme « d’appui personnalisé où que vous soyez ». Pour les détenteurs de cartes Premier ou autres (Gold, Platine), le service CCP Plus fournit « un service d’opposition » (ce que font les banques) et « jusqu’à 10 000 euros de couverture en cas d’utilisation frauduleuse de vos moyens de paiement ».
Fort bien, mais, par exemple, en cas de problème avec une voiture de location, une MasterCard Gold garantit jusqu’à 50 000 euros, et c’est illimité avec une Visa Premier. En général, en matière d’assurance de ce type, les indemnités ne se cumulent pas, du fait qu’on ne peut assurer deux fois un même risque et être remboursé au-delà du montant total des dommages.
L’assurance liée aux cartes bancaires est souvent limitée dans le temps (trois à six mois lorsque vous voyagez à l’étranger), et le plafond varie en général de 11 000 à 150 000 euros (davantage, donc, que le plafond de la garantie CCP). D’autres assurances voyages spécifiques proposent d’autres garanties… et couvrent des risques d’utilisation des cartes bancaires. Mais la plupart du temps, autant régler le voyage au moyen d’une carte bancaire, ce qui dispense dans la plupart des cas d’avoir à souscrire une assurances voyages spécifique.
Hors banche vie (épargne, placements, assurance décès…), multiplier les garanties ne permet aucunement de se faire rembourser au-delà des dépenses ou frais engagés : on n’enverra pas deux médecins à votre chevet, ni deux avions pour vous rapatrier !
Accès aux salons privés
L’une des garanties séparés proposée par CCP Ltd (mais absente sur le site de CCP France) ouvre tout le simplement le droit à l’accès aux salons d’accueil des personnalités ou grands voyageurs dans des gares ou aéroports. 99 livres/an pour accéder au « lounge ». Un membre « Airport Angel » bénéficie aussi de réductions (en certains lieux et selon les firmes ou compagnies ou chaînes) de réductions (hôtelières, de locations de véhicules), généralisées en cas d’utilisation de cartes de débit ou crédit… Et attention, pour cette somme, seuls quatre accès aux salons étaient gratuits (ensuite, 15 livres par visite).
Pour le moment, CCP Ltd a obtenu l’accès à la plus forte amende jamais enregistrée au Royaume-Uni pour une société se livrant à du commerce de détail. Seule HSBC avait subi, en décembre dernier, une amende similaire.
Nombre de ses produits devront être retirés du marché. La FSA avait commencé son enquête début 2011, en mars. Un inspecteur, nommé par la FSA, supervisera l’examen des demandes de compensations.
La Royal Bank of Scotland, qui fourguait une garantie supplémentaire de CCP relatives aux vols de téléphones portables, a indiqué qu’elle ne renouvellerait pas son accord.
Les banques ou chaînes (dont celles citées supra mais aussi Standard Chartered, Tesco) diffusant les produits CCP Ltd seraient, selon le Financial Times, en « discussions » avec la FSA. Le montant total des compensations, toujours selon le FT, pourrait dépasser, avec les amendes, les 33 millions de livres, ce qui augure mal du devenir de la société.
[b]C’est aux États de garantir « l’honnêteté » des banques puisqu’elles jouissent d’un monopole de fait accordé par ces mêmes États.[/b]