Les nombreux cas d’incendies de maisons de bois répertoriés en France en 2017 posent la question du choix des matériaux de construction pour la protection contre le feu.
Depuis plusieurs mois, les incendies de maisons en bois se succèdent, avec leur cortège d’habitations entièrement détruites et de familles à reloger… Quand les résidents ont le temps d’échapper aux flammes et aux fumées toxiques. Ce ne fut malheureusement pas le cas pour ce couple d’une vingtaine d’années et leurs deux enfants de quatre ans et dix-huit mois, qui ont péri dans l’embrasement et l’effondrement de leur maison en bois à Amiens, le 3 novembre 2016.
En 2017, malheureusement, la série continue. Le 6 janvier, une maison à pans de bois est détruite par le feu à Larzicourt, dans la Marne (51). Les vingt sapeurs-pompiers engagés, avec trois lances à incendie, ne peuvent sauver la demeure, dont le toit est déjà transpercé par les flammes à leur arrivée. Le 17 janvier à Concots, dans le Lot (46), c’est une maison à ossature bois de 120 m2 qui s’embrase. Même scène de destruction quelques jours plus tard, le 20 janvier, à Francheval, dans les Ardennes (09) : un chalet emblématique, le premier construit sur le mode canadien dans le département, est ravagé par le feu. Quand les dix-sept hommes des centres de secours des villes voisines arrivent sur place, la bâtisse est déjà dévorée par les flammes.
De nouveaux feux détruisent une maison en bois 90 m2 le 23 janvier à Chinon, en Indre-et-Loire (37), puis une autre le 13 mars à Bédée, en Ille-et-Vilaine (35), puis encore un chalet, le 16 mars, à Maisons-du-Bois-Lièvremont, dans le Doubs (25). Le 17 mars, un violent incendie vient marquer l’actualité tarnaise (81) : sur la commune de Nages, une maison à ossature bois de 100 m2 sur deux étages est entièrement détruite par les flammes en moins de deux heures. Et ce, malgré la présence d’une quinzaine de sapeurs pompiers et d’importants moyens de lutte. Le seul occupant des lieux cette soirée-là, un homme de 46 ans, est assez sérieusement brûlé, notamment aux mains et aux pieds, et doit être hospitalisé.
Un scénario bien connu
Le scénario se répète encore le 17 avril à Douchy-les-Mines, dans le Nord (59). L’incendie éclate au beau milieu de la nuit, vers 2 heures du matin. Quand l’alerte est donnée, le feu est déjà généralisé et quand les secours arrivent, l’habitation est en flammes. De cette longue maison en bois de plain-pied de 200 m2, il ne restera rien. Le 2 mai, une maison à ossature bois part également en fumée à Ploeren, dans le Morbihan (56). Il n’y a pas de victimes mais les dégâts sont énormes. Quand ils ont découvert le feu, suite à une panne de courant, vers 23 heures, les trois occupants, un couple et leur fils, n’ont eu que le temps de se précipiter dehors, les flammes très hautes léchant déjà les murs du sol au du toit.
Le 30 mai, à Sainte-Marie-du-Mont, dans la Manche (50), un pavillon de 150 m2 à ossature bois est entièrement ravagé par les flammes, suite à un court-circuit électrique. Le 4 juin, une ancienne scierie transformée en une résidence secondaire par un couple d’Allemands est détruite par un incendie d’une rare violence à Moussey, dans les Vosges (88). A l’arrivée des pompiers, des flammes sortaient déjà du toit de cette bâtisse en bois de 200 m2, isolée en pleine forêt… Une vingtaine de soldats du feu ont mis en œuvre quatre lances pour lutter contre la violence des flammes, mais celles-ci ont trouvé un aliment de choix dans l’ossature bois de l’habitation. L’embrasement a été total et les occupants ont pu seulement sauver quelques effets personnels. L’un d’eux, incommodé par les fumées, a été pris en charge par les secours.
A Chacé, en Maine-et-Loire (49), c’est la foudre qui s’est abattue le 9 juin sur une maison en bois, entraînant des dégâts considérables. Le 17 juillet, une maison en ossature bois de 120 m2 a été totalement détruite par un incendie à Pierrefontaine-les-Varans, dans le Doubs (25). Le 2 août, un feu a dévasté une maison en bois situé dans une forêt à Vattetot-sous-Beaumont, en plein cœur du Pays de Caux, en Seine-Maritime (76). La maison n’est plus qu’un tas de cendres et le propriétaire de la demeure, légèrement intoxiqué, est transporté à l’hôpital.
Il ne reste plus rien non plus des maisons de bois détruites par le feu le 13 août au Boupère, en Vendée (85), le 25 août au Lamentin, en Martinique, ou le 31 août à Saint-Étienne-du-Rouvray, près de Rouen, en Seine-Maritime (76) … Partout, les témoignages des victimes, des voisins ou des pompiers sont les mêmes : « la maison s’est embrasée très vite ». Dans le meilleur des cas, s’ils étaient là, les habitants ont tout juste le temps de sortir… Et malgré l’intervention des pompiers et le déploiement de moyens importants, l’habitation n’a pu être sauvée.
Le bois, facteur de risques
L’enchaînement de tous ces drames contribue à relancer le débat sur la sécurité des matériaux. En matière de protection contre le feu, certains présentent en effet moins de garanties que d’autres. Et le problème majeur du bois, c’est qu’en dépit de tous les efforts réalisés, il reste un combustible. Il va donc nourrir le feu. Et dans le cas de maisons à ossature bois, c’est la structure elle-même du bâtiment qui va alimenter l’incendie.
Pour démarrer, le feu a en effet besoin d’une flamme, d’air et de combustible. Si les matériaux utilisés pour les murs et les plafonds sont inflammables, ils vont contribuer au développement du feu. S’ils ne peuvent empêcher le passage des flammes et de la fumée, ils ne vont pas retarder sa propagation. Et s’ils ne sont pas capables d’assurer la stabilité de la construction, celle-ci risque de s’effondrer.
Les matériaux sont donc classés selon leur réaction au feu – leur capacité ou non à nourrir le feu – et leur résistance au feu – le temps durant lequel ils continuent à jouer leur rôle d’élément de construction dans les conditions de l’incendie. A l’état naturel, le bois est généralement classé D (moyennement inflammable) sur le plan de la réaction au feu : il s’enflamme entre 250 et 300°C, soit à des températures situées bien en deçà de celles qui sévissent durant un incendie (entre 600 et 1 200 °C). En termes de résistance au feu, ce matériau se consume d’un centimètre en quinze minutes et le montant d’ossature classique, de 4 cm de largeur lorsqu’il est attaqué des deux côtés, se consume donc entièrement en moins de trente minutes, pouvant ainsi entraîner l’effondrement de la maison.
A l’heure où émergent en France des projets d’immeubles de grande hauteur en bois, certains experts n’hésitent pas à faire part de leurs doutes. D’un point de vue économique déjà, le bois est environ 15% plus cher à la construction tout en subissant une décote de 20% à la revente en moyenne. Sous l’angle sécuritaire ensuite C’est le cas du professeur José Luis Torero, expert international de la sécurité incendie, qui s’exprimait récemment sur le site d’information professionnelle batiactu.com : « Construire un immeuble en bois de 25 étages pose des questions nouvelles d’une grande complexité. Le bois peut en effet entretenir la combustion. Or il faut que la structure de l’immeuble ne participe pas à l’alimentation de l’incendie. Et il n’y a pas de réponse facile à cette problématique »… Devons-nous vraiment attendre un drame avant de revoir nos prétentions en matière d’immeubles en bois ?