Plus que quelques minutes, ce soir, passés 18 heures, pour tenter de déterminer ce qu’il adviendra de l’UMP. En effet, selon Alain Auffray, de Libération, la suite du feuilleton de l’UMP pourrait dépendre des résultats de la sixième circonscription de l’Hérault, où l’ex-député Élie Aboud (UMP), à Béziers, affrontait ce dimanche la socialiste Dolorès Roqué, qui lui avait succédé provisoirement, et France Jamet (FN). On s’attend à moins de 38% de participation. Sur quoi se joue donc l’avenir de l’UMP et la querelle Fillon-Copé ? En fait, les résultats dans le Val-de-Marne, ou un UDI et un UMP éliminent le candidat PS, sont tout autant significatives de… l’indécision. On donnait Plagnol (UDI) quasiment réélu d’avance. Son adjoint à la mairie de Saint-Maur le talonne de très près : c’est un UMP. L’opposition « droite molle/droite dure » risque de perdurer.
Selon les premiers résultats du Midi Libre, Aboud (UMP) devancerait Jamet (FN) qui se placerait devant Roqué (PS), députée sortante élue de justesse et invalidée. Un second tour UMP-FN est donc envisagé.
Qu’en résulterait-il ? Localement, vu de Paris, des rues de Solférino ou de Vaugirard, on s’en moque un peu. Pas de quoi bouleverser la composition de l’Assemblée nationale. Mais selon Libération, de qui l’emporterait, de la candidate FN ou du « sorti » UMP (reconduit ou non), va dépendre l’appréciation de Fillon, de Copé, et des non-alignés de l’UMP.
Si le FN l’emportait, « la droite décomplexée » de Copé n’aurait pas réussi à faire rempart contre le FN, donc mieux vaudrait se rabattre sur la ligne Fillon. Mais non, en fait, ce serait la preuve que Copé aurait eu raison, et qu’il faut donc poursuivre pour éviter que le précédent ne fasse tache d’huile.
C’est un peu réducteur, car en fait, ce qui importe davantage, à mon sens et humble avis, c’est qu’un élément pouvant conforter Copé – provisoirement – dans son attitude, s’il peut efficacement en jouer, est intervenu. La Droite forte (Guillaume Peltier, Geoffroy Didier, Camille Bedin) vient de donner de la voix, ou plutôt des voix de celles et ceux ayant soutenu cette motion.
Avec 28 % (présumés, car, en fait, avec la Cocoé, on ne sait plus trop que penser) des suffrages exprimés, La Droite forte s’est placée en tête des motions. Conséquence logique, ses animateurs veulent remporter près du tiers des postes dans les instances de l’UMP.
« Notre mouvement demande à être représenté, dans une large part correspondant au score obtenu, dans chacune des instances dirigeantes du parti, qu’il s’agisse du conseil national, du bureau politique, de la direction ou des commissions exécutives. ». Le « mouvement » veut organiser quatre conventions thématiques sous l’étendard de son courant, et une « grande fête populaire » le 1er mai, place du Trocadéro, histoire de voir qui va se joindre à Marine Le Pen devant la statue de Jeanne-d’Arc, qui vient scander « Copé, Copé, Copé » au Trocadéro (et si possible « Peltier, Peltier, Peltier »).
Jean-François Copé est conscient du danger, et Fillon, qui doit le rencontrer lundi, saura le lui rappeler. Copé, qui propose, tel un président de la Banque centrale européenne, de scinder son mandat en deux (histoire d’avoir tout le temps de verrouiller l’appareil UMP), va devoir compter avec une Droite forte qui risque de vouloir lui succéder. Les jeunes loups ont les dents longues, très longues.
N’a-t-il pas avantage à trouver une amorce de solution (tacite, surtout non-proclamée) avec son concurrent, Fillon, pour marginaliser les jeunes ambitieux ?
Ah, peu avant 19 heures, Dolorès Roqué rattraperait son retard sur sa concurrente du FN. « Grâce aux bulletins du canton III », précise le Midi-Libre. Comme le FN pourrait vouloir fragiliser l’UMP, un Aboud en tête, suivi d’une Roqué, pourrait plaider pour la réélection de la socialiste. Mais bon, allez savoir…
Le sort de Devedjian, électron libre de l’UMP, dans les Hauts-de-Seine, ou de l’UDI Henri Plagnol, maire de Saint-Maur, dans le Val-de-Marne, importe beaucoup moins.
Ce sera, demain, la cinquième rencontre en tête-à-tête, pour éviter les fuites, entre Copé et Fillon. Ce dimanche, Copé à réitéré l’intention de conserver la haute main sur l’appareil jusqu’aux lendemains des municipales de 2014. Il a été question de confier à Fillon la présidence d’un groupe parlementaire unifié (donc, le Rump serait laissé aux sots qui s’accrocheraient, s’ils restaient une quinzaine, à ne pas laisser ce morceau de croupion), histoire de lui permettre de se mettre en avant.
De leur côté, les non-alignés se disent encore plus majoritaires que La Droite forte, et veulent leurs parts de gâteaux dans toutes les instances. Ennui : ils ne sont pas unanimement alignés derrière NKM, Xavier Bertrand, ou Le Maire. Fillon serait résolu à aller jusqu’au bout, histoire de faire oublier son rôle de béni-oui-oui de Sarkozy pendant cinq ans.
Ah-ha, Élie Aboud pourrait être en tête, avec entre 35 et 40 % des voix au premier tour. Le danger FN ne serait pas aussi redoutable qu’on l’estimait, y compris dans une circonscription du sud très droitière, et une ville en déshérence (moins d’un millier d’habitants, des commerces qui ferment, &c.). Il s’agit d’une estimation portant sur un quart des bureaux. Aboud va-t-il se proclamer en tête, comme Copé, sans attendre les résultats définitifs ?
L’une des voies de sortie (du conflit, pas du tout de la présidence) de Copé serait de porter plainte au pénal et d’accuser le clan Fillon de fraudes, rapporte Le Figaro. « Une procédure qui durerait plusieurs années, pendant lesquelles il resterait président de l’UMP, » conclut Judith Waintraub, du Figaro. Alors, finalement, hein, l’Hérault…
NKM et Xavier Bertrand s’impatientent. Mais attendez, dans les fiefs, on s’organise, tout seul, sans plus demander à Fillon ou Copé de se déplacer ou s’exprimer. À Dijon, c’est Laurent Bourguignat qui revitalise son association « Objectif Première ». Ailleurs, c’est Machine ou Untel qui pousse ses pions. Pas d’implosion de l’UMP, assure Xavier Bertrand, mais de multiples forces centripètes. Chacun se place et veut capitaliser sur son aura personnelle. Ainsi de Rachida Dati qui, même si Copé la désavouait, jouerait son jeu personnel pour la mairie de Paris.
Premiers résultats définitifs dans l’Hérault : Aboud, suivi de Roqué, puis de Jamet à Sérignan. Peu décisif, car si Aboud emporte ce premier tour, il ne le devra qu’à lui-même, certainement pas à Copé ou à Fillon, ou à NKM, ou quiconque. Sarkozy s’était promis qu’il mettrait au pas Fillon et Copé, Marine Le Pen s’était déclarée convaincue que France Jamet arriverait devant le candidat de l’UMP. Eh beh, sur 31 bureaux, Aboud est à 41 %. Comme quoi, il ne suffit pas de décréter depuis Paris. Jamet (FN) risque de se retrouver… en troisième position, comme à Maraussan, avec pour la circonscription toute entière, un score de trois points inférieur à celui de la candidate PS, proche de deux fois moins que le score du candidat UMP.
Première déclaration de France Jamet, au Midi Libre : « c’est un vote clientéliste ». Pour Copé et Fillon, c’était quoi ? Mais la clientèle risque d’aller voir ailleurs.
Au final, à quelques décimales près, Élie Aboud emporterait plus de 42,5 % des voix, Dolorès Roqué près de 28 % et France Jamet n’atteindrait pas les 24 %. Paul Barbazange (Front de Gauche), frôle, mais n’atteint pas, les 5 %. France Jamet ne peut se maintenir au second tour. Où iront ses voix ? Dans les limbes ?
Devedjian loin devant
Dans les Hauts-de-Seine, le taux de participation a été faible (33 %). Devedjian est largement en tête, frôlant la réélection tandis que son adversaire socialiste n’atteint pas 33 %. Il a en effet obtenu 49,82 % des voix, et a estimé que « les électeurs de gauche ne se sont pas déplacés et le Front national a baissé. ». Devedjian avait bénéficié de la venue de copéistes, fillonistes et non-alignés, mais avait surtout axé sa campagne sur son implantation locale, ne faisant même pas figurer le sigle de l’UMP sur ses affiches et matériaux de campagne.
Dans le Val-de-Marne, c’est assez inattendu : la réélection d’Henri Plagnol, député ex-UMP passé UDI, maire de Saint-Maur-des-Fossés, semblait quasiment acquise. Il va se retrouver devançant son adjoint UMP, Sylvain Berrios, de 671 voix. Le socialiste Akli Mellouli a fait un peu moins de 20 %, et cela serra serré entre Henri Plagnol et Sylvain Berrios que moins de 3 % des voix séparent.
Aldi Mellouli a estimé payer « le contexte national » et un duel anticipé pour les municipales entre Sylvain Berrios et Henri Pagnol. En clair : les électeurs socialistes ou apparentés se sont peu mobilisés, les deux camps, en prévision des municipales, ont vraiment fait campagne.
Sylvain Berrios s’était « engagé très tôt auprès de Jean-François Copé ». Mais il avait invité NKM et Fillon à Saint-Maur (de même que Copé). Le FN ne donne pas de consigne de vote pour le second tour : « Sylvain Berrios et Henri Plagnol constituent les deux mêmes facettes de l’UMP et leur querelle reflète celle de l’UMP au niveau national : elle est grostesque ! » a estimé Dominique Joly (pour 94 citoyens .com). Le FN a surtout progressé à Créteil, Champigny et Bonneuil, là où la bisbille entre l’ancien fondateur de l’UMP (Plagnol) et le champion de l’UMP canal historique concernait peu les habitants.
Qu’en déduire ?
Que déduire ? Franchement, rien ou presque. Surtout pas comme l’avance Fillon que c’est « clairement un avertissement » pour le gouvernement. Les électeurs socialistes auraient déserté pour manifester un fort mécontentement ? Allons donc : cela n’allais pas changer le monde, ni la vie politique nationale. Autant aller à la pêche. Que là où les enjeux locaux sont incarnés par des personnalités, les querelles nationales influent peu ? Sans doute. Que le personnel local du FN n’enthousiasme pas autant qu’une Marine Le Pen, un médiatique Collard ou « la nièce du chef », peut-être, sans doute, et ce n’est sans doute pas gagné d’avance pour les prochaines élections territoriales ou européennes : le FN progressera, certes, mais sa percée, sans événement marquant pour la favoriser, n’est pas acquise d’avance.
Ni Fillon, ni Copé ne sont vraiment confortés dans leurs positions. Il n’y a rien à tirer de fondamental du score de Devedjian. Mais Copé pourra toujours avancer que les caciques ont fait leur temps, comme dans le Val-de-Marne où son jeune poulain met en délicatesse un « historique » devenu dissident. Il peut aussi faire valoir qu’Aboud s’était déclaré pour lui (avant de prendre ses distances et ne pas jouer sa Morano).
Au doigt mouillé, je m’en tiens à mon impression : les fiefs UMP vont prendre de l’autonomie. Les baronnies vont se renforcer, autour des gens en place, ou des nouveaux venus si les caciques locaux ont déçu. Et si les jeunes loups voient leur avantage à se placer derrière La Droite forte, Copé a du souci à se faire pour son devenir. Quant à Devedjian, en délicatesse avec Sarkozy, Balkany, et les autres, il doit jubiler. Soutenu aussi par l’UDI, il avait pris position pour Fillon, et cela ne lui a pas nui. Comme quoi, hein, Sarkozy…