D’un côté, Jean-Claude Junker, de l’Eurogroupe, se dit sûr, enfin, confiant qu’une décision sera prise à propos de la Grèce le 20 février. De l’autre, Evangelos Venizelos, le ministre grec des Finances, sans le contredire frontalement, laisse entendre que quelques points d’achoppement subsistent et, surtout, l’Allemagne, les Pays-Bas et la Finlande semblent vouloir mettre la Grèce sous tutelle, une menace qui pourrait être le prélude d’un divorce de la Grèce avec la zone euro (ou de l’Eurozone avec la Grèce).

Evangelos Venizelos l’a dit sans ambages : « Beaucoup, dans la zone euro, voudraient nous voir dehors ». Se concertant avec le président Karolos Papoulias, il a conclu que les Grecs « se voient constamment opposer de nouvelles conditions et échéances. ».
Aux réticences maintes fois exprimées par le ministre allemand des Finances s’ajoute la crainte qu’un embargo pétrolier de l’Iran frappant la Grèce augmente son incapacité à rembourser l’emprunt qui lui serait consentie.
Du côté grec, Antonis Samaras, de la Nouvelle démocratie, la formation semblant être en assez bonne posture d’emporter le plus de sièges lors des prochaines élections, en avril, s’est engagé à respecter les termes de l’accord imposé par les créanciers européens.

Mais avec un bémol, car il n’exclut pas une renégociation de la répartition des efforts consentis.

Du coup, les Allemands, les Néerlandais et les Finnois, trois des réels garants (leurs pays restant notés AAA) des futurs fonds de solidarité européens, voudraient que les partis grecs minoritaires s’engagent à l’avance sur l’ensemble des mesures que l’Europe impose.

De plus, ils laisseraient entendre qu’ils voudraient un délégué ou une représentation permanente en Grèce, une supervision de leur part.

C’est un peu ajouter l’injure à l’humiliation, alors que d’autres rumeurs font état de versements progressifs, ou d’un report de la mise à disposition des fonds à la Grèce.

Le ministre des Finances belge a d’ailleurs mis sous conditions le déblocage du plan d’aide à la Grèce.

« Si, lundi, nous donnons notre feu vert politique, le décaissement effectif sera assorti de conditions supplémentaires, » a-t-il déclaré pour l’ensemble de ses homologues.
Ce « si » donne-t-il le « la » ? C’est toute la question.

Ainsi, il faudrait que la baisse du salaire minimum (de 22 % au minimum, de 35 % pour les plus jeunes et les débutants, soit 510 euros, soumis à l’impôt) soit actée au plus vite (que la loi d’adoption soit suivie d’un décret d’application) avant tout début de versement.

Carolos Papoulias, le président grec, a renoncé à un copieux salaire (il est mieux payé qu’Obama), mais ce geste n’a pas suffi, semble-t-il, pour rassurer la troïka.

En fait, les Grecs, comme Evangelos Venizelos, qui met en garde que l’Europe « joue avec le feu », se demandent si on ne veut pas les contraindre à prendre le large.

Pour la première fois, au Parlement européen, Martin Callanan, chef du groupe conservateur et réformateur, a émis l’opinion qu’une faillite de la Grèce, accompagnée par des mesures de soutien, serait sans doute plus judicieuse.

Cela permettrait, selon ce que laisse entendre à demi-mots le ministre allemand des Finances, de placer un pare-feu plus efficace devant le Portugal, qui devra sans doute aussi être de nouveau aidé.

Tension croissante

Sur le terrain, la presse a fait état de la menace de suicide spectaculaire d’une femme qui venait d’apprendre qu’elle serait licenciée. Elle et son mari sont employés par la même agence gouvernementale, qui anticipe les mesures de rigueur à austérité renforcée.

Il a été aussi remarqué la sortie inattendue d’un nouveau titre éphémère, intitulé Les Travailleurs. Il s’agit d’une édition spéciale de ce qu’il reste de la rédaction du quotidien Eleftherotypia, en faillite. Le cinéaste Costa-Gavras y participe avec un entretien au titre évocateur : « Les banques souveraines ». La faillite du journal, selon son propriétaire, aurait été accélérée par deux banques en raison de sa ligne éditoriale hostile au monde de la finance.

EKathimerini estime que le sablier se vide pour la Grèce, prolongeant l’agonie. Ta Nea pense savoir que les pensions complémentaires des retraités des banques seront réduites d’un cinquième au-delà de 200 euros. Les négociations avec l’Europe évoquent pour son éditorialiste un « supplice chinois » (celui de la goutte d’eau).

Les fonds versés à la Grèce seraient mis sur un compte bloqué, destiné à prioriser le remboursement de la dette. Mais la plupart des analystes considèrent qu’une relance de l’activité serait plus appropriée à la situation, pour éviter un embrasement, et une descente précipitée vers la misère du plus grand nombre.