Après les intouchables, polisse, time out, et d’autres films qui ont su attirer des foules, le film iranien de Jafar Panahi sorti en 1997 et tout fraichement en salles, ne semble pas intéresser grand monde vu le faible nombre de spectateurs aujourd‘hui.

Pourtant primé au festival de Locarno (Léopard d’or), ce film qui dépeint une société iranienne patriarcale à l’état brut, à travers les pérégrinations d’une fillette seule dans les rues bondées de monde d’un Téhéran poussiéreux a tout pour nous transporter dans un monde particulièrement attachant.

Seulement voilà, au cours du tournage, le comportement subversif de l’adorable enfant sans doute oppressée par le poids du rôle, de la soumission à la caméra décide de tout balancer, envoyant au diable toute l’équipe pour mettre fin à son supplice tout en mettant en péril la réalisation du film.

Ainsi rompant le contrat, elle s‘élance à corps perdu à la recherche de sa mère, à la recherche de son chemin en plein cœur d‘une ville assourdissante où juste traverser une rue semble relever de l’exploit tant est exacerbée l’indiscipline des Iraniens au volant.

Ignorant cependant la présence de son micro-cravate, celle aussi de l’équipe de tournage déterminée à poursuivre le film et lancée en catimini à ses trousses tout en s’efforçant tant bien que mal de voler des bribes de scènes éclatantes de naturel, alors qu’elle se démène prodigieusement pour sortir de cette étouffante impasse.

Du début jusqu’à la dernière minute du film devenu donc presque documentaire, tout souffle se retient pour ce petit bout de chou à la voix si touchante.

Malheureusement, Jafar Panahi vient de se voir notifier sa condamnation : six ans de réclusion assortis d’une interdiction de tourner pendant deux décennies juste pour avoir tourné sans autorisation officielle. Aussi pour avoir soutenu les manifestations favorables à Mirhossein Moussavi lors du scrutin présidentiel de 2009 qui a consacré l’élection controversée du président Ahmadinejad. Accusé de "rassemblement, de collusion contre la sécurité nationale et propagande contre la République islamique" pour ces multiples dérives, le cinéaste devenu cible des autorités, est interdit de diffusion en Iran.

 Il aura connu ces derniers mois une vie particulièrement mouvementée où se mêlent prison, grève de la faim, libération sous caution avant cette lourde sanction. Jafar Panahi, un si beau palmarès particulièrement fourni où se succèdent, Caméra d’or, Lion d’or, Ours d’argent…

 La liberté d’expression, un droit absolument inaliénable mais pourvu que la sortie programmée cette semaine de Miroir ne soit pas l‘arbre qui cache la forêt !

 

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