Une certaine Valérie Pécresse serait ministre du Budget en France. Elle vient de dénoncer, au sujet de la crise de la zone euro, « le langage d’auto-dénigrement adopté par la gauche ». Laquelle ? L’allemande ? Qui se gausserait d’elle-même ? S’il s’agissait d’exprimer que la gauche française juge les amabilités de façade de Nicolas Sarkozy et d’Angela Merkel quelques peu dérisoires, cela se conçoit. Mais il est déplorable de penser qu’une ministre du Budget ne lise sans doute que Le Figaro. On lui conseille la lecture du Financial Times, du Wall Street Journal, et de se faire traduire la presse économique allemande, le Handelsblatt, par exemple…

Quand c’est trop, c’est trop. Ce serait donc en écoutant François Hollande que Standard and Poor’s, Moody’s ou Fitch Ratings (sans compter les autres) se feraient une idée de plus de quatre ans de « gestion » française et de construction européenne de Nicolas Sarkozy. Et Poutou, il souffle dans l’oreille des agences de notation ? Si, vraiment ?

Et quand Moody’s (le 5 déc.) assigne un Baa3/P-3 à la nouvelle entité bancaire espagnole, Banco de Caja España de Inversiones, Salamanca y Soria, S.A. (Banco CEISS), c’est parce que Mélenchon a émis des doutes ?

Quand Fitch considère que les tripatouillages comptables des banques pour présenter des comptes mieux présentables (communiqué du 2 décembre) ne trompe personne, c’est après avoir consulté Duflot ou Eva Joly ?

N’était-ce point un certain Sarkozy, Nicolas, qui, alors ministre de l’Intérieur, considérait « dépassé » le couple franco-allemand ? Kim Willsher, du Guardian, s’en souvient, elle.

Et ce n’est pas la gauche française qui estime que le risque d’une « gadarene panic » (panique désordonnée, précipitée, ici) subsiste, mais John Lichfield, de l’Independent. Les décisions annoncées pour éviter une réaction en chaîne étaient certes indispensables, mais non pas suffisantes, estime-t-il à très juste titre.

Ce n’est quand même pas la gauche française qui relève que, si les banques et les pays européens perdent leur triple A, il en ira de même de celui du Fonds de stabilité : c’est le Wall Street Journal qui énonce cette évidence.

Ce n’est pas la gauche française, mais le Frankfurter Allgemeine Zeitung qui indique que les fonds espérés du FMI, du fait d’un non relèvement de la contribution américaine, risquent d’être insuffisants pour les pays voulant se tourner vers le fonds international.

Et lorsque Jean-Claude Junker estime, sur Deustchlandfunk, que la décision de S&P est exagérée, et même choquante, que lui répondent vraiment les fonds de pension, par exemple ?

Auto-dénigrement ?

Jospin avait dit en très peu de mots, « l’État ne peut pas tout ». La logorrhée sarkozyenne, en discours fleuves, ne dit pas autre chose, et c’est évident pour tout le monde. Et dans trois mois, soit mars au plus tard, date-butoir indiquée par Junker, il sera toujours dit la même chose : il n’y a d’autre voie que la rigueur, la Fiskalunion, qui n’est que le cache-sexe d’un très strict, et nécessaire, contrôle budgétaire.

Ce qui est attendu du président Sarkozy, et non du candidat Sarkozy qui a tout déjà promis en 2007, et fort peu tenu, c’est l’annonce de la répartition de la rigueur. Quelles mesures fiscales touchant, soit frappant, qui au juste ? Quelles coupes budgétaires ayant quelles implications pour les services publics précisément ? Des fermetures de permanences des guichets des préfectures et des caisses d’assurance maladie, ce qui se constate déjà ? Où ? Combien ?

La gauche a bon dos. Qui a fait déraper les derniers budgets et au profit de qui ? Sans doute pas trop François Fillon, qui a dû à chaque fois s’incliner.

Le plus ridicule d’entre tous a été Baroin, disant aux Françaises et aux Français que la décision de Standard & Poor’s ne prenait pas en compte le blabla de Merkozy. Qui peut le croire ? Le petit tiers de la population satisfait de Sarkozy ? Qui peut croire qu’un troisième plan de rigueur ne sera pas étudié et qui peut gober que, faute de redonner des capitaux aux banques, des facilités fiscales ne sont pas déjà négociées ? « Nous avons plus à faire que d’autres, » n’a pas caché Alain Juppé. Sans doute, comment ?

Les prévisions pour la journée, c’est un taux euro-dollar retombant à 1,330 (-0,005), quelques que soient les déclarations de Valérie Pécresse.

L’Italie réduit le nombre de ses élus locaux. Jan Zahradi, député européen, suggère de supprimer les ministères des Finances de divers pays au profit d’un seul. Boutade, certes, mais qui en dit long.

De toute façon, comme le fait remarquer le député européen allemand Sven Giegold, la souveraineté de l’Allemagne est aussi un leurre si le seul choix possible est « payer des millions et des millions » de mauvaises dettes.

Souhaitons à Nicolas Sarkozy que, redevenu avocat d’affaires, il puisse avoir pour clientes ces banques qu’il a si bien servi. Et pour Valérie Pécresse, ancienne d’HEC, qu’elle devienne consultante pour ces mêmes établissements financiers. Car il serait quand même lamentable, qu’après la chute de Lehmann Brothers, n’ayant suggéré aucune solution satisfaisante, elle puisse retrouver un poste à l’Université…