En dépit des annonces de lutte contre la contrefaçon, le spam se porte bien.

La tendance actuelle a été actée : un pourcentage majoritaire et croissant du spam promeut des officines illégales de pharmacie qui constitue par conséquent une filière rentable et intéressante.

Mais pourquoi la lutte contre le spam est-elle si difficile ? La Federal Trade Commission a expliqué récemment qu'elle connaissait l'identité des personnes impliquées dans les campagnes d'officines illégales de pharmacie telles qu'European Pharmacy. Non seulement ces personnes sont connues mais elles sont géographiquement localisées… en Russie. Un pays dont le manque de collaboration est dénoncé.

Le trafic est néanmoins bien organisé. Anciennement appelé Pharmacy Express, European Pharmacy (ou Canadian Pharmacy) est répertorié comme le pire spammeur mondial par l'organisation Spamhaus. De fait, la stratégie de communication du spammeur repose sur un principe de campagne d'affiliation dont l'organisation a été confiée à la société Glavmed. Le principe est assez simple : les sites affiliés diffusent le matériel publicitaire de l'annonceur et sont rémunérés en contrepartie à la performance, c'est-à-dire au chiffre d'affaires générés sur la base d'un pourcentage de 40% de ce chiffre.

L'officine reposant sur un fonctionnement de type e-commerce, elle est soucieuse de maintenir la visibilité de son site de e-commerce et d'en accroître son référencement. Le site étant interdit, le spammeur s'expose régulièrement à la suppression du nom de domaine sous lequel il est enregistré. Des milliers de noms de domaine sont donc achetés auprès de bureaux d'enregistrement (registrars) du monde entier.

Le spamming est une technique permettant de donner une visibilité importante au site. Le principe est une captation de base de données d'adresses emails se faisant arroser de spams par le biais d'un réseau de botnets, le réseau Storm, géré par un prestataire russe du nom de Russian Business Network.  Un même utilisateur d'une adresse mail peut recevoir jusqu'à 40 ou 50 spams du même annonceur, pointant des noms de domaine différents pour un même site.

Au final, la stratégie est extrêmement complexe mais il est vrai que le site a réussi à obtenir une visibilité très importante en dépit des nombreux contenus dénonciateurs que l'on trouve sur internet vis à vis de cet organisateur.

Le chiffre d'affaires généré par ce type de campagne est toujours discuté. En 2008, les chercheurs de l'université de Berkeley ont étudié l'une des campagnes de spam menée par une fraction du réseau de botnets Storm. Il en est ressorti que le pourcentage d'ouverture du mail rapporté au nombre d'utilisateurs spammés est extrêmement faible. Le taux de clic est encore plus bas et le passage à l'acte d'achat encore plus. Pourtant, si ce type de campagne génère un taux de transformation si faible, la situation est financièrement intéressante grâce à la valeur des achats réalisés, permettant de totaliser un chiffre d'affaires brut de quelques millions de dollars chaque année.

Le faible prix de vente des produits "pharmaceutiques proposées", les labels dont les officiles illégales se réclament faussement sont autant d'arguments permettant de convaincre un ensemble d'internautes peu sensibilisés aux risques de la contrefaçon.

Certes, Luc Chatel a récemment annoncé un renforcement de la lutte contre la contrefaçon et l'extension de la plate-forme de signalement des contenus illicites sur internet devrait accroître les possibilités de répression. Mais il semble bien que les réseaux mafieux russes pourront continuer leurs méfaits encore longtemps…