Voilà une question qui peut en surprendre plus d'un mais, qui a été abordée par Anne Muxel, directrice de recherche au CEVIPOF*, dans son livre intitulé Toi, Moi et la politique. L'angle de lecture de cet ouvrage est d'envisager  les debats politiques dans l'intimité des relations conjugales et familiales. C'est là toute l'originalité de cet écrit, réalisé à partir d'entretiens avec des hommes et des femmes d'horizons politiques différents vivant ensemble.

La question de fond est de savoir tout simplement, si "deux personnes de convictions politiques opposées peuvent cohabiter" (d'avance pardon, pour le jeu de mots faisant allusion à nos années de cohabitation politique…)?

Cette question est loin d'être anodine puisque la France se démarque par l'union d'un Chef de l'Etat de droite et d'une ex-mannequin chanteuse, Carla Bruni, qui se déclarait volontiers de gauche durant la campagne présidentielle de celui qui allait devenir son futur époux. 

N'en déplaise à notre Président Nicolas Sarkosy, la tendance au sein des ménages est plutôt à l'homogamie politique.

En effet, l'auteur constate que pour les trois quarts des couples, il émane une ressemblance des opinions politiques. La majorité des gens estiment qu'il faut être d'accord pour s'aimer. Les témoignages sont éloquents : la grande majorité des Français considèrent "qu'une concordance des choix politiques est la base de la paix des ménages". Parfois, Anne Muxel note que cette homogénéité conjugale peut conduire à  la figure extrême de "l'impératif catégorique", selon lequel les intimés refusent de se rencontrer si les convictions sont contraires, sans être forcément radicalement opposées. C'est la fameuse phrase d'une fille interrogée par l'auteur : "Je ne pourrai jamais être amoureuse de quelqu'un qui vote Sarko".

La différence politique se traduit aussi par de véritables cassures au sein des couples, entraînant des ruptures. Beaucoup d'hommes et de femmes disent de ne pas avoir réussi à surmonter les opinions politiques contraires de leurs conjoints. "Pour moi, mon époux était du côté de l'ennemi et de toutes les valeurs que je réfute…Cela a rendu les choses peu à peu impossibles".

Bien que l'idée générale soit à la convergence politique au sein des familles, Anne Muxel se refuse au pessimisme, en précisant que l'amour peut vaincre ces clivages d'opinions, sous réserve que les époux restent modérés et respectueux. Certains parviendraient même à se construire dans cette opposition, en y voyant un moyen d'ajouter du piment à leur quotidien.

La meilleure preuve du respect des différences est sans conteste le tandem Sarkozy-Bruni, qui a su positiver le désaccord politique et le transformer en force vertueuse.