De violentes émeutes ont éclaté ces derniers jours à Sidi Ifni et Gafsa, localités situées respectivement au Maroc et en Tunisie. C’est le chômage, couplé à l’absence de perspectives, qui a conduit, les 6 et 7 juin, des chômeurs à descendre dans les rues de ces deux petites villes, perdues à des centaines de kilomètres au sud de Rabat et de Tunis.
A Sidi Ifni (20 000 habitants), port de pêche d’une région berbère contestataire, limitrophe du Sahara occidental, une violente altercation a opposé, samedi, les forces de l’ordre à des jeunes manifestants. Ceux-ci bloquaient le port pour contester un tirage au sort organisé un peu plus tôt par la municipalité pour l’embauche de trois personnes.
Le bilan de l’échauffourée qui a suivi est incertain. Les associations locales, notamment Aït Baamarane et le Centre marocain des droits humains (CMDH), avancent le chiffre d’au moins deux morts et de nombreux blessés. Information confirmée par la chaîne de télévision Al-Jazira, qui fait état de deux à huit morts.
Les autorités marocaines, quant à elles, parlent de 44 blessés et démentent énergiquement qu’il y ait eu des morts. Elles accusent Al-Jazira de « légèreté dans la collecte de l’information ». Reste que l’accès à l’hôpital de Sidi Ifni est bloqué par les forces de l’ordre, ce qui alimente les rumeurs.
Dans le sud tunisien, pendant ce temps, la région de Gafsa (120 000 habitants) s’enflammait à nouveau. Vendredi, un jeune de 25 ans a été tué par balles à Redeyef (l’un des quatre bassins miniers de Gafsa), lors d’affrontements avec les forces de l’ordre. Déjà, en mai, un jeune manifestant était mort électrocuté alors qu’il tentait de couper des câbles électriques. A l’annonce de ce nouveau décès, la colère a été telle que l’armée a été appelée en renfort et s’est déployée, samedi, à la place de la police.
Voilà cinq mois que les quatre bassins miniers de Gafsa, ville déshéritée de l’intérieur où le taux de chômage dépasse les 30 %, sont secoués par des émeutes. Le seul employeur de la région, la Compagnie des phosphates de Gafsa (CMG), n’embauche plus depuis des années, en raison de la mécanisation des mines. Le nombre des employés est passé de 14 000 dans les années 1980 à 5 000. Le 7 janvier, 81 postes ont toutefois été proposés. Plus de 1 000 candidats se sont présentés. Dès que la liste des « gagnants » a été affichée, la révolte a éclaté. Selon Hajji Adnane, porte-parole du mouvement de Redeyef, « les embauches étaient affaire de corruption et de népotisme ».
Les mineurs de Redeyef se plaignent d’être otages d’un potentat local qui est à la fois patron, délégué syndical et député du Rassemblement constitutionnel démocratique (RCD), le parti au pouvoir. Ils accusent également la police de se livrer régulièrement à des provocations et à des pillages. Les femmes sont aux premières loges de ce combat contre le pouvoir. Fait exceptionnel : elles étaient nombreuses, samedi, à assister à l’enterrement du jeune tué la veille par la police.
Florence Beaugé – LE MONDE – 09.06.2008
De violentes émeutes ont éclaté ces derniers jours à Sidi Ifni et Gafsa, localités situées respectivement au Maroc et en Tunisie. C’est le chômage, couplé à l’absence de perspectives, qui a conduit, les 6 et 7 juin, des chômeurs à descendre dans les rues de ces deux petites villes, perdues à des centaines de kilomètres au sud de Rabat et de Tunis.
A Sidi Ifni (20 000 habitants), port de pêche d’une région berbère contestataire, limitrophe du Sahara occidental, une violente altercation a opposé, samedi, les forces de l’ordre à des jeunes manifestants. Ceux-ci bloquaient le port pour contester un tirage au sort organisé un peu plus tôt par la municipalité pour l’embauche de trois personnes.
Le bilan de l’échauffourée qui a suivi est incertain. Les associations locales, notamment Aït Baamarane et le Centre marocain des droits humains (CMDH), avancent le chiffre d’au moins deux morts et de nombreux blessés. Information confirmée par la chaîne de télévision Al-Jazira, qui fait état de deux à huit morts.
Les autorités marocaines, quant à elles, parlent de 44 blessés et démentent énergiquement qu’il y ait eu des morts. Elles accusent Al-Jazira de « légèreté dans la collecte de l’information ». Reste que l’accès à l’hôpital de Sidi Ifni est bloqué par les forces de l’ordre, ce qui alimente les rumeurs.
Dans le sud tunisien, pendant ce temps, la région de Gafsa (120 000 habitants) s’enflammait à nouveau. Vendredi, un jeune de 25 ans a été tué par balles à Redeyef (l’un des quatre bassins miniers de Gafsa), lors d’affrontements avec les forces de l’ordre. Déjà, en mai, un jeune manifestant était mort électrocuté alors qu’il tentait de couper des câbles électriques. A l’annonce de ce nouveau décès, la colère a été telle que l’armée a été appelée en renfort et s’est déployée, samedi, à la place de la police.
Voilà cinq mois que les quatre bassins miniers de Gafsa, ville déshéritée de l’intérieur où le taux de chômage dépasse les 30 %, sont secoués par des émeutes. Le seul employeur de la région, la Compagnie des phosphates de Gafsa (CMG), n’embauche plus depuis des années, en raison de la mécanisation des mines. Le nombre des employés est passé de 14 000 dans les années 1980 à 5 000. Le 7 janvier, 81 postes ont toutefois été proposés. Plus de 1 000 candidats se sont présentés. Dès que la liste des « gagnants » a été affichée, la révolte a éclaté. Selon Hajji Adnane, porte-parole du mouvement de Redeyef, « les embauches étaient affaire de corruption et de népotisme ».
Les mineurs de Redeyef se plaignent d’être otages d’un potentat local qui est à la fois patron, délégué syndical et député du Rassemblement constitutionnel démocratique (RCD), le parti au pouvoir. Ils accusent également la police de se livrer régulièrement à des provocations et à des pillages. Les femmes sont aux premières loges de ce combat contre le pouvoir. Fait exceptionnel : elles étaient nombreuses, samedi, à assister à l’enterrement du jeune tué la veille par la police.
Florence Beaugé – LE MONDE – 09.06.2008
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