"Vous avez une main d'oeuvre qui ne demande qu'à être formée, nous avons beaucoup d'intelligence et beaucoup de formation. (…) Ensemble, avec votre main d'oeuvre, avec nos écoles, nos universités, avec ce que nous échangerons, nous pouvons créer un modèle qui triomphera dans le monde entier": voilà le discours qu'a tenu Nicolas Sarkozy à 500 patrons français et tunisiens lors du forum économique organisé mardi. Après sa sortie sur le manque d'imagination et de courage des peuples méditerranéens de la veille, il s'enfonce.

 

Croit-il arranger les choses en ajoutant : "Nous voulons travailler avec vous, pas comme une puissance post-coloniale, comme une puissance qui partage avec vous une communauté de valeurs, à égalité" ? A égalité, mais avec l'intelligence d'un côté et les muscles de l'autre… Quel mépris ! Décidément ce président déshonore la France chaque jour un peu plus.

Puisqu'il vient d'évoquer une "communauté de valeurs", qu'en est-il des droits de l'Homme ? Après avoir accordé un satisfecit au régime tunisien, pourtant rien moins qu'exemplaire dans ce domaine, il s'explique : "La France sera entendue des autres sur toutes les questions y compris les plus sensibles, celles des droits de l'Homme, si elle-même fait des efforts." Belle lucidité : la France viole désormais les droits de l'Homme sur son propre territoire, par exemple en enfermant des bébés dans les centres de rétention ou en séparant des familles, victimes de l'ignoble politique des quotas d'expulsés. Sarkozy ne peut donc plus donner la leçon sur ce chapitre.

Son invitation à faire "des efforts" s'adresse-t-elle à Brice Hortefeux, son ministre de la Souheir_BelhassenPersécution des étrangers ? Hypocrite ! Comme Rama Yade : présente en Tunisie dans la délégation française, la secrétaire d'Etat aux droits de l'Homme "a pour sa part évité systématiquement les journalistes et fait savoir par son cabinet qu'elle ne répondrait pas à leurs questions", comme le rapporte l'Express. Les défenseurs tunisiens des droits de l'Homme sont atterrés : "C'est la realpolitik qui prévaut, constate ainsi Souheir Belhassen, la présidente tunisienne de la Fédération internationale des droits de l'Homme. On ne dérange pas un client".

 

couv5"Sarkozy avait promis une politique étrangère exemplaire, de défense des libertés et des droits de l’Homme. Les Français héritent d’un super-VRP, serviteur zélé des milieux d’affaires et du complexe militaro-industriel, signant à tire-larigot des contrats, réels ou sujets à caution, avec d’aussi exquis démocrates que Kadhafi, les dirigeants chinois ou la royauté saoudienne. Il met ainsi dans sa poche, avec son mouchoir et le stylo du Président roumain par-dessus, ses vibrantes promesses d’une politique en faveur des droits de l’Homme.

Sur l’échiquier de la diplomatie internationale, Sarkozy n’est qu’un nouveau pion au service de la real politik traditionnelle, juste poussée à son paroxysme d’hypocrisie et de cynisme. « Rupture » ? Non, imposture !", écrivons-nous dans La grande manipulation (que vous pouvez commander en cliquant sur ce lien). A cette liste d' "exquis démocrates", ajoutons donc Zine el Abidine ben Ali.