Philippe Alexandre, dans Le Bien public, a très bien résumé la position dans laquelle s’engluent Nicolas Sarkozy, le gouvernement, la majorité présidentielle. Le message qu’ils envoient aux Françaises et Français, c’est qu’ils sont malades,  du pouvoir présidentiel, et trop pour entendre quoi que ce soit… voire pour s’entendre les uns et les autres dire tout et son contraire.


Rien de flambant neuf, mais pas mal de réchauffé au sujet du Woerthgate, ce matin. ToulÉco, quotidien de l’économie toulousaine, résume l’affaire de Sérigny-Molex, avec l’obligé point d’interrogation : « le cabinet d’Eric Woerth est-il intervenu pour faire pression et entériner le licenciement des représentants syndicaux ? ». La réponse est comme usuel la même : circulez, rentrez chez vous, ne battez pas le trottoir.

Philippe Alexandre, dans Le Bien Public, est plus affirmatif. « Le problème Éric Woerth n’est pas seulement psychologique ou neurovégétatif : il est politique. Le gouvernement part au combat contre les syndicats, contre l’opposition, contre l’immense majorité des salariés (70 % des Français selon un sondage Louis Harris) avec un porte-drapeau qui apparaît comme “l’homme des riches” ». Bon, que le pourcentage de Françaises ou de Français soit de 60, 70, voire 80 % désormais, selon certaines autres consultations, ne change rien au fond du problème Woerth, Sarkozy, Dord, Juppé, Raffarin, UMP et satellites. De toute façon, confie Benoît Hamon aux Échos, pour les retraites, « le dossier a d’ores et déjà été dépaysé à l’Élysée pour finir sur le bureau de Raymond Soubie. ».

 

En fait, plus Woerth perdure, plus Sarkozy s’use, et le Parti socialiste et toute l’opposition ne peuvent que s’en réjouir sous cape. Le passage en force de la réforme des retraites, cosmétiquement aménagée par un Sarkozy qui s’empressera de faire de belles phrases dans une étrange lucarne, vaudra au « voyou de la République » une déclaration de guerre larvée, sourde, durable, mais, comme pour ses propres déclarations sur la délinquance ou la criminalité, le « jeu » est quasiment joué. Le déni de Guéant (qui affirme que Sarkozy n’est pas le « président des riches ») n’abuse plus personne.

 

Les militantes et militants de l’UMP, combien de divisions (dans tous les sens du terme) ? Rien n’est intangible, même plus l’inamovible, hier (retrouver toutes les déclarations de Sarközy ou de la majorité sur ce point serait fastidieux), bouclier fiscal. Il est à présent question de l’« aménager ». Idem pour les Rroms. André Vingt-Trois sera reçu à l’Élysée, et une photo souriante en compagnie de son locataire, n’est certes pas à exclure. Mais on remarquera que certains ténors de la majorité songent déjà à se recaser : ainsi, Brice Hortefeux tenterait de se faire refiler la mairie de Vichy par Claude Malhuret. Ce dernier ne siège pas déjà au Conseil économique et social, mais on lui trouvera peut-être, s’il s’exécute, un coin pour méditer sur les vices de la vertu ou la fin de la droite morale. Une mairie de ville moyenne est bien plus sûre qu’un siège de député, voire même de sénateur.

 

Un qui a été plus finaud, c’est Hubert Monzat, proche de Woerth, qui a su se faire admettre à la direction de France Galop dès qu’il eut senti, bien avant tant d’autres, quelques fumets dans la brise. S’applique-t-il les 35 heures, au moins de représentation et de présence sur les hippodromes, celui de Compiègne par exemple ? Ou en compagnie de Xavier Bertrand, qui a maladroitement tenté ces derniers jours d’en faire reparler ?

 

L’Alsace-Le Pays se moque gentiment du quarteron des « mousquetaires félons ». Il s’agit de Copé, Christian Jacob, Baroin et Bruno Le Maire, qui proposent un « contrat de gouvernement ». Selon le quotidien d’Alsace et de Franche-Comté, à la direction de l’UMP, on ironise : « ils se prennent pour les mousquetaires mais en fait, ce sont les Dalton ». Les « voyous de l’UMP », en quelque sorte. Le Quotidien de la Réunion (en fait, l’AFP) préfère évoquer Devedjian qui s’était gaussé de Xavier Bertrand. L’UMP, c’est comme les lentilles, trop échauffée, elle se délite. Pour Olivier Picard, des DNA, sous le titre emprunté à un autre ami de Sarkozy (« Allumer le feu ? »), « l’UMP avait parié sur l’été pour étouffer la polémique Woerth, ou au moins réduire sa charge nocive. C’est exactement le contraire qui se produit. ».

 

Woerth est sans doute plus agité du bocal que neurovégétatif. Il soit se demander sur qui va s’arrêter la boule du « Casino Bettencourt » de France-Soir. C’est une infographie intéressante sur laquelle figure une case vide. Vous y mettez qui vous voulez : Proto, de Sérigny, Anne Amiel, Robert Peugeot, Antoine Gilibert… Pour sa part, Le Courrier Picard a renoncé à conserver sur la page d’accueil de son site sa consultation « Woerth doit-il démissionner ? » (réponses : oui pour 82 % des répondants) au profit d’une infographie chronologique. Son dessinateur, Alex, fait dire à Liliane Bettencourt « Non, Bitencourt », sur une illustration la représentant devant un phallus en or. C’est un peu court, jeune homme, d’autant que la t finale est superflue. Xinhua (Chine Nouvelle) s’en tient au factuel des propos de Guéant, préférant mettre en avant la démission de Jenny (une Internaute désormais célèbre « à la Warhol »), et « une figure du PS francophone » (en fait le Belge Elio Di Rupo), qui « propose de se préparer à la fin de la Belgique ».

 

Pour la fin de la Belgique, c’est peut-être prématuré, pour la fin des fonctions gouvernementales d’Éric Woerth, finalement, peut-être de même. Ministre délégué au rattachement de la Wallonie-Bruxelles à la France, cela lui irait comme un gant : un bon moyen d’être reçu plus souvent chez Albert Frère. Tiens, au fait, ce serait une bonne idée : un procureur belge, de Charleroi, s’est associé à la plainte de Jean-Marie Kuhn qui soupçonne la Caisse des dépôts (la nôtre) d’avoir racheté à l’ami de Sarkozy la chaîne des restaurants Quick à un prix largement surévalué. Le procureur Courroye pourrait peut-être ainsi être saisi de l’affaire ? Pourquoi ne pas la délocaliser à Nanterre ?

 

Un nom pour un futur département français outre-quiévrain ? Pourquoi pas les Bouffes du Nord ? Aimery Langlois-Meurine s’est intéressé au théâtre homonyme et un peu de publicité ferait bien son affaire. Ou l’Entremont (le fromager appartient à Uniferm, d’Albert Frère). Pour ce genre de transactions, on pourrait penser que la majorité soit unie et ferme, derrière Éric Woerth, le ministre préféré des très riches. Il ne serait plus au Travail, mais il lui resterait bien des fromages sur la planche. Et pour Sarkozy et ses ministres, n’est-ce pas l’essentiel ? Les Françaises et les Français le pensent, et les Belges tout autant. Chez eux, c’était le Gordel (festif encerclement de Bruxelles par les Flamands, 80 400 participants, 12 000 de mieux que l’an dernier). Dans la rue, mardi, à Paris, les Françaises et les Français devraient faire mieux. Le « Palais », celui d’Albert II, a peut-être entendu ses sujets. Celui de l’Élysée reste sourd, mais consentira peut-être à agrémenter la réforme des retraites de quelques Babybel ou Cheez Dippers ou Apéricubes…