J’aime bien me balader dans les cimetières… (Ah, j’entends tout de suite vos soupirs, style « encore un barjot… »). Non pas à la manière d’un Pickman des temps présent, la nuit, à la recherche d’une goule comme modèle à peindre. Non, je les aime inondés d’un chaud soleil d’été, embaumant l’air du parfum des cyprès et assourdissant du chant des cigales. Cet été, je me suis surpris à trouver autant de plaisir en ces lieux qu’en bord de plage. Vous me direz, l’analogie entre ces 2 endroits est que l’on y trouve une multitude de corps allongés et immobiles !!

Je ne sais pas d’où c’est venu, en tout cas, pour ma part, ça n’est pas un lieu funeste à fuir absolument. Non, c’est une partie de la vie. Comme la clinique d’accouchement dans laquelle on nait. C’est simplement les deux bouts de la courte chandelle que l’on appelle l’ l’existence.

Cet attrait est peut-être à mettre en relation avec l’infarctus qui m’a terrassé, il y a deux ans. Ça a été moins une ce jour-là que j’aille rejoindre ma dernière demeure prématurément. Où peut-être aussi cette impression étrange et marquante qui m’avait envahie, jeune, à la visite de ce cimetière militaire allemand à Cassino. Etrange contraste entre la paix des lieux et la tristesse ressentie à la vue du jeune âge de la plupart des soldats enterrés là.

A côté des sépultures sobres, on trouve là (et oui ! encore…) la dernière trace de mégalomanie qui habite certains hommes, dans le désir de se construire des mausolées. Certes, aussi grand soit le tombeau, ça n’est tout de même pas une maison !! Mais bon, pour l’activité qu’on y a, pas besoin de trop d’espace. Ce qui est fascinant, c’est qu’un cimetière est organisé comme un quartier, avec des rues qui se croisent, tracées au cordeau, les demeures bien rangées tout du long. Impression que l’on n’a pas dans les cimetières anglo-saxons où les tombes semblent plantées au hasard, perdues dans un gazon verdoyant.

C’est un endroit propice à la réflexion sur le temps qui passe, les choses réellement importantes et les futilités de l’existence. Paradoxalement, c’est aujourd’hui un des rares endroits calmes, avec les parcs peut-être, de nos villes. Les bruits, même s’ils si trouvent un chemin, parviennent tout de même curieusement assourdis. Un peu comme si, eux aussi, hésitaient à troubler la tranquillité de ces lieux.

Les cultures appréhendent ces lieux de manières très diverses. Certains cimetières sont rejetés loin des centres urbains, comme si la mort, taboue, ne devait pas croiser le chemin des vivants, d’autres sont de véritables parcs où les gens viennent piqueniquer tout en honorant leur défunt, comme en Norvège. J’ai même ouï-dire, mais c’est hélas plus un effet de la pauvreté qu’autre chose, qu’au Caire et au Cambodge, des familles avaient élues domicile en ces lieux.

En tout cas, ce que je peux vous dire, c’est que pour ma part, quand j’ai l’esprit envahi par les contradictions du monde moderne, une promenade en ces lieux sereins à un effet apaisant sur mon mental et remet mes idées au clair.

Allez tiens, je vous le conseille !!