Une thèse blasphématoire

 Il n’est pas rare que des vérités historiques soient remises en cause, à l’image des rumeurs à propos du premier pas sur la Lune. Ici, rien de très astral mais plutôt religieux. L’Eglise dans sa grande mansuétude en a brûlé pour moins que cela, les lignes qui vont suivre risque de heurter la sensibilité des plus dévots d’entre nous, par mesure de sécurité j’informe les calotins, les grenouilles de bénitiers et les sacristains qu’ils peuvent détacher leurs yeux de cette page. La mort du Christ serait-elle une mascarade ? Un canular d’ampleur historique et civilisateur ? Des sociétés entières avec leur mode de penser et de fonctionner se sont-elles construites sur un mensonge, ou du moins une usurpation d’identité ? Le vrai Jésus ne serait pas mort en croix sur le mont Golgotha, le 7 avril 30 mais, belle et bien au Japon des décennies plus tard. 


Cette légende urbaine raconte que Jésus Christ serait venu au Japon à l’âge de 21 ans afin d’assouvir sa soif de connaissances théologiques. Cette période concorderait au moment du Nouveau Testament où le Christ s’absente et nul ne sait où il se trouve. Après un très long voyage, il aurait posé ses sandales dans la province d’Etchu, à Amanohashidade, au nord du pays, une région où le climat hivernal tranche avec celui de la Terre Sainte et où l’autorité de l’empereur Suinin était contestée par les peuples Aïnous. Dès lors, Jésus migre vers le sud pour s’installer un temps sur les flancs du mont Fuji, l’emblème de zénitude. Là, il devient le disciple d’un maître qui lui transmet tout son savoir dans le but d’atteindre la béatitude suprême. 


Une fois sa quête existentielle accomplie, il serait revenu en Judée à l’âge de 33 ans, la suite on la connaît. Condamné à mort par Ponce Pilate, son châtiment est la crucifixion. La légende prend le pas sur la tradition, elle précise que ce serait le frère de Jésus, un certain Suriki, qui lui aurait subtilisé sa place, se sacrifiant pour qu’il puisse vivre. Avant de repartir vers le pays du Soleil Levant, Jésus aurait emporté deux souvenirs avec lui, une oreille de son frère et une mèche de cheveux de Marie. On ne connaît pas bien l’itinéraire précis de sa route de retour, mais elle l’aurait fait passer par la Sibérie, traverser le détroit de Béring et mettre le pied en Alaska avant de rebrousser chemin pour terminer sa route au Japon, à Hérai, aujourd’hui connu sous le nom de Shingo, dans la préfecture d’Aomori. Du blasphémateur en Terre Sainte, il se serait reconverti en agriculteur cultivant l’ail. Il aurait pris une locale, prénommée Miyuko, comme épouse, aurait eu des enfants et serait mort à l’âge de 107 ans, voire 118. 

 

D’où vient cette légende ? Elle s’appuie sur d’anciens textes retrouvés en 1935-36, dans la bibliothèque familiale d’un certain prêtre shintoïste, Kyomaro Takeuchi. Les écrits retranscriraient les dernières volontés du Christ. Une telle découverte méritait qu’elle soit placée en sécurité, ainsi les documents ont alors placé à Tokyo, au Musée de la ville. Cependant la guerre éclata avec son lot de désolations, un grand incendie les réduisit en cendres. Mais la famille Takeuchi, bien maligne, en aurait fait des copies, des reproductions qui sont toujours vendues aujourd’hui pour un somme modique, une centaine de yens, sous le titre de : la vie du DaitenkuTaro Jurai

 

On y apprend que Jésus aurait eu une descendance et la famille Sawaguchi en serait de lignée directe. Le symbole de cette famille ressemblerait étrangement au sceau de Salomon. En outre, les héritages du Christ seraient bien plus importants dans la région. Tous les ans, lors de la fête de Kirisuto Mitsuri, se déroulant en juin, les chants entonnés par les fidèles auraient des consonances proches du hébreux parlé d’il y a 2000 ans, les années auraient eu pour effet d’altérer les sonorités. Idem concernant le costume traditionnel du village. La coutume voulant qu’une croix soit dessinée, avec de la cendre, sur le front des nouveaux nés, pour leur porter bonne chance dans la vie, serait un hommage au Christ. 

 

Tout cela semble étrange, ce n’est pas pour rien qu’il s’agisse d’une légende urbaine bourrée d’invraisemblances. Tout premièrement, dans la date d’apparition de la légende, 1935-1936, au moment même où le maire du village cherche une idée pour faire venir les touristes. Deuxièmement, la tombe où viennent se recueillir des milliers de curieux ne serait apparue qu’en 1935. Troisièmement, il suffit de sonder la personnalité du prêtre Takeuchi car le religieux est connu pour avoir crée une secte et prétendrait détenir un livre racontant ce que se passait il y a 317 milliards d’années, de ce fait tout le crédit que l’on peut lui accordé chute plus rapidement que le cours d’une action à la bourse. Malgré tous ces mensonges, des milliers de produits dérivés, crayons, tasses, reproductions du testaments ou encore des glaces à l’ail, se vendent chaque année et permettent à la ville de voir ses caisses se remplir. Religion et argent ont toujours fait bon ménage. 

2 réflexions sur « Une thèse blasphématoire »

  1. Un bouquin qui raconte ce qui se passait il y a 317 milliards d’années ?
    En -316.999.997.987, quoi ?
    Quel mois, exactement ?
    Si c’est en mai, on y raconte peut-être mon premier mariage…
    ;D

  2. Ceux qui ont rencontré Jésus dans leur vie
    savent bien qui Il est.
    Tout le reste n’est qu’un crachat satanique…
    si vous aimez ça , libre à vous .
    chacun est libre !

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