Elle s'appelle Rania Ibrahim. Cette femme-enfant, à peine âgée de 15 ans, croupit actuellement dans une prison de Bagdad, dans l'attente de son procès. Son crime? Avoir refusé de devenir la 31ème femme irakienne kamikaze de l'année. Voici son histoire.

Née à Bakouba, à 50 km au Nord de Bagdad, Rania ne connaît que la misère et le spectacle de conflits armés, auxquels elle assiste impuissante. C'est cette pauvreté qui, rapidement, incitera ses parents à la marier avec un adolescent de 20 ans, Hamid, ex-logisticien pour Al-Quaïda. Cette union avec le diable va définitivement bouleverser la vie de Rania.

Qualifiée de crédule et simple d'esprit par son entourage, la jeune fille est une proie rêvée pour l'organisation terroriste, en perte de souffle. Son époux n'a guère de difficultés à l'endoctriner : dès le premier jour de leur union, il guide peu à peu Rania sur le chemin de la mort. "Chaque soir, il lui parlait du jour du jugement dernier. Il lui expliquait les opérations des martyrs. Il lui certifiait que le paradis leur été offert pour avoir donné leur âme à l'Islam", déclare un journaliste, autorisé à rendre visite à la détenue irakienne. Ce dernier ajoute : " Son conjoint lui faisait la promesse d'un jardin luxuriant, une fois au ciel, rempli d'amour éternel et d'elixirs de toute sorte. Rania l'a cru sur parole, elle était désormais mûre au sacrifice".

Le 24 août, la cousine d'Hamid prend le relai afin, d'apporter la touche finale au travail psychologique entrepris jusqu'à présent. Elle charge l'adolescente de vingt kilos d'explosifs, dissimulés sous sa longue robe noire. Avant de la lâcher sur le marché bondé de Bakouba, la complice terroriste lui murmure un "Rien ne t'arriveras, tu verras des fleurs au moment de déclencher le détonateur" et lui fait boire du jus d'orange pour la calmer (il s'agit bien entendu de drogue).

Sauf que rien ne s'est passé comme prévu. Déambulant dans les allées du marché, Rania, complètement paumée, panique et hésite à actionner la ceinture d'explosifs. Son comportement confus intriguent les hommes de la milice d'Al-Shawa, qui ne tardent pas à l'arrêter et désarmorcer la bombe. 

En refusant d'accomplir sa mission jusqu'au bout, Rania a sauvé non seulement, sa vie mais surtout, celle de centaines d'innocents. Depuis l'intervention américaine en 2003, l'Irak est habitué à ces bains de sang, souvent perpétrés par des femmes, passant davantage inaperçues dans les rues.

Malgré tout, la rédemption de Rania ne fait pas l'unanimité dans un pays, où beaucoup souhaiterait la voir condamnée à mort pour tentative d'acte terroriste. On en oublierait presque ceux qui en sont à l'origine, à savoir Hamid et sa cousine, qui bizarrement sont introuvables depuis l'arrestation.

Alors, selon vous, Rania est-elle coupable d'un acte terroriste ou simplement, innocente, pour avoir été pervertie à des fins qui ne servent en rien l'Islam?