Il est courant de se faire tatouer le corps, certains en sont tellement accros qu’il ne reste plus aucune parcelle de peau non recouverte de dessins. Ces illustrations peuvent avoir maintes interprétations, aussi bien personnelles que communautaires. Il peut susciter la fascination, être un signe extérieur de richesse, de puissance ou encore un petit plus coquin que l’on dévoile à l’être aimé. Un tatouage est une marque qui nous suit tout au long de notre vie, il est donc judicieux de le choisir à tête reposée. En Israël, les jeunes sont épris d’une drôle de mode.
Ils accourent chez leur tatoueur pour se faire encrer dans la chair le numéro de détenu de leur grands-parents incarcérés dans les camps de concentration mis en place par le régime nazi durant la Seconde Guerre Mondiale. L’Histoire se déroule-t-elle de façon cyclique ? Revit-on les évènements du passé? Beaucoup de peuples et de penseurs l’ont imaginé, il semblerait que ce soit le cas. Geste inconvenant ou devoir de mémoire alors que les derniers témoins de ce massacre se font de plus en plus rare? Ils sont encore 198.000 aujourd’hui mais ils ne seront plus que 24.000 d’ici 12 ans. Une chose est sure, l’affaire fait couler beaucoup d’encre.
Sur l’avant bras, ils arborent les mêmes chiffres qui étaient apposés de force par les officiers allemands, transformant des êtres humains, définis par un nom et un prénom, en de vulgaires matricules tel du bétail. Cette démarche est expressément provocatrice dans cette région du monde où l’antisémitisme se renforce après les frasques géopolitiques de l’état hébreux. Outre les jeunes, la tendance touche aussi les autres membres de la famille, les oncles, les tantes, les cousins, les parents, s’y mettent. Ils agissent pour que l’on se souvienne toujours de la douleur de la Soah, une nécessité pour qu’une telle atrocité ne se reproduise plus. Une tâche utile tellement le nom d’Adolf Hitler et de ses exactions sont rangés dans les pages des livres d’Histoire et ne sont plus présents dans l’esprit des plus jeunes.
Mais voilà, le problème est double. Tout d’abord, d’un point de vue religieux, la Torah interdit toute modification irréversible du corps, or le tatouage en fait partie. Ensuite, d’un point de vue psychologique, le fait de porter le témoignage d’une histoire que l’on a pas vécue, devenir une victime d’un crime que l’on n’a pas subi, s’approprier l’identité d’un ancêtre qui a souffert, peut être perturbant à concevoir. Certes le mouvement part d’une bonne intention d’un point de vue historique mais attention aux dérives. L’une d’entre elles serait de renforcer un communautarisme malsain et de porter un coup fatal à l’intégration des personnes ne revêtant pas ces numéros et de mettre à mal la tolérance. Nous passons alors d’un extrême à l’autre, celui de l’après guerre où de nombreux juifs ont caché leur vraie religion à celui actuelle, où on exhibe les origines à tel point que l’on risque de s’exclure délibérément de la masse.
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