Cette année n’aura pas été de tout repos pour le Premier ministre Recep Tayyip Erdogan lequel s’est  trouvé maintes fois soumis à rudes épreuves. Après avoir peiné pour enrayer le soulèvement consécutif au projet controversé de remplacement de parc par un pharaonique centre commercial sur la Place Taksim, voilà que le sultan se trouve éclaboussé par un scandale politico-financier d‘une ampleur inédite.

Ces dernières heures ont été marquées par des vagues d’arrestations successives touchant des personnalités issues des hautes sphères. On compte, en vrac, parmi les nombreux gardés à vue, les fils des ministres, de l‘Intérieur, de l‘économie, de l‘environnement, le directeur de la banque Halkbank, des hommes d’affaires, des promoteurs immobiliers, le maire d‘un quartier d‘Istanbul.

Certains d’entre eux ont fini aujourd’hui derrière les verrous, notamment des fils à papa ministre (Economie et Intérieur). Des histoires de fraudes, de bakhchich, de blanchiment d‘argent, de corruption seraient à l‘origine de ce  ramdam qui secoue la Turquie. 

Menée sous l’égide du procureur d’Istanbul, un proche de l’imam Fethullah Gülen, cette opération de démantèlement de grande envergure met KO le gouvernement AKP. Derrière cette rafle, il y’aurait justement ce fameux prédicateur Fethullah Gülen, ancien ami et inspirateur de Recep Tayyep Erdogan, entre qui les choses se seraient gâtées : la suppression des écoles privées sous tutelle Gülénienne destinées à la préparation de l’admission d’étudiants aux universités n’étant pas du goût de l’imam, ce dernier, entré en dissidence, aurait planifié cette dénonciation. 

L’implantation de ses propres agents au sein même de la Justice et de la Police turque, aurait permis à Fethullah Gülen de téléguider, des Etats-Unis où il réside, le « complot » en question, l’indépendance de la Justice turque étant loin d’être acquise. 

Recep Tayyip Erdogan crie haro sur la conspiration montée de toutes pièces par ses détracteurs pour mettre à mal son gouvernement. Sur la défensive, le chef du gouvernement s’est lancé dans une vaste entreprise d’assainissement des rouages de la machine gouvernementale : des fonctionnaires accusés de collusion avec les conspirationnistes ont été démis de leurs fonctions, au premier rang desquels le chef de la police. 

Un coup dur pour ce gouvernement islamo-conservateur qui se veut exemplaire et qui n’a eu de cesse d’allonger la liste des prohibitions au nom d‘une soi-disant éthique pendant que nombreux de ses membres étaient obnubilés par le seul souci de leur enrichissement personnel et de surcroît illicite. Désormais on comprend un peu mieux la hargne avec laquelle le Premier ministre Erdogan avait défendu le projet de la Place Taksim, les enjeux étant de taille! 

Un chef  toujours prompt à empiéter sur les libertés individuelles de ses concitoyens, à déstabiliser ses voisins, même malades, sous l’immuable prétexte de faire œuvre de salubrité publique. En revanche oser dénoncer son gouvernement infesté, preuves à l’appui, est un crime de lèse majesté ! Tous les effets de manche auxquels on pourrait s’attendre ne parviendront sans doute pas à faire passer cette purge pour un complot du type Ergenekon…