Alors que des soldats israéliens ont affirmé avoir été témoins de « crimes de guerre » durant l’offensive menée contre le Hamas dans la bande de Gaza, les demandes d’enquêtes indépendantes continuent d’affluer de toute part. Un point sur la situation, deux mois après la fin des combats dans le territoire palestinien.

Les soldats israéliens de l’Académie militaire d’Yitzhak Rabin ont jeté de l’huile sur le feu des accusations contre Tsahal. Dans la lettre d’information de l’académie militaire en question, ils font état de bavures commises par certains de leurs collègues qui auraient, pendant l’offensive israélienne dans la bande de Gaza, tué des civils palestiniens sans défense et ne présentant aucune menace. Des exactions auxquelles ils affirment avoir assisté.

Parmi ces témoignages qui ont été repris ce jeudi par le quotidien Haaretz, figure le cas d’une mère palestinienne tuée avec ses deux enfants par un tireur d’élite israélien parce qu’elle s’était trompée de chemin en sortant de chez elle.    

Dans un autre cas, une vieille femme palestinienne a été tuée alors qu’elle marchait à 100 mètres de sa maison. D’autres témoignages font également état d’exactions, d’actes de vandalisme et de destructions dans des maisons.

Aussitôt, des organisations israéliennes de défense des droits de l’Homme ont réclamé vendredi une « enquête indépendante » sur les « crimes de guerre » de l’armée israélienne à Gaza. L’armée, qui avait indiqué dans un premier temps ne pas être au courant des faits rapportés, a par la suite informé que deux enquêtes seraient ouvertes, en interne.

Un collectif d’une dizaine d’associations estime que cette décision est trop tardive, et qu’elle n’est par ailleurs pas objective. Dans une lettre adressée au procureur général de l’Etat Menahem Mazouz, elles affirment que « le refus du gouvernement d’établir une commission d’enquête indépendante constitue une violation des responsabilités israéliennes au regard de la loi internationale« .

Demandes d’enquêtes en masse

La polémique enflait déjà depuis plusieurs mois. Dès janvier, plusieurs demandes d’enquêtes ont été déposées, la plus récente datant du 16 mars dernier. Un groupe de juges et de procureurs a en effet appelé ce lundi à une enquête internationale sur les « violations » des droits de l’homme commises lors de l’offensive israélienne dans la bande de Gaza. 

Dans une lettre ouverte soutenue par l’organisation des droits de l’homme Amnesty International, ces experts – dont Richard Goldstone, ancien procureur général des Tribunaux pénaux internationaux pour le Rwanda et pour l’ex-Yougoslavie, et Antonio Cassese, qui fut le premier président du Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie – exigent une enquête en profondeur de l’ONU sur « toutes les violations graves du droit humanitaire international commises par toutes les parties du conflit ».

Les autorités iraniennes ont pour leur part demandé le 10 mars dernier à Interpol la délivrance de 25 « avis de recherche internationale en vue d’extradition », baptisés « notices rouges », à l’encontre de dirigeants israéliens en lien avec l’offensive à Gaza. Le 1er mars, le procureur général d’Iran, Ghorbanali Dori-Najafabadi, avait accusé les principaux dirigeants israéliens de « crimes de guerre » à Gaza, réclamant l’aide d’Interpol dans l’optique de poursuites.

Depuis le mois de janvier, la CPI a reçu 213 demandes d’enquêtes sur ces faits. Le 8 mars, le procureur de la Cour Pénale Internationale (CPI) Luis Moreno Ocampo envisageait de son côté de diligenter une enquête, mais expliquait qu’il se trouvait encore dans « une phase d’analyse ». Bien qu’Israël ne figure pas parmi les pays signataires du Traité de Rome, à l’origine de la création de cette cour, le procureur envisageait de créer un précédent et de se baser sur le fait que l’Autorité Palestinienne, plaignante dans cette affaire, pouvait se constituer comme « Etat » et prouver que des crimes avait été commis sur son territoire.

Mi-février, l’Audience nationale espagnole avait accepté de prendre en charge le cas d’une plainte criminelle contre sept Israéliens pour crime de guerre. La loi espagnole, juridiction universelle,  permet de poursuivre des étrangers pour des crimes tels que le génocide, les crimes contre l’humanité et les actes de torture perpétrés n’importe où dans le monde.

Le 26 janvier, les représentants permanents de la Ligue Arabe au Caire lançaient un appel à l’attention de l’Assemblée Générale des Nations Unies, pour « former une commission internationale d’enquête sur les crimes israéliens dans la Bande de Gaza et pour instaurer un tribunal pénal afin de juger les criminels de guerre israéliens.  » 

Quels « crimes de guerre »?

Sont particulièrement visés: l’usage d’obus au phosphore blanc, un produit chimique controversé, tirés au cours de l’offensive dans des zones de Gaza densément peuplées, le bombardement de bâtiments des Nations unies dont une école transformée en camp de réfugiés, ainsi que les tactiques militaires employées par Tsahal dont certaines violeraient le droit international prêtent à interrogation, selon les plaignants.

A plusieurs reprises, l’armée aurait aussi empêché des ambulanciers de récupérer des blessés. Des témoins racontent même des incidents où l’armée aurait tiré sur des ambulances. Selon des sources palestiniennes, 13 ambulanciers auraient ainsi été tués dans l’exercice de leurs fonctions.

Par ailleurs, la presse a déjà fait état de plusieurs bavures qu’aurait commises Tsahal, notamment le massacre d’une famille à Zeitoun ou encore les tirs dirigés contre le « Bateau de la Fraternité « , un navire affrété par le Comité de secours libanais vers Gaza et chargé de poches de sang, de médicaments et de vivres.

L’offensive de l’armée israélienne contre le Hamas dans la bande de Gaza, baptisée « Plomb Durci », a fait plus de 1300 morts et 5000 blessés palestiniens, selon un bilan des services médicaux palestiniens. Parmi les morts figurent 437 enfants âgés de moins de 16 ans, 110 femmes et 123 personnes âgées, ainsi que 14 médecins et quatre journalistes. Côté israélien, dix militaires et trois civils ont été tués, selon les chiffres officiels.

Israël dénonce l’hypocrisie

Israël, mis en cause sur la scène internationale pour des « crimes de guerre », récuse à ses accusateurs le droit de lui donner des leçons de morale. Les responsables incriminés et les dirigeants accusent le monde d' »hypocrisie », affirmant que l’armée prend bien plus soin d’éviter des « victimes collatérales » que ne le font les forces des coalitions engagées en Afghanistan et en Irak ou jadis les Russes en Tchéchénie ou l’Otan contre la Serbie.

Par ailleurs, sur ce blog, un Israélien dénonce une tentative de salir l’image de Tsahal avec des « informations non-vérifiées« . Selon lui, certains des soldats qui ont témoigné reviendraient déjà sur leurs propos…

Lauranne Provenzano – L’EXPRESS – le 23/03/2009

Alors que des soldats israéliens ont affirmé avoir été témoins de « crimes de guerre » durant l’offensive menée contre le Hamas dans la bande de Gaza, les demandes d’enquêtes indépendantes continuent d’affluer de toute part. Un point sur la situation, deux mois après la fin des combats dans le territoire palestinien.

Les soldats israéliens de l’Académie militaire d’Yitzhak Rabin ont jeté de l’huile sur le feu des accusations contre Tsahal. Dans la lettre d’information de l’académie militaire en question, ils font état de bavures commises par certains de leurs collègues qui auraient, pendant l’offensive israélienne dans la bande de Gaza, tué des civils palestiniens sans défense et ne présentant aucune menace. Des exactions auxquelles ils affirment avoir assisté.

Parmi ces témoignages qui ont été repris ce jeudi par le quotidien Haaretz, figure le cas d’une mère palestinienne tuée avec ses deux enfants par un tireur d’élite israélien parce qu’elle s’était trompée de chemin en sortant de chez elle.    

Dans un autre cas, une vieille femme palestinienne a été tuée alors qu’elle marchait à 100 mètres de sa maison. D’autres témoignages font également état d’exactions, d’actes de vandalisme et de destructions dans des maisons.

Aussitôt, des organisations israéliennes de défense des droits de l’Homme ont réclamé vendredi une « enquête indépendante » sur les « crimes de guerre » de l’armée israélienne à Gaza. L’armée, qui avait indiqué dans un premier temps ne pas être au courant des faits rapportés, a par la suite informé que deux enquêtes seraient ouvertes, en interne.

Un collectif d’une dizaine d’associations estime que cette décision est trop tardive, et qu’elle n’est par ailleurs pas objective. Dans une lettre adressée au procureur général de l’Etat Menahem Mazouz, elles affirment que « le refus du gouvernement d’établir une commission d’enquête indépendante constitue une violation des responsabilités israéliennes au regard de la loi internationale« .

Demandes d’enquêtes en masse

La polémique enflait déjà depuis plusieurs mois. Dès janvier, plusieurs demandes d’enquêtes ont été déposées, la plus récente datant du 16 mars dernier. Un groupe de juges et de procureurs a en effet appelé ce lundi à une enquête internationale sur les « violations » des droits de l’homme commises lors de l’offensive israélienne dans la bande de Gaza. 

Dans une lettre ouverte soutenue par l’organisation des droits de l’homme Amnesty International, ces experts – dont Richard Goldstone, ancien procureur général des Tribunaux pénaux internationaux pour le Rwanda et pour l’ex-Yougoslavie, et Antonio Cassese, qui fut le premier président du Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie – exigent une enquête en profondeur de l’ONU sur « toutes les violations graves du droit humanitaire international commises par toutes les parties du conflit ».

Les autorités iraniennes ont pour leur part demandé le 10 mars dernier à Interpol la délivrance de 25 « avis de recherche internationale en vue d’extradition », baptisés « notices rouges », à l’encontre de dirigeants israéliens en lien avec l’offensive à Gaza. Le 1er mars, le procureur général d’Iran, Ghorbanali Dori-Najafabadi, avait accusé les principaux dirigeants israéliens de « crimes de guerre » à Gaza, réclamant l’aide d’Interpol dans l’optique de poursuites.

Depuis le mois de janvier, la CPI a reçu 213 demandes d’enquêtes sur ces faits. Le 8 mars, le procureur de la Cour Pénale Internationale (CPI) Luis Moreno Ocampo envisageait de son côté de diligenter une enquête, mais expliquait qu’il se trouvait encore dans « une phase d’analyse ». Bien qu’Israël ne figure pas parmi les pays signataires du Traité de Rome, à l’origine de la création de cette cour, le procureur envisageait de créer un précédent et de se baser sur le fait que l’Autorité Palestinienne, plaignante dans cette affaire, pouvait se constituer comme « Etat » et prouver que des crimes avait été commis sur son territoire.

Mi-février, l’Audience nationale espagnole avait accepté de prendre en charge le cas d’une plainte criminelle contre sept Israéliens pour crime de guerre. La loi espagnole, juridiction universelle,  permet de poursuivre des étrangers pour des crimes tels que le génocide, les crimes contre l’humanité et les actes de torture perpétrés n’importe où dans le monde.

Le 26 janvier, les représentants permanents de la Ligue Arabe au Caire lançaient un appel à l’attention de l’Assemblée Générale des Nations Unies, pour « former une commission internationale d’enquête sur les crimes israéliens dans la Bande de Gaza et pour instaurer un tribunal pénal afin de juger les criminels de guerre israéliens.  » 

Quels « crimes de guerre »?

Sont particulièrement visés: l’usage d’obus au phosphore blanc, un produit chimique controversé, tirés au cours de l’offensive dans des zones de Gaza densément peuplées, le bombardement de bâtiments des Nations unies dont une école transformée en camp de réfugiés, ainsi que les tactiques militaires employées par Tsahal dont certaines violeraient le droit international prêtent à interrogation, selon les plaignants.

A plusieurs reprises, l’armée aurait aussi empêché des ambulanciers de récupérer des blessés. Des témoins racontent même des incidents où l’armée aurait tiré sur des ambulances. Selon des sources palestiniennes, 13 ambulanciers auraient ainsi été tués dans l’exercice de leurs fonctions.

Par ailleurs, la presse a déjà fait état de plusieurs bavures qu’aurait commises Tsahal, notamment le massacre d’une famille à Zeitoun ou encore les tirs dirigés contre le « Bateau de la Fraternité « , un navire affrété par le Comité de secours libanais vers Gaza et chargé de poches de sang, de médicaments et de vivres.

L’offensive de l’armée israélienne contre le Hamas dans la bande de Gaza, baptisée « Plomb Durci », a fait plus de 1300 morts et 5000 blessés palestiniens, selon un bilan des services médicaux palestiniens. Parmi les morts figurent 437 enfants âgés de moins de 16 ans, 110 femmes et 123 personnes âgées, ainsi que 14 médecins et quatre journalistes. Côté israélien, dix militaires et trois civils ont été tués, selon les chiffres officiels.

Israël dénonce l’hypocrisie

Israël, mis en cause sur la scène internationale pour des « crimes de guerre », récuse à ses accusateurs le droit de lui donner des leçons de morale. Les responsables incriminés et les dirigeants accusent le monde d' »hypocrisie », affirmant que l’armée prend bien plus soin d’éviter des « victimes collatérales » que ne le font les forces des coalitions engagées en Afghanistan et en Irak ou jadis les Russes en Tchéchénie ou l’Otan contre la Serbie.

Par ailleurs, sur ce blog, un Israélien dénonce une tentative de salir l’image de Tsahal avec des « informations non-vérifiées« . Selon lui, certains des soldats qui ont témoigné reviendraient déjà sur leurs propos…

Lauranne Provenzano – L’EXPRESS – le 23/03/2009

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