Ce n’est pas nouveau. Déjà, en janvier 2009, pour fêter l’octogénaire Tintin d’Hergé, L’Osservatore Romano avait mis le personnage du petit reporter en une. Il vient de récidiver à l’occasion de la sortie du film de Spielberg…

 

Lorsque fut célébré les 80 ans de Tintin, L’Osservatore Romano avait salué déjà en lui un modèle de vie catholique. On ne sait trop vraiment pourquoi, le héros d’Hergé incarnant tout autant des valeurs laïques. C’était début 2009. Six mois plus tard, lorsque fut célébrée la première marche humaine sur la Lune, le quotidien officiel du Vatican rappelait que Neil Armstrong avait été précédé par Tintin, en 1954. Par la suite, un musée Hergé avait été implanté, sur 3 600 m², sur le domaine de l’université catholique de Louvain-la-Neuve.
Est-ce pour soutenir cet établissement que L’OR a consacré une double page à Tintin pour saluer la sortie du film de Spielberg ?
Certes, Tintin peut incarner, comme le relève L’Osservatore, l’idéal scout. Mais pourquoi pas celui des Éclaireurs de France (mouvement laïque) ?

En fait, Tintin, ou plutôt Hergé, avait sans doute éprouvé de la sympathie pour les Pères Blancs, les missionnaires figurant dans Tintin au Congo. Par ailleurs, son personnage s’en est rarement pris aux hommes d’églises ou ministres de cultes, si ce n’est de cultes païens. Dont acte.

Héros du catholicisme ? Mais pourquoi donc ? Et pourquoi pas de celui des coptes, par exemple ?

Hergé était certes un ancien élève de l’institut Saint-Boniface, mais se mettre à quatre journalistes pour établir que Tintin incarne « l’humanisme chrétien », c’est faire fort (ou s’amuser à retrouver ses vieux albums en enrobant la chose ad hoc).

 

Allez, vite, un titre pour Spielberg, dans l’Ordre suprême du Christ, de la Milice dorée, du Saint-Sépulcre et de l’éperon d’or, ou carrément la grande croix de l’Ordre de Saint-Grégoire-le-Grand. Comme le général Franco, par exemple, ou Mussolini, ou Kurt Waldheim (ancien nazi autrichien, mais de Gaulle fut aussi décoré par le Saint-Siège).

Hergé serait peut-être content d’un tel voisinage, pas sûr que Tintin, dont les relations avec le général Salazar étaient mouvementées, en serait si ravi. En tout cas, les tintinophiles acharnées voudront cet exemplaire de L’Osservatore. Jo, Zette, Jocko, Popol et Virginie sont aussi mentionnés par la gazette vaticane qui égratigne au passage Baden Powell (« fu anche razzista ed eugenista », soit raciste et eugéniste). L’Osservatore, 150 ans aux cerises, ce 9 novembre, a tourné la page Tintin, jusqu’à nouvel ordre, mais relève que « Paperino & Co. vanno su YouTube » (soit Donald Duck, de Walt Disney, et compagnie). Décidément, on est bédéphile, à Rome, place Saint-Pierre ou alentours.