Révolu le temps des sociétés verrouillées que l’on manipule en usant et abusant d’idéologies fallacieuses à l’effet anesthésiant, sacrifiant ainsi tant de vies sur l‘autel des intérêts des grands. Désormais les terriens particulièrement focalisés sur l’accès à leurs propres droits, à leur part de bonheur semblent mal tolérer tout échec. Un monde où règne l’appât du gain où les grands ne répugnant devant rien s’évertuent à coups d’innovations permanentes à sucer toujours plus le sang de cette planète aujourd’hui si meurtrie avant de devenir ce village où règne sans merci le chaos.
Tsunami, tremblement de terre, accident nucléaire, pollution sans précédent sévissent, guettent de manière indiscriminée un écosystème en péril. Il pleut des oiseaux morts. Des baleines en masse viennent s’échouer sur des rivages. Que de calamités dans cette planète aux habitants bizarres toujours en quête de conflit. Tous les ingrédients sont là pour nourrir Jeff Nichols pour la réalisation de son "film monde", take shelter qui bat au rythme de cette somptueuse planète en perdition.
Face à toutes ces manifestations apocalyptiques auxquelles se sont greffées de gigantesques crises économiques, le héros Curtis (Michael Shannon) plus démuni que jamais sombre implacablement dans les affres impitoyables de l’angoisse cédant aux sirènes de la peur. La peur de perdre sa femme Samantha (Jessica Chastain), si aimante, sa fillette encore plus fragile du fait de sa surdité, de son mutisme. Habité par ce sentiment si dévastateur, il bascule dans l’ivresse de la souffrance qui l’enferme dans un univers tissé d’hallucinations que peuplent des scènes macabres particulièrement troublantes.
Le ciel est toujours là d’un bleu magnifique que d’épais nuages menaçants imperturbables viennent immanquablement violer. Tonnerre, éclairs, orage, chorégraphie synchronisée d’étranges cohortes d’oiseaux noirs comme livrés à la danse de la mort, cadencent le film. Un paysage fascinant. La pluie d’une couleur jaune, laissant suinter ses gouttelettes de mauvaise augure vient compléter ce saisissant tableau.
Et lui, pétrifié, éperdu d’amour pour sa famille, se démène tout le long du film pour les mettre à l’abri de ce monde où le bonheur est juste éphémère. Mettre à l’abri, vouloir contrôler le destin, briser la part de déterminisme jusqu’à l’usure. Et toujours tiraillé entre un trouble abyssal venu de très loin, un présent sombre, un avenir des plus incertains, sans ressources face à cet abîme, il s’égare. Puis tout pêtri de détresse, il trébuche, puis retrébuche dans un univers en panne de communication, jusqu’à tomber peut-être définitivement dans une sorte de folie.
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Voilà un film bien mis en avant.
Portant je me pose une question. Pourquoi des films si négatifs?
En ces temps très difficiles, ne serait-il pas plus judicieux de faire des films pls gais?
Il suffit de constater le nombre d’entrée des « intouchables ».
Ceci dit l’histoire est belle.
Déjà merci Ludo !
A mon avis ce ne sont que des films qui incarnent tellement bien la peur d’une société qui dérive vers la paranoïa…
Pour faire des films faut peut-être puiser dans les données à portée de main qui ne sont pas très gaies en ce moment d’où le déficit des films drôles ??
Pour ma part même si j’ai trouvé pas mal « intouchables », je préfère take shelter. Il est d’une grande intensité…
[b]Je pense que tout tient dans l’état d’esprit dans lequel nous nous trouvons.[/b]
Tout à fait d’accord !
J’ajoute que composer du comique est très dur. La semaine prochaine, je devrai voir une pièce drôle et si elle en vaut la peine, j’essaierai de la partager.