Divorce sans consentement mutuel – l’éternel problème des parrainage

Divorce Sans Consentement Mutuel  Ou le Roman de trois gifles électorales annoncées

En guise de retour vers la case ‘'départ'', l'éternel problème des parrainage est de nouveau soulevé

 

 

 

Souvenons nous : lors des Présidentielles « 2002 », Jean-Marie Le Pen, à l'époque, Député européen, se prenant pour ‘'la'' victime ‘'expiatoire'' du système, montait au créneau en dénonçant le ‘'système des parrainages'' ! Pour Noël Mamère, s'exprimant devant des millions de téléspectateurs, mais également pour d'autres candidats, « il était ‘'anormal'' que Jean-Marie Le Pen fût absent de ce débat démocratique important ».

Quoiqu'il en soit, ce ‘'lamentable'' épisode aura été très profitable à Jean-Marie Le Pen, puisque, raflant 17,34 % des voix de manière à se retrouver seul en lice face le Président Jacques Chirac, il a éliminé Lionel Jospin[1] !

C'est dire si le Président du F.N. savait, à juste titre ( !), et sait toujours, ‘'émouvoir'' toute la classe politique et les médias sur son triste sort, tout en se demandant, jusqu'à la dernière minute si il pourrait se retrouver réellement dans la course vers le Palais présidentiel (?).

Deux ‘'victimes'' et non des moindres, se retrouvèrent définitivement exclues de cette course à l'investiture suprême :

– Charles Pasqua, ancien Ministre de l'Intérieur,  en dehors de la compétition,  

n'ayant pas obtenu le nombre de signatures  requises,

–  Nicolas Miguet, Président du Rassemblement des Contribuables Français,

écarté par le Conseil Constitutionnel, malgré le dépôt d'un recours auprès

des instances de notre Pays, persuadé qu'il était d' « avoir réellement obtenu

   ces 500 signatures en temps et en heure ».

Déjà, en ce mois d'avril 2002, certains ‘'semblaient'' ne pas savoir faire la différence entre ces deux mots : ‘'Parrainage'' et ‘'vote'' (!)

Voilà comme qui dirait une impression de « retour vers la case ‘'départ'' ». De quoi gâcher, voire ternir fortement (!), le bon déroulement de la Campagne des Présidentielles « 2007 » : cet éternel problème des parrainages se retrouve de nouveau soulevé ! Et, Jean-Marie Le Pen, comme toujours aux aguets (!), ne rate aucune occasion pour s'en prendre à cette loi !


[1]Lire ou relire dans cet ouvrage, le chapitre : « Rappelons-nous (in memoriam) : Les raisons, les causes et les conséquences d'un monumental désastre annoncé ».

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Pourtant, cette loi organique[1] stipule très clairement : «cette liste est préalablement établie par le Conseil Constitutionnel au vu des présentations qui lui sont adressées 18 jours avant le premier tour du scrutin, par au moins 500 citoyens membres du Parlement, des Conseils Régionaux, de l'Assemblée de Corse[2], des Conseils Généraux[3], du Conseil de Paris, des Assemblées territoriales des Territoires d'Outre-mer, Maires et Membres élus du Conseil des Français de l'Etranger »[4].

En un mot, et, à moins d'un vote d'une autre loi, personne ne peut changer les choses (!), elle définit à tout candidat à la Magistrature suprême l'art et la manière de s'en aller à la pêche aux grands électeurs[5]… Mais, il y a un bémol pour ces postulants : « ils doivent trouver ces 500 élus nationaux, régionaux, municipaux… originaires de 30 départements[6], au moins, ou des Territoires d'Outre-mer, sans que plus d'un dixième d'entre eux puisse être les élus du même département[7] ou du même Territoire d'Outre-mer ». Ce qui corse quelque peu l'affaire lorsqu'on sait que, lors du 1er8]Tour des Elections  Présidentielles "2002", 16 prétendants à la Magistrature Suprême se présentaient devant le suffrage des électeurs… 

Auparavant, il ne suffisait d'être parrainé que par 100 grands électeurs et présenter leur signature au Conseil Constitutionnel pour pouvoir valider sa candidature à la Présidence de la République… Ce qui, en soit, pouvait être considéré comme on ne peut plus, raisonnable… Quoi que (?!)

Comme pour durcir encore plus cette règle, dont on peut se demander si elle était déjà en soi quelque peu démocratique quant aux modalités mêmes de son application (?), voici qu'un homme, le Président Valéry Giscard d'Estaing, va la compliquer encore plus qu'elle ne l'était déjà : sous son impulsion, la Loi Organique n° 76-528 du 16 juin 1976 changera totalement la donne, puisque 500 signatures, au lieu de 100, étaient désormais requises[9] !


[1]Une  Loi Organique et une loi destinée à développer les principes posés par une loi constitutionnelle.

[2]Loi Organique n° 95-62 du 19 janvier 1995, Article 1er.

[3] Y compris les départements d'Outre-mer.

[4]Cf. Dominique Dutilloy in :

« Impressions », Chapitre 2 : « La mascarade des Parrainages » Editione Le Manuscrit (http://www.manuscrit.com/catalogue/auteur.asp), Paris 2004 

« Les Parrainages en question » [Article paru le 8 août 2006 sur « Agora Vox – Le Média citoyen (http://www.agoravox.fr/auteur.php3?id_auteur=3502)]

[5] Mais, ô comble de l'ironie, un grand électeur, lui, ne peut être le parrain que d'un seul candidat… C'est dire si, outre les ‘'éventuelles'' pressions que peut subir ce grand électeur lambda, son choix peut paraître quelque peu cornélien !

[6]Voir Note 159.

[7]Voir notes 159 et 162.

[8]Beaucoup de commentateurs politiques, qui considèrent que « 16 candidats, c'est beaucoup trop », pensent que ce nombre important de candidats a permis à Jean-Marie Le Pen de se retrouver au 2ème Tour des Présidentielles « 2002 ».

[9]Pour beaucoup d'observateurs, le Président Valéry Giscard d'Estaing, Coluche, qui se désista par la suite,  put se présenter  sans aucun problème aux Présidentielles « 1981 ». Un autre humoriste, Dieudonné aurait pu, lors du 1er Tour des Présidentielles « 2002 », maintenir sa candidature, « ayant obtenu », selon ses dires, « les 500 signatures requises ». Cependant, il préféra se désister bien avant le démarrage officiel de la Campagne des Présidentielles. aurait agi ainsi afin d'écarter des candidatures jugées trop ‘'farfelues''. Malgré tout

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A croire que beaucoup ne savaient pas à l'époque que parrainer un candidat ne signifie pas pour autant qu'on doive voter pour lui (!)

Alors, pour le Président du parti frontiste, « il faut que ça change (!) », d'autant qu'il estime que « la publication des noms des parrains par le Conseil Constitutionnel entraîne ‘'un véritable chantage politique, voire parfois, des menaces physiques sur les maires signataires'' »[1]… Présent au Congrès des Maires de France, le Président du Front National, reconnaissant « avoir ‘'trop'' peu de parrainages », demandait aux maires « d'avoir le courage d'assumer la responsabilité que leur a confiée la loi »[2]

Malheureusement, malgré cet appel relayé par Marine Le Pen et Bruno Gollnisch, également présents au Congrès des Maires de France, beaucoup ne semblent pas convaincus ! Ainsi, considérant qu' « un édile ne peut donc pas accorder signature à Jean-Marie le Pen sans courir le risque d'être perçu comme son sympathisant », Michèle Celarier-Descoeur, maire de Salers, allait jusqu'à estimer, ce, de manière très catégorique que « si on parraine quelqu'un pour la Présidentielle, c'est qu'on va voter pour lui »[3].

A l'inverse, d'autres édiles, pour la plupart, des maires ruraux, semblent quelque peu gênés aux entournures, comme s'ils avaient peur de semer la zizanie dans leurs communes… Maire d'un bourg de 2200 habitants situé dans l'Isère, Agnès Reboux répondit à qui voulait bien l'entendre pour rappeler le caractère ‘'apolitique'' de sa liste : « il y a autant de gens de droite que de gauche. Accorder mon parrainage à qui que ce soit serait source de tension »[4].

Dans leur démarche téléphonique auprès des maires, les militants du Front National ont très justement rappelé que le respect du pluralisme comptait… « Je trouverais scandaleux qu'un homme qui a obtenu plus de cinq millions et demi de voix en 2002 ne puisse pas être candidat à la prochaine élection présidentielle », s'insurgea un édile du Calvados, qui avait demandé l'anonymat. « Je ne veux pas connaître les mêmes problèmes que mon collègue dans le village voisin : en 2002, huit de ses conseiller municipaux ont démissionné après avoir lu dans la presse qu'il avait parrainé Le Pen », déplora-t-il en se confiant à Guillaume Perrault et Olivier Pognon[5].

C'est dire si pour beaucoup, le fait d'accorder son parrainage à quelqu'un peut s'avérer quelque peu dangereux, comme si il fallait vivre comme sous le coup d'une menace à ‘'peine voilée''.


[1]Cf. L'article de Guillaume Perrault et Olivier Pognon : « Interpellé hier par le président du FN,  le premier ministre refuse de rétablir l'anonymat des 500 signataires »,publié le 23 novembre 2006 sur le Portail internet du « Figaro »

(http://www.lefigaro.fr/election-presidentielle-2007/20061123.FIG000000214_parrainages_villepin_dit_non_a_le_pen.html)

[2]Ibid.

[3]Ibid.

[4]Ibid. 

[5]Ibid

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Comme quoi beaucoup de nos grands électeurs semblent vouloir toujours superbement ignorer que le terme ‘'parrainage'' n'est pas synonyme du mot ‘'vote'' (!)… Comme quoi ça les arrange bien quelque part (!)

 

Alors, pour Jean-Marie le Pen, il n'y avait qu'un seul moyen pour prendre ce problème des signatures à bras le corps : adresser une lettre à Dominique de Villepin, Premier Ministre, de « rétablir, par la voie parlementaire, l'anonymat des parrainages » … Ce qu'il fit !

Mais, le Premier Ministre ne l'entendit pas de cette oreille… Répondant, le 22 novembre 2006, au Président du Front national, il affirma publiquement au Congrès des Maires de France  « ne pas voir de raison, à quelques mois des échéances, de modifier les règles du jeu »[1]. « Cela conduira chacun à prendre ses responsabilités et reflétera, comme à chaque élection présidentielle, l'attention portée aux parrainages », tentait d'expliquer le Chef du Gouvernement aux Maires venus l'écouter ‘'presque'' religieusement[2].

Mais, comment peut-on juger de viabilité d'une bonne campagne présidentielle à travers l'attention portée aux parrainages ou la responsabilité prise par chaque candidat ?

La démarche de Jean-Marie Le Pen est tout à fait justifiée… Pour preuves, l'intervention de François Hollande, Premier Secrétaire du P.S., qui, cité par l'Associated Press (A.P.) dans une dépêche publiée sur le portail Internet du « Nouvel Observateur »[3], estimait : « L'élection présidentielle, c'est le choix du prochain Président de la République. Ce n'est pas un forum participatif ou une assemblée générale ». Ne voulant plus ‘'revivre'' la ‘'débâcle du 21 avril 2002'', il devait rappeler à ses troupes : « Quand on est élu socialiste, la moindre des cohérences est de donner sa signature au Candidat du P.S. »[4]. Cependant, tout en les rassurant sur l'absence éventuelle de sanctions, il a précisé que « chaque élu socialiste avait droit d'apporter son parrainage à un autre candidat »[5]. « Il y a l'annonce d'une candidature tous les mois, si ce n'est toutes les semaines. L'élection présidentielle, ce n'est pas un grand bazar, un grand barnum ou chacun vient débattre »[6], tançait-il, peut-être d'un ton méprisant (?),  pour justifier ses craintes.

Encore un qui n'a pas l'air d'avoir bien compris ce que signifient ces deux termes : ‘'parrainage'' et ‘'vote'' !


[1]Cf. L'article de Guillaume Perrault et Olivier Pognon : « Interpellé hier par le président du FN,  le premier ministre refuse de rétablir l'anonymat des 500 signataires »,publié le 23 novembre 2006 sur le Portail internet du « Figaro »

(http://www.lefigaro.fr/election-presidentielle-2007/20061123.FIG000000214_parrainages_villepin_dit_non_a_le_pen.html

[2]Ibid.

[3]http://archquo.nouvelobs.com/cgi/articles?ad=politique/20060805.OBS7458.html&host=http://permanent.nouvelobs.com/

[4]Ibid.

[5]Ibid.

[6]Ibid.

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Certes, cette Loi Organique n'est pas en soi si mauvaise… Cependant, comme l'ont fait si justement remarqué Jean-Marie Le Pen ainsi que d'autres candidats, c'est son application qui est mauvaise

Au-delà de la demande ‘'d'anonymat des signatures'' exigée par le Front National, il faudrait réellement changer tout le fondement même de ce texte législatif, ne serait-ce que pour instaurer plus de clarté dans le jeu démocratique ( !) Si, pour Ségolène Royal, Nicolas Sarkozy, François Bayrou, Marie-George Buffet, Philippe de Villiers…, il n'y aura aucun problème, est-il normal de voir des ‘'petits'' candidats, comme Hervé Mathiasin ou Franck Abed…, se rendre au Congrès de l'Association des Maires de France pour s'en aller à la chasse aux maires, sous le ‘'fallacieux'' prétexte qu'ils ne sont pas issus d'un grand courant politique ?

Alors, que faire ?

Les candidats ne devraient pas être contraints de s'en aller à la chasse aux signatures…

Dès réception des déclaration de candidature, le Conseil Constitutionnel ne devrait-il pas établir, pour chaque grand électeur, un formulaire unique sur lequel seraient inscrits les prénom et nom de chaque candidat, avec, éventuellement, la formation politique qui le soutient ?

Ne serait-il pas possible pour plus de clarté démocratique, une fois muni de ce formulaire, que le grand électeur puisse faire, dans le secret de son bureau, son choix en optant, grâce à une croix devant chaque nom, pour un ou plusieurs postulant(s), apte, selon lui, à se porter candidat à la Magistrature suprême ?

Ne serait-il pas possible que ce soit le grand électeur lui-même, qui, après avoir signé son formulaire de parrainage, puisse le renvoyer, par tout circuit officiel de son choix, au Conseil Constitutionnel 18 jours avant le début du scrutin ?

Ne devrait-il pas y avoir, pour chaque grand électeur, la garantie du secret de ses décisions prises et soumises au Conseil Constitutionnel ?

Ne serait-ce pas au Conseil Constitutionnel de faire, sur chaque candidat à l'élection présidentielle, le décompte des signatures obtenues dès réception des formulaires de parrainages ?

Le rôle de ce même Conseil Constitutionnel ne consisterait-il pas, 18 jours avant la date du scrutin, d'annoncer publiquement les noms de tous les candidats admis à faire acte de candidature après validation de leurs 500 parrainages ?

 

         Si elle était modifiée ainsi, la Loi Organique n° 88-35 du 13 mai 1988, permettra-t-elle à notre Patrie des Droits de l'Homme d'acquérir de nouvelles règles démocratiques en donnant à chaque candidat l'occasion et la possibilité

de  se consacrer pleinement à sa campagne au lieu de se retrouver en position de ‘'victime expiatoire''… C'est à souhaiter : en tous les cas, le Gouvernement et nos parlementaires devraient se pencher sur cette question avant de se retrouver face à « plusieurs divorces sans consentement mutuel » !