Espionnage : La chef de la diplomatie israélienne a débuté sa carrière comme tueuse

Avant de commencer sa carrière politique, Condoleezza Rice fut doyenne de l'Université de Stanford. Hillary Clinton étudia le droit à Harvard. Ségolène Royal occupa les bancs de l'ENA.

La kidon Tzpi Livni, elle, traversa toute l'Europe pour assassiner les ennemis d'Israël.



Etre citoyen israélien est déjà, en soi, un statut hors du commun, tant ce pays miraculeux a connu une histoire tourmentée.

 Pour Tzipi Livni, pressentie pour devenir le prochain premier ministre, cette nationalité s'ajoute à un parccours politique de météor, sans doute appuyé par sa première expérience professionnelle. Et pas n'importe où. Au sein de l'unité d'assassinat du Mossad. Pour la première fois hier, la politicienne a admis son passé d'espionne, sans pour autant donner de détails.

Depuis longtemps, plusieurs médias israéliens et britanniques ont levé un peu du secret qui entoure la jeunesse de première diplomate d'Israël. Il faut dire que Tzipi Livni est née dans le moule de la vie clandestine : ses parents étaient tous deux membres de l'Irgoun. Son père en était^le chef opérationnel et a connu les geôles anglaises. En effet, Livni senior fut l'homme qui organisa le célèbre attentat contre le QG britannique à l'Hôtel King David. Cet exploit décida l'opinion anglaise qu'un retrait du pays était nécessaire. Plus tard, le même Livni fut décisif dans la création du Likoud.

Bien décidée à reprendre le flambeau familial, la jeune Tzipi Livni  s'engagea dans Tsahal, où elle obtint le grade de lieutenant. Elle rejoignit ensuite le Mossad, les services secrets. Loin d'être une gratte-papier, la jeune femme fut envoyée sur le terrain. Pour commencer, en France.

On retrouve la trace de Tzipi Livni au début des années 80. Formée au centre de recrues de Tsimot Glilot, elle fut formée aux bases intellectuelles et physiques de son métier. Naturellement blonde, les yeux bleus, la jeune femme détonnait dans un univers sans pitié. Elle acquit rapidement les bases du métier : cacher un Beretta sous sa jupe, changer d'identité dans les toilettes des aéroports, coucher avec des étrangers dans le seul but de les kidnapper, assassiner un homme de sang-froid avec un rasoir, voler des documents dans un bureau administratif, poser des explosifs, relever les plaques minéralogiques de voitures entrant et sortant des ambassades ennemies… 

A l'époque de son entrée dans l'Institut, Israël était sur les dents. En effet, le régime de Saddam Hussein cherchait à se doter d'un réacteur nucléaire avec la bénédiction de la France. Le Premier ministre de l'époque, Menahim Beguin, dépêcha les services secrets israéliens pour mettre fin au partenariat irako-français. L'objectif des Israéliens était simple : si Chirac refusait de suspendre ses contrats avec l'Irak, le Mossad se chargerait d'intimider les savants français. A l'aide de lettres de menaces, les "corbeaux" de l'Institut opérant depuis l'ambassade israélienne de Paris semèrent la crainte aux quatre coins de la France. 

Parallèlement, le Mossad envoya ses tueurs sur la piste des techniciens atomistes "noirs", c'est-à-dire arabes. C'est là qu'entre en jeu Tzipi Livni. La jeune femme n'intégra pas seulement le renseignement israélien. Elle fut intégrée dans l'unité d'assassinat, l'unité d'élite de ce service, le Kidon . Selon une de ces amies, elle "était membre des commandos qui assassinaient les terroristes arabes en Europe". Comprenez : celle qui deviendra peut-être premier ministre d'Israël a fait ses premiers pas dans la vie professionnelle au sein de l'unité de tueurs la plus redoutée du monde.

La place exacte de Tzipi Livni au sein du Mossad n'est pas connue. Son expérience était, à l'époque, insuffisante pour briguer un poste hiérarchiquement élevé. Un de ces anciens collègues précise  toutefois : "ce n'était pas une recrue comme les autres. Elle avait un QI de 150 et évoluait sans problèmes au milieu des commandos israéliens, dont la plupart étaient d'anciens soldats d'élite, envoyés en Europe pour éliminer des terroristes arabes". La célébrité de son père lui a-t-elle ouvert des portes ? On croit savoir qu'elle occupait la fonction de responsable opérationnelle du Kidon en Europe.  En clair, c'est elle qui agissait lorsqu'Israël prononçait la sentence ultime à l'égard d'un ennemi de l'Etat. 

Francophone accomplie, la jeune kidon tint une planque sûre au coeur de la France pendant plusieurs mois. De là partaient les différents commandos. Tzipi Livni avait donc accès à la fameuse "liste" des noms à abattre, l'un des fichiers les plus secrets du pays, connu du seul service et du Premier Ministre. Sur ce document figurait le nom du savant atomiste Yahya el-Meshad, qui collaborait au programme nucléaire irakien. L'homme fut égorgé dans la nuit du 14 juin 1980 à l'hôtel Méridien, à Paris. Il avait été conduit là par une prostituée française payée par l'Institut. Celle-ci fut ultérieurement identifiée par la DST. Mais, le jour de son interrogatoire au Quai des Orfèvres, un commando du Mossad la retrouva et la poussa sous les roues d'une voiture avant qu'elle n'ait pu parler.

Quelques semaines avant la mort de Meshad, dans le Sud de la France, un commando israélien (le même ?) avait infiltré une usine nucléaire française qui vendait du matériel à l'Irak et l'avait fait sauter. Afin capter l'attention des gardes du site, une "jolie et blonde" agente israélienne, francophone, avait joué le rôle de l'automobiliste hystérique à quelques mètres du portail d'entrée.

Reste que la jeune planificatrice du Kidon avait un jolie réputation au sein du Mossad. Les observateurs croient reconnaître sa trace derrière la mort du scientifique irakien Abdoul Rasoul, empoisonné au cours d'un déjeuner à Paris. En 1983, son unité usa de l'arme légère pour éliminer Mamoun Meraish, responsable de l'OLP en France, alors qu'il séjournait à Athènes.  Tzipi Livni était-elle derrière cette opération ? L'intéressée n'est pas prête de confirmer.

Interrogée hier sur son passé, Tzipi Livni s'est contentée de répondre : "J'ai quitté le Mossad quand je me suis mariée, car je ne pouvais plus vivre ce genre de vie."