Du massacre du 17 octobre 1961 à l’indépendance de l’Algérie,

à la reconnaissance par François Hollande de cette sanglante répression.

 

 

À l’aéroport d’Orly, l’expulsion d’un groupe d’Algériens ayant participé à la manifestation deux jours auparavant. Document Le Figaro.fr, Crédits photo : KEYSTONE/KEYSTONE France.

 

Voir, à l’occasion du cinquantenaire, «le 17 octobre 1961, ou l’histoire d’un massacre à Paris».

 

Sans cette guerre l’Algérie ne serait pas indépendante, les Algériens ont combattus, comme tous les peuples, pour leur liberté.

 

Support WikipediaIl faut que ce soit le second président socialiste de la 5ème république pour que soit officiellement reconnu la sanglante répression organisée par le préfet de police Maurice Papon. 51 années plus tard, enfin, François Hollande rappelle cette histoire peu glorieuse de notre pays, et reconnait avec lucidité la sanglante manifestation d’Algériens à Paris en ce 17 octobre 1961. Des gouvernements de droite et de gauche sont passés, mais aucun n’a eu le courage de reconnaître ce triste fait, mais François Hollande ne prononce pas d’excuses. Des Algériens, qui manifestèrent malgré le couvre-feu, pour le droit à l’indépendance «ont été tués lors de cette sanglante répression, la République reconnaît avec lucidité ces faits, cinquante et un ans après cette tragédie, je rends hommage à la mémoire des victimes».

 

Cette manifestation de masse fut considérée comme une provocation organisée par la Fédération de France du FLN, contre lequel la France combattait, les accords d’Èvian n’étaient pas encore signés, l’indépendance de l’Algérie n’était donc pas effective, même si tout y courrait. Préparée en secret cette manifestation, qui se voulait pacifique, sous forme de défilés nocturnes dans les grandes artères de Paris, dégénéra en un vrai massacre. C’est dans le contexte de cette guerre d’Algérie dans laquelle les actions terroristes du FLN contre les forces de l’ordre que la manifestation fut interdite. Bravant cet interdit, les Algériens furent, à différents endroits de la capitale, bastonnés, crânes fracassées par les manches de pioche, tués par balles, et jetés dans la Seine, notamment au pont Saint-Michel, faisant ainsi des centaines de blessés et de morts. À ces endroits la Seine était rouge de sang. Il faut comprendre le caractère explosif de cette époque ou les forces de l’ordre qui, subissaient, même en métropole, des actes de terrorisme du FLN, et des assassinats de policiers, étaient survoltées. Mais cela n’exauce en rien les bastonnades qui exprimèrent la haine des policiers extrémistes noyautées par des Ultras de l’OAS dans l’appareil d’État contre cette communauté Algérienne de la métropole qui défilaient pacifiquement pour l’expression de leur indépendance. Ils furent l’objet d’une lutte fratricide entre le FLN et le MNA Mouvement National Algérien, deux tendances politiques qui s’opposaient depuis plusieurs années. Afin de bien montrer la portée de cette reconnaissance, François Hollande a signé l’Appel pour la reconnaissance officielle de la tragédie du 17 octobre 1961 à Paris lancé par le site Mediapart.

 

Le but était de contrecarrer les négociations entre l’État français représenté par le général de Gaulle et le GPRA, Gouvernement Provisoire de la République Algérienne dans l’objectif de leur indépendance.

 

Il est évident que cette reconnaissance entre dans le cadre des négociations qui vont s’ouvrir début décembre lors du voyage officiel de François Hollande en Algérie ou il rencontrera le président Algérien Abdelaziz Bouteflika. Il convenait une fois pour toute de tirer un trait sur cette page de notre histoire commune. Évidemment, comme il se doit, cet acte de franchise est fortement critiqué par l’opposition, par Christian Jacob, président du groupe UMP à l’Assemblée, «s’il n’est pas question de nier les événements du 17 octobre 1961 et d’oublier les victimes, il est intolérable de mettre en cause la police républicaine et avec elle la République toute entière, écrit-il dans un communiqué. François Hollande doit rassembler et sa tentative de politiser les enjeux de mémoire d’une période difficile de notre histoire est dangereuse pour la cohésion nationale». Comme à son habitude, cette droite pratique les fausses informations par cette phrase sibyllin, «il est intolérable de mettre en cause la police républicaine». En quoi la déclaration de François Hollande met-elle en cause la police républicaine ?

 

Jean-Marie Le Pen n’est pas en reste, mais plus juste, critiquant la compétence du président sur cet événement. «Pas plus M. Chirac que M. Hollande n’ont autorité pour reconnaître la culpabilité ou l’innocence de la France. Ces gens qui mettent les responsabilités de la France en cause ne sont pas chargés de ça. Pas plus M. Chirac que M. Hollande n’ont autorité pour reconnaître la culpabilité ou l’innocence de la France. Ça les dépasse de 100 000 mille coudées».

 

Le gros argument de la droite extrémiste est de dire qu’il faut toujours que se soit la France qui reconnaisse ses actes et que l’Algérie ne reconnaisse rien. C’est exact, mais la différence est de taille, il faut savoir si un peuple occupé à le droit de combattre pour sa liberté ? Qu’avons-nous fait en 40 n’avons nous pas combattus pour notre liberté ? Pourquoi ce combat serait-il permis pour nous et pas pour les autres ? Pourquoi dénommer ces Algériens de terroristes, n’était-ce pas des soldats, qui combattaient pour leur liberté avec les moyens qu’ils avaient ?

 

Dans la foulée, une proposition des sénateurs communistes a été déposée sur la reconnaissance de ce massacre, elle sera examinée le 23 octobre à l’Assemblée nationale. Le député du Front de gauche ex communiste, François Asensi, a fait de même afin que toute la lumière soit faite sur cette tragédie. Depuis 1997, il demande que soient ouvertes les archives du ministère de l’intérieur, «parce qu’une démocratie digne de ce nom ne peut maintenir le secret sur ces terribles événements. L’adoption de cette proposition de loi serait un geste de concorde à l’adresse du peuple Algérien, ce peuple ami, et contribuerait au rapprochement entre nos deux peuples».

 

Bertrand Delanoë en tant que maire de Paris a lui aussi rendu hommage aux victimes, et s’est dit confiant de la reconnaissance par l’État de sa responsabilité dans cette tragédie. «Le respect du peuple Algérien c’est de dire la vérité, la vérité c’est que le 17 octobre 1961 de très nombreux Algériens ont été jetés à la Seine, massacrés alors qu’ils manifestaient pacifiquement pour un droit à l’indépendance», a-t-il déclaré à la presse, après avoir déposé une gerbe de fleurs devant la plaque commémorative qu’il avait inaugurée en 2001 au pont Saint-Michel.

 

Cette photo a été prise le 17 octobre 2 001, après l’inauguration officielle de la plaque, par David Henry, © 2002, tous droits réservés, document Commémorations du massacre du 17 octobre 1961.

 

D’autres photographies de David Henry http://www.davidphenry.com/