Si ce n’est pas Uribe, qui ?

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On se rappelle que le président Uribe avait dû faire modifier la Constitution pour prétendre à un deuxième mandat (voir : Un troisième mandat pour Uribe ? ), ce qui lui avait permis d’être élu une seconde fois avec la majorité absolue dès le premier tour en 2006.

Mais voilà qu’arrive la fin de son deuxième mandat et, comme avant 2006, la majorité tente de faire adopter un projet de loi permettant d’organiser un referendum qui permettra aux électeurs de se prononcer en faveur ou en défaveur d’une modification de la Constitution permettant à un président de briguer un troisième mandat.

Il y a deux semaines, le Sénat a approuvé la loi autorisant la tenue du referendum, et cette semaine c’était au tour de la Chambre des représentants. Il ne reste donc plus maintenant qu’à passer le cap de la Cour constitutionnelle qui doit vérifier la légitimité d’un tel referendum.

Ainsi, étape après étape, le président Uribe se dirige vers un troisième mandat, même si, évidemment, le fait de l’autoriser à se présenter aux élections présidentielles de 2010 ne garantit aucunement sa victoire…

Comme on s’en doute, la possibilité de laisser à l’actuel président une telle latitude agace particulièrement une opposition en mal de reconnaissance et crée une polémique qui anime les débats politiques entre les adeptes de Uribe et ceux qui sont contre lui.

Les derniers se demandant quelle est la réelle valeur démocratique d’une Constitution qui permettrait à un chef d’État de se perpétuer au pouvoir, tandis que les premiers leur rétorquent que qui mieux qu’Uribe peut continuer à promouvoir la politique de sécurité démocratique qu’il a mise en place en 2002 et poursuivre la récupération économique du pays.

Les détracteurs remarquent cependant qu’Uribe est victime d’un paradoxe sur le plan international où il est le symbole de celui qui s’oppose au socialisme bolivarien prôné par ses homologues du Venezuela et d’Équateur, Hugo Chavez et Rafael Correa, tandis que cette course aux mandats le fait se confondre avec ses eux.

Ainsi, la principale victime d’un troisième mandat serait probablement Uribe lui-même dont les gens ne se souviendront peut-être plus dans un demi-siècle que comme celui qui a bouleversé les règles pour se perpétuer au pouvoir.

Car si l’image d’un Uribe qui s’accroche au pouvoir finit par prévaloir, qui se souviendra que lorsque Uribe est arrivé au pouvoir en 2002 le pays était tenu en coupe réglée par les FARC (forces armées révolutionnaires de Colombie), l’ELN (armée de libération nationale) et autres AUC (autodéfense de Colombie) qui se moquaient des droits de l’homme, développaient le commerce de la drogue et s’en prenaient sans discrimination aux hommes politiques, aux indigènes, aux militaires, aux civils, et aux enfants ?

Qui se rappellera les 50 000 guérilleros et paramilitaires qui ont déposé les armes pour se joindre au plan Justicia y Paz (justice et paix), qui se souviendra des premiers pas hésitants des premières allocations de chômage, ou de la mise au point d’un système de santé réellement gratuit pour les plus pauvres ? Bien sûr, la plupart des projets n’ont été que finalisés par le président Uribe puisqu’ils avaient été initiés par ses prédécesseurs.

Mais le plus grave, alors que le débat fait rage entre ceux qui sont pour et ceux qui sont contre Uribe, pratiquement tous restent muets lorsqu’il faut répondre à cette question : « Si ce n’est pas Uribe, qui ? »

Car hélas, la plupart des analystes doivent reconnaître que la réélection ne se fera pas contre la démocratie, mais bien en sa faveur car même si tout n’est pas encore parfait, si les cas de corruption sont encore trop nombreux, c’est seulement sous l’actuel gouvernement que la lutte est devenue visible et que l’immunité parlementaire ne protège plus ni ministres, ni sénateurs, ni députés. L’amélioration de l’armée fait elle aussi des progrès même si les observateurs étrangers regrettent que cela ne semble pas encore être une des priorités du gouvernement.

Ainsi, malgré l’âpreté des débats, on en revient toujours à la même question : qui pourrait succéder à Uribe ? Et c’est bien là le plus inquiétant, car comment une démocratie reconnue a-t-elle pu arriver au point où un seul homme semble encore capable de la diriger. Comment en sept ans de gouvernement Uribe a-t-on pu assister à une telle déliquescence de la vie politique colombienne ? Où sont passés les Horacio Serpa (candidat malheureux du Parti libéral en 1998, 2002 et 2006), Noemí Sanín (dissidente du Parti conservateur, candidate en 1998 et 2002), Luis Eduardo Garzon (Pôle démocratique, candidat en 2002 et en 2006), pour ne parler que des principales figures qui animaient le débat politique ?

Enfin, il reste encore quelques mois avant les élections, la providence amènera peut-être un nouveau candidat dans le débat… pourquoi pas Ingrid Betancourt que beaucoup, hélas uniquement en France, voyaient déjà présidente de la Colombie en 2010.

 

3 réflexions sur « Si ce n’est pas Uribe, qui ? »

  1. Quel incroyable phénomène ! Changer la constitution pour continuer d’exercer son mandat.
    Une honte mais surtout un dilemme que vous résumez bien : sinon qui ??
    Ainsi, n’y a-t-il personne d’honnête pour gouverner la Colombie ? Aucun parti qui ne fasse l’affaire ?
    Uribe aussi, est un super-président ??

  2. [i][b]Veritas,

    il ne faut pas oublier que Uribé a permis à ses concitoyens d’avoir des soins médicaux gratuits…

    Puis, que savez-vous de la Colombie ?
    [u]
    Le Candide vit en Colombie[/u] : il est à même de pouvoir en parler !

    Avant d’accuser Le Candide de faire une publicité en faveur de la CIA, vous devriez vous pencher sur toutes les exactions, tous les meurtres de masse, toutes les exécutions, tous les enlèvements (accompagnés par des détentions arbitraires), tous les attentats… commis par les FARC ! [/b][/i]

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