RSF: La Tunisie, Ennemie d’Internet

Le 12 mars 2009, Reporters sans frontières publie un rapport intitulé « Les Ennemis d’Internet« , dans lequel l’organisation fait état de la censure d’Internet dans vingt-deux pays.

« Les douze « Ennemis d’Internet » (Arabie Saoudite, Birmanie, Chine, Corée du Nord, Cuba, Egypte, Iran, Ouzbékistan, Syrie, Tunisie, Turkménistan, Viêt-nam) ont tous transformé leur réseau en intranet, empêchant les internautes d’accéder aux informations jugées « indésirables ». Tous ces pays s’illustrent non seulement par leur capacité à censurer l’information en ligne, mais encore par la répression quasi systématique des internautes gênants », a déclaré l’organisation… Voici la Partie consacrée à la Tunisie :

460106028.JPGNom de domaine : .tn.
Population : 10 383 577.
Internautes : 2 800 000.
Prix moyen d’une heure de connexion dans un cybercafé : entre 50 cts et 1 euro.
Salaire mensuel moyen : 310 euros.
Nombre de fournisseurs d’accès privés : 5.
Nombre de fournisseurs d’accès publics : 7.
Nombre de blogueurs emprisonnés : 0.

En 2008, Internet a été la cible de nombreuses attaques, empêchant toute critique envers le régime empêchant la diffusion à grande échelle de toute critique. Ironie du sort, c’est le secteur des télécommunications qui est l’un des moteurs de l’économie tunisienne.

S’il existe aujourd’hui dans le pays près d’une douzaine de fournisseurs d’accès à Internet, l’opérateur Planet.tn, propriété de l’une des filles du président Ben Ali, continue de détenir la plus grosse part de marché. La politique du président Zine el-Abidine Ben Ali est toujours très stricte en matière de filtrage du Net et l’autocensure semble être la règle parmi les blogueurs de la Toile tunisienne. Instance publique de régulation, l’Agence tunisienne d’Internet (ATI), loue la bande passante aux fournisseurs d’accès du pays.

Un arsenal de consignes s’ajoute au filtrage systématique des sites d’opposition. Les cybercafés sont surveillés. Selon la loi tunisienne, leurs gérants sont responsables des activités de leurs clients et il est souvent nécessaire de présenter une pièce d’identité pour se connecter dans un café.

Il n’est pas rare non plus que leurs propriétaires demandent de ne pas naviguer sur certains sites jugés « subversifs ». Une consigne le rappelle d’ailleurs clairement sur les murs de certains cybercafés.

Le filtrage des sites Internet est une pratique répandue face à la popularité du cyberespace auprès des Tunisiens. Les 281 « Publinets » – accès publics à Internet – sont les lieux privilégiés des 18-25 ans. Les sites les plus connus en matière de défense de droits de l’homme, ainsi que les principaux proxies comme Anonymizer (http://www.anonymizer.com/) et Guardster (http://www.guardster.com/), sont inaccessibles.

Le filtrage est une pratique courante, à laquelle sont régulièrement confrontés les blogueurs tunisiens, qui ont d’ailleurs organisé la « journée contre la censure des blogs« , le 4 novembre 2008. Car le pays de Zine el-Abidine Ben Ali est l’un des plus liberticides en ce qui concerne Internet.

Les sites communautaires de partage et d’échange de données en ligne tels que Dailymotion, YouTube ou Facebook sont régulièrement bloqués en raison de la publication de contenus critiquant la politique du Président. Les e-mails de certains défenseurs des droits de l’homme sont également filtrés.

Un succès qui a son revers

La Tunisie est l’un des pays les plus connectés en Afrique du Nord. Le succès de la Toile facilite l’accès à l’information. Mais certains sites sont la cible d’attaques informatiques. Le 10 avril 2008, des vidéos publiées sur le Web ont permis de mesurer la gravité de la situation dans le bassin minier de Gafsa (sud du pays) suite à la répression exercée par les autorités lors d’une manifestation dans les villes de Redeyef et Aïn Moulares. Ces vidéos constituaient les rares sources d’information sur cet événement. Le 11 juin 2008, les blogs samsoum-us (http://samsoum-us.blogspot.com/2008/06/2eme-mortvirtuelle-je-mhabitue.html), romdhane (http://romdhane.maktoobblog.com) et RoufRouf (http://roufrouf.blogspot.com) ont été rendus inaccessibles suite à leur traitement de ces manifestations. Des affrontements entre l’armée et des ouvriers qui dénonçaient le chômage et le coût de la vie avaient entrainé la mort par balles d’un manifestant.

En deux ans, le site d’information Tunisnews (http://www.tunisnews.net) a fait deux fois l’objet d’attaques informatiques et sa liste de diffusion des articles a été détruite en 2003 et 2006. Si la rédaction ignore qui est à l’origine de ces attaques, elle observe que celles-ci coïncident avec la publication d’articles crit-quant le régime de Zine el Abidine Ben Ali.

En 2008, plus d’une dizaine de sites contestataires ont été « hackés » et bloqués. En octobre 2008, le blog du journaliste tunisien Zied El-Heni http://journaliste-tunisien.blogspot.com a été bloqué suite à la publication du classement mondial de la liberté de la presse 2008 de Reporters sans frontières (http://journalistetunisien.blogspot.com/2008/10/rsf-classementmondial-de-la-libert-de.html), dans lequel la Tunisie figure au 143e rang sur 173. Il est cependant disponible à l’adresse suivante : http://journaliste-tunisien-2.blogspot.com/.

Le 16 juin 2008, le site d’information www.Nawaat.org a connu sa plus grave attaque informatique depuis sa création. Ses bases de données ont été effacées et sa page d’accueil modifiée. Les blogs des défenseurs des droits de l’homme Sami Ben Gharbia (http://www.kitab.nl/) et Astrubal (http://astrubal.nawaat.org/) ont également été touchés. Leurs blogs sont restés inaccessibles car leurs bases de données ont été partiellement détruites. Les sites ont été partiellement restaurés depuis.

Le site Internet du magazine Kalima (http://www.kalimatunisie.com/) est inaccessible depuis le 8 octobre 2008. Le 7 octobre, la rédaction avait publié un reportage sur des incidents violents qui se sont déroulés devant le palais de justice de Tunis, au cours desquels les forces de l’ordre ont frappé des détenus sous les yeux des magistrats. D’après la rédactrice en chef, cette attaque pourrait être un moyen de censurer cette information.

E-mails sous surveillance et connexions particulières

Tous les mois, les données personnelles des abonnés à Internet sont transmises à l’ATI, qui gère toute la messagerie électronique en Tunisie. Sur le plan légal, le code de la Poste de 1998 autorise l’interception du courrier électronique portant « atteinte à l’ordre public et à la sécurité nationale« .

Les connexions privées de certains journalistes et opposants sont coupées pour des « raisons techniques » ou alors, le débit est diminué afin d’augmenter le temps de téléchargement des pages Internet et de restreindre ainsi la consultation des sites. Ces procédés découragent petit à petit la blogosphère, qui ose moins critiquer la politique du gouvernement. Certains blogueurs abandonnent même. Mais d’après des experts en sécurité informatique, les connexions Internet seraient individualisées. Ainsi, deux internautes critiques envers le régime n’auront pas la même connexion ni le loisir de consulter les mêmes sites Internet. De plus, cette connexion ne serait pas spécifique à un poste informatique donné, mais à un compte individuel. De ce fait, la connexion d’un individu resterait la même chez lui et au bureau.

Il n’est pas donc aisé pour un défenseur des droits de l’homme de consulter sa messagerie électronique. Les e-mails provenant d’organismes de défense des droits de l’homme tels que l’Association internationale de soutien aux prisonniers politiques (AISPP), le site d’information Tunisnews ou de Reporters sans frontières sont souvent illisibles. D’après plusieurs sources, ces mails sont présents sur la boîte aux lettres électronique du destinataire, il est possible de les ouvrir, mais les messages sont vides et, une fois ouverts, ils disparaissent de la boîte. « Ça ressemble à un filtrage mal caché« , selon les avis de spécialistes de la question.

Plus d’informations :

Pour Télécharger le rapport complet : « Les ennemis d’Internet 2009« 

Le 12 mars 2009, Reporters sans frontières publie un rapport intitulé « Les Ennemis d’Internet« , dans lequel l’organisation fait état de la censure d’Internet dans vingt-deux pays.

« Les douze « Ennemis d’Internet » (Arabie Saoudite, Birmanie, Chine, Corée du Nord, Cuba, Egypte, Iran, Ouzbékistan, Syrie, Tunisie, Turkménistan, Viêt-nam) ont tous transformé leur réseau en intranet, empêchant les internautes d’accéder aux informations jugées « indésirables ». Tous ces pays s’illustrent non seulement par leur capacité à censurer l’information en ligne, mais encore par la répression quasi systématique des internautes gênants », a déclaré l’organisation… Voici la Partie consacrée à la Tunisie :

460106028.JPGNom de domaine : .tn.
Population : 10 383 577.
Internautes : 2 800 000.
Prix moyen d’une heure de connexion dans un cybercafé : entre 50 cts et 1 euro.
Salaire mensuel moyen : 310 euros.
Nombre de fournisseurs d’accès privés : 5.
Nombre de fournisseurs d’accès publics : 7.
Nombre de blogueurs emprisonnés : 0.

En 2008, Internet a été la cible de nombreuses attaques, empêchant toute critique envers le régime empêchant la diffusion à grande échelle de toute critique. Ironie du sort, c’est le secteur des télécommunications qui est l’un des moteurs de l’économie tunisienne.

S’il existe aujourd’hui dans le pays près d’une douzaine de fournisseurs d’accès à Internet, l’opérateur Planet.tn, propriété de l’une des filles du président Ben Ali, continue de détenir la plus grosse part de marché. La politique du président Zine el-Abidine Ben Ali est toujours très stricte en matière de filtrage du Net et l’autocensure semble être la règle parmi les blogueurs de la Toile tunisienne. Instance publique de régulation, l’Agence tunisienne d’Internet (ATI), loue la bande passante aux fournisseurs d’accès du pays.

Un arsenal de consignes s’ajoute au filtrage systématique des sites d’opposition. Les cybercafés sont surveillés. Selon la loi tunisienne, leurs gérants sont responsables des activités de leurs clients et il est souvent nécessaire de présenter une pièce d’identité pour se connecter dans un café.

Il n’est pas rare non plus que leurs propriétaires demandent de ne pas naviguer sur certains sites jugés « subversifs ». Une consigne le rappelle d’ailleurs clairement sur les murs de certains cybercafés.

Le filtrage des sites Internet est une pratique répandue face à la popularité du cyberespace auprès des Tunisiens. Les 281 « Publinets » – accès publics à Internet – sont les lieux privilégiés des 18-25 ans. Les sites les plus connus en matière de défense de droits de l’homme, ainsi que les principaux proxies comme Anonymizer (http://www.anonymizer.com/) et Guardster (http://www.guardster.com/), sont inaccessibles.

Le filtrage est une pratique courante, à laquelle sont régulièrement confrontés les blogueurs tunisiens, qui ont d’ailleurs organisé la « journée contre la censure des blogs« , le 4 novembre 2008. Car le pays de Zine el-Abidine Ben Ali est l’un des plus liberticides en ce qui concerne Internet.

Les sites communautaires de partage et d’échange de données en ligne tels que Dailymotion, YouTube ou Facebook sont régulièrement bloqués en raison de la publication de contenus critiquant la politique du Président. Les e-mails de certains défenseurs des droits de l’homme sont également filtrés.

Un succès qui a son revers

La Tunisie est l’un des pays les plus connectés en Afrique du Nord. Le succès de la Toile facilite l’accès à l’information. Mais certains sites sont la cible d’attaques informatiques. Le 10 avril 2008, des vidéos publiées sur le Web ont permis de mesurer la gravité de la situation dans le bassin minier de Gafsa (sud du pays) suite à la répression exercée par les autorités lors d’une manifestation dans les villes de Redeyef et Aïn Moulares. Ces vidéos constituaient les rares sources d’information sur cet événement. Le 11 juin 2008, les blogs samsoum-us (http://samsoum-us.blogspot.com/2008/06/2eme-mortvirtuelle-je-mhabitue.html), romdhane (http://romdhane.maktoobblog.com) et RoufRouf (http://roufrouf.blogspot.com) ont été rendus inaccessibles suite à leur traitement de ces manifestations. Des affrontements entre l’armée et des ouvriers qui dénonçaient le chômage et le coût de la vie avaient entrainé la mort par balles d’un manifestant.

En deux ans, le site d’information Tunisnews (http://www.tunisnews.net) a fait deux fois l’objet d’attaques informatiques et sa liste de diffusion des articles a été détruite en 2003 et 2006. Si la rédaction ignore qui est à l’origine de ces attaques, elle observe que celles-ci coïncident avec la publication d’articles crit-quant le régime de Zine el Abidine Ben Ali.

En 2008, plus d’une dizaine de sites contestataires ont été « hackés » et bloqués. En octobre 2008, le blog du journaliste tunisien Zied El-Heni http://journaliste-tunisien.blogspot.com a été bloqué suite à la publication du classement mondial de la liberté de la presse 2008 de Reporters sans frontières (http://journalistetunisien.blogspot.com/2008/10/rsf-classementmondial-de-la-libert-de.html), dans lequel la Tunisie figure au 143e rang sur 173. Il est cependant disponible à l’adresse suivante : http://journaliste-tunisien-2.blogspot.com/.

Le 16 juin 2008, le site d’information www.Nawaat.org a connu sa plus grave attaque informatique depuis sa création. Ses bases de données ont été effacées et sa page d’accueil modifiée. Les blogs des défenseurs des droits de l’homme Sami Ben Gharbia (http://www.kitab.nl/) et Astrubal (http://astrubal.nawaat.org/) ont également été touchés. Leurs blogs sont restés inaccessibles car leurs bases de données ont été partiellement détruites. Les sites ont été partiellement restaurés depuis.

Le site Internet du magazine Kalima (http://www.kalimatunisie.com/) est inaccessible depuis le 8 octobre 2008. Le 7 octobre, la rédaction avait publié un reportage sur des incidents violents qui se sont déroulés devant le palais de justice de Tunis, au cours desquels les forces de l’ordre ont frappé des détenus sous les yeux des magistrats. D’après la rédactrice en chef, cette attaque pourrait être un moyen de censurer cette information.

E-mails sous surveillance et connexions particulières

Tous les mois, les données personnelles des abonnés à Internet sont transmises à l’ATI, qui gère toute la messagerie électronique en Tunisie. Sur le plan légal, le code de la Poste de 1998 autorise l’interception du courrier électronique portant « atteinte à l’ordre public et à la sécurité nationale« .

Les connexions privées de certains journalistes et opposants sont coupées pour des « raisons techniques » ou alors, le débit est diminué afin d’augmenter le temps de téléchargement des pages Internet et de restreindre ainsi la consultation des sites. Ces procédés découragent petit à petit la blogosphère, qui ose moins critiquer la politique du gouvernement. Certains blogueurs abandonnent même. Mais d’après des experts en sécurité informatique, les connexions Internet seraient individualisées. Ainsi, deux internautes critiques envers le régime n’auront pas la même connexion ni le loisir de consulter les mêmes sites Internet. De plus, cette connexion ne serait pas spécifique à un poste informatique donné, mais à un compte individuel. De ce fait, la connexion d’un individu resterait la même chez lui et au bureau.

Il n’est pas donc aisé pour un défenseur des droits de l’homme de consulter sa messagerie électronique. Les e-mails provenant d’organismes de défense des droits de l’homme tels que l’Association internationale de soutien aux prisonniers politiques (AISPP), le site d’information Tunisnews ou de Reporters sans frontières sont souvent illisibles. D’après plusieurs sources, ces mails sont présents sur la boîte aux lettres électronique du destinataire, il est possible de les ouvrir, mais les messages sont vides et, une fois ouverts, ils disparaissent de la boîte. « Ça ressemble à un filtrage mal caché« , selon les avis de spécialistes de la question.

Plus d’informations :

Pour Télécharger le rapport complet : « Les ennemis d’Internet 2009« 

Lire la suite : http://tunisiawatch.rsfblog.org/archive/2009/03/12/rsf-la-tunisie-ennemie-d-internet.html.