Roumanie : retour à la légalité ?

Victor Ponta, Premier ministre roumain, et le Parlement dominé par son parti, veut la peau de Traian Basescu, devenu président « par intérim » en attendant les résultats d’un référendum organisé le 29 juillet pour le destituer. Diverses mesures douteuses, voire liberticides, avaient été prises par le gouvernement ou le parlement, qui émeuvent fort les Roumaines et Roumains, y compris ceux qui n’avaient pas le président et son parti en haute estime. Sous la pression internationale, l’Union sociale libérale, parti devenu majoritaire, semble faire machine arrière. 

« Je ne veux pas faire partie de la génération sacrifiée, plutôt émigrer, » commente une jeune Roumaine dont la tendre adolescence fut marquée par le communisme autoritaire à la Ceaucescu. Ses craintes, partagées par une partie de la population qui n’aurait pas vu d’un mauvais œil le président Basescu démissionner de lui-même, tant ses mesures d’austérité ont déplu, restent vives. Elles s’expriment notamment dans une presse qui s’était montrée fort critique à l’endroit du président devenu intérimaire et placé à l’écart, et de son parti.
Mais en adoptant un train de mesures autoritaires, l’Union sociale libérale (USL) a fait craindre un retour à une sorte de dictature n’avouant pas sa nature. Craintes sans doute exagérées, mais qui avaient fait réagir la communauté internationale.

Pour être mieux sûr d’emporter le référendum devant destituer Basescu, Crin Antonescu, de l’USL, président lui aussi intérimaire mais en exercice,  avait fait passer une loi révoquant celle stipulant que la participation de la moitié des inscrits n’était plus nécessaire.
Il a dû, sous la pression notamment de l’UE (et sans doute celle, plus discrète, des États-Unis), faire machine arrière.

Les politologues s’accordent pour penser que, dans ce cas, nombre d’électeurs dégoûtés du jeu politicien pourraient s’abstenir et que l’USL ne parviendra pas à mobiliser plus de la moitié de l’électorat. Basescu a donc des chances de rester en place.

Voici deux jours, Ponta et Antonescu s’écriaient que la Roumanie ne fléchirait pas face aux diktats venus de l’étranger. Il faut croire qu’ils ont soupesé le pour et le contre d’un affrontement avec l’Union européenne.

De son côté, le PSD (Parti social démocrate) ne se laisse pas abattre et propose des festivités (peut-être des banquets gratuits) et des loteries (avec en lots une Dacia, des ordinateurs, de l’électroménager…) pour mobiliser l’électorat, rapporte Adevarul. Basescu, lui, a dénoncé une manœuvre pour « protéger de futurs coupables de la classe politique ».
Des manifestations « spontanées » de pro et anti-Basescu se tiennent sporadiquement.

La Roumanie compte 4,3 millions de « budgétaires » (fonctionnaires et assimilés) et de salariés, ou de travailleurs agricoles ou petits indépendants, dont près de la moitié (1,9 millions) vit sous le seuil de pauvreté. Sous Basescu, la TVA a été portée à 24 % sur tous les produits, alimentaire de base inclus. Basescu avait fait passer les mesures d’austérités, non pas celles exigées globalement par le FMI mais celles qui l’arrangeaient pour parvenir au résultat comptable, de la même manière autoritaire.

La corruption semble avoir été le fait de pratiquement toutes les formations politiques roumaines et presque chaque jour, un scandale est révélé. Récemment, c’est un groupe de 15 personnes qui ont réussi à dissimuler au fisc des revenus issus de la production pétrolière pour un préjudice de 15 millions d’euros. Le plus récent rapport de la Commission européenne critique le fléchissement des réformes judiciaires, tant en Roumanie qu’en Bulgarie.

L’austérité se fait d’autant plus sentir que les banques ont eu une politique de crédit très agressive, mais avec des taux variables et des emprunts libellés en euros. Or, l’euro, se situant à l’époque à moins de quatre lei, en vaut à présent presque 4,6. 

Si Victor Ponta a été accueilli à Chisinau, la capitale moldave, par des manifestants l’accusant d’être un « usurpateur », l’opinion roumaine est partagée, ou plutôt majoritaire à considérer qu’aucun ne vaut guère mieux que l’autre. 

Que le Conseil national d’éthique ait ou non considéré que la thèse de doctorat en droit du Premier ministre Ponta est été ou non un plagiat (elle vient ce jour de décider que non, après une longue polémique, et une pétition signée par 14 000 personnes des milieux lettrés exigeant sa démission) ne change pas grand’ chose aux données économiques.

En meeting à Timisoara (Banat), Crin Antonescu aurait, selon le redchef d’Adevarul, paraphrasé le fameux discours de Kennedy à Berlin ponctué d’un « Ich bin ein Berliner! ». Mais un berliner, c’est aussi un gogoaşă (un beignet à la confiture). Pour Mălin Bot, Antonescu ne pèse guère plus de 37 grammes, comme un berliner (un beignet boule de Berlin, ou berlinois). Il n’est pas sûr que Basescu pèse davantage dans la balance de l’électorat roumain, qui surveille les coûts de la farine et des œufs…

Auteur/autrice : Jef Tombeur

Longtemps "jack of all trades", toujours grand voyageur. Réside principalement à Paris (Xe), fréquemment ailleurs (à présent, en Europe seulement). A pratiqué le journalisme plus de sept lustres (toutes périodicités, tous postes en presse écrite), la traduction (ang.>fr. ; presse, littérature, docs techs), le transport routier (intl. et France), l'enseignement (typo, PAO, journalisme)... Congru en typo, féru d'orthotypographie. Blague favorite : – et on t'a dit que c'était drôle ? Eh bien, on t'aura menti !

2 réflexions sur « Roumanie : retour à la légalité ? »

  1. le président par interim n’est pas Traian Basescu qui fait l’objet de la suspension. Le président par interim est Crin Antonescu, co-président de l’USL.

  2. Mon dieu quel bonheur, mon dieu quel bonheur, enfin le mur d ela honte est tolmbé et tous ces pays vont enfin connaître la liberté… disaient certains….

Les commentaires sont fermés.