Et si, ils l’ont fait. Alors que le bureau électoral officiel a révisé ses décomptes de 0,01 % pour le référendum de dimanche dernier, fixant toujours la participation à un peu plus de 46 % au lieu des 50 requis, la Cour constitutionnelle roumaine, activée par la coalition USL au pouvoir se donne encore le temps de la réflexion. Faute de pouvoir modifier le résultat, autant tripatouiller le quorum sur la base du dernier référendum de fin 2011, aux résultats contestés.

 

Auparavant, c’était simple : on inventait un présumé putsch militaire, fomenté par les politiciens dont on voulait se débarrasser. Un obscur général en disgrâce en faisait les frais, sans trop comprendre ce qui lui advenait, et voilà. En Roumanie, où le président encore suspendu Basescu brandit les drapeaux de l’Union européenne et de l’Otan, c’est devenu un peu plus compliqué.
Pour tenter de se sortir de l’imbroglio du dernier référendum, qui ne peut, au vu des résultats officiels, qu’être invalidé, l’USL a donc trouvé deux « parades ».
Tout d’abord proclamer haut et fort que prôner l’abstention, comme l’a fait l’opposition, est non seulement inconstitutionnel, mais illégal.
Ensuite, remettre sur le tapis le dernier recensement de fin 2011 et contester le nombre des inscrits sur cette base.
La Cour constitutionnelle aurait pu balayer d’un revers de main ces objections au motif que les consignes d’abstention ne sont pas davantage de fraîche date…
Pas davantage que les contestations sur le dernier recensement : il aurait fallu s’y prendre avant.
Mais non.

Le ministre de l’Intérieur, Ioan Rus, vient d’adresser à la Cour constitutionnelle une précision supplémentaire. Pour un peu, il soutiendrait que des inscrits auraient pu s’abstenir deux fois, faussant les résultats du référendum.

Évidemment, c’est exclusivement à l’Autorité électorale permanente de se prononcer, estime-t-il. Ce qui laisse un sursis au président intérimaire, Crin Antonescu, allié du Premier ministre Victor Ponta, pour ne pas vider les lieux du palais Cotroceni, l’Élysée roumain, et ne pas en passer les clefs au président toujours suspendu, Trian Basescu.

On pourrait aussi attendre la révision du recensement, qui devrait intervenir au second trimestre de l’année prochaine. Certes, l’Institut national de la statistique n’a pas de sources de données permettant de fixer le nombre des personnes disposant du droit de vote, mais après tout, cela pourrait s’arranger.

Pour le moment, la Cour constitutionnelle prendra son temps. Elle se prononcera seulement le 12 septembre, mais des prolongations (et des tirs au but ?) sont envisageables. Du coup, Antonescu reste dans « ses » meubles de Cotroceni.

 

Hannes Swoboda, un parlementaire, a estimé que Basescu pouvait regagner ses pénates présidentielles, mais Antonescu ne l’entend pas ainsi.

D’autres référendums avaient boycottés par le passé, notamment par Sova et Ponta, de l’USL. Là, ce n’était nullement illégal.

Vu le nombre d’irrégularités (voir nos précédents articles sur Come4News), il existait sans doute d’autres moyens d’invalider ce référendum, et d’en organiser un correct (au prix d’une nouvelle centaine de millions de lei, car quand on aime la démocratie, on ne compte pas…). Évidemment, le président suspendu, qui a recueilli un désaveu de la part de 87 % des votants, ne le souhaite pas. Pourtant, il pourrait dénoncer la participation record dans certains villages (des taux de 284 %, avec des votes massifs contre lui) ou dans les prisons ou les centres psychiatriques.
Le gouvernement, qui avait supervisé l’établissement des listes électorales, déclare à présent qu’il avait été trompé à l’insu de son plein gré et qu’en fait le quorum est atteint, que Basescu doit partir. Il n’y aurait plus, en moins de deux ans, que 16 millions de personnes en âge de voter, soit deux millions de moins. Il veut se fonder sur les données de la sécurité sociale (sur lesquelles ne figurent pas les chômeurs et divers inactifs).
Sur ces aspects techniques, voir les cartes et graphiques du blogue-notes La Roumanie, de SamuelR, sur Mediapart (en accès libre), très documenté et quasi exhaustif.
L’abstention, tout comme le vote contre le gouvernement moldave lors des dernières élections de cette république, a été très forte chez les Roumains de l’étranger. Alors que 300 bureaux de vote avaient été instaurés pour faire le plein des voix.

Mais non, la diabolisation de l’autre ou des autres se poursuit. Draga Olteanu Matei, 78 ans, actrice renommée, a conchié publiquement Basescu, pire que Ceausescu. En face, des universitaires renforcent les accusations de plagiat du Premier ministre Ponta (accusé d’avoir pompé sa thèse de doctorat en droit) : ils sont désormais 66 (au lieu de 33) à réclamer l’annulation de son diplôme.

Victor Ponta a intimé l’ordre aux préfectures de procéder à une révision des listes électorales. La juge constitutionnelle Aspazia Cojocaru a soutenu que les données actuelles étaient faussées.

 

Pendant ce temps, la mer Noire virait au bleu. Ce serait dû au plancton et aux algues. Les photos récentes de la Nasa, comparées à celles de 2004, montrent un fort bleuissement de cette mer.
Attention, car Basescu, ancien officier de marine, avait arboré un tricoul (polo) bleu tout au long de la campagne électorale (sur les conseils d’une Mama Omida, une voyante, ont soutenu les mauvaises langues).
Est-ce un présage ? Pourtant, les boules de cristal restent… de cristal.
La mer Noire ne s’y colore pas davantage que précédemment.

Il se trouve des voix pour appeler à la réconciliation nationale et le quotidien Adevarul, relayé par l’AFP, tente de les rassembler. Mais d’un autre côté, il organise un sondage et pousse quelque peu le lectorat à se prononcer pour l’invalidation du référendum (et non pour l’organisation d’un nouveau, comme le souhaite Eugen Nicolaescu). Bref, il y aurait bien une solution, soit que Basescu démissionne de lui-même. Mais il veut dans ce cas qu’une réforme constitutionnelle ramène le nombre des parlementaires à 300. Et pourquoi pas aussi réduire leurs indemnités ?
Bien évidemment, cette proposition a été écartée par le gouvernement.

On ne sait si le pape catholique romain Benedict XVI, qui avait été invité en Roumanie par Basescu dès 2008 répondra à cette invitation ou à celle de 2011 du ministre des Affaires étrangères Teodor Baconschi. M’enfin, un référendum à un million de lei, plus une visite papale, qui serait confirmée aux dernières nouvelles, est-ce bien raisonnable ?