Réalisateur : Lenny Abrahamson
Date de sortie : 9 mars 2016
Pays : Canada, Irlande
Genre : Drame
Durée : 118 minutes
Budget : 6 millions de dollars
Casting : Brie Larson (Joy), Jacob Tremlay (Jack), Joan Allen (la grand mère), William H. Macy (le grand père)
Les films inspirés de faits réels sont nombreux au cinéma, en faire une liste serait inutile et fastidieux puis surtout le propos de cet article s’en verrait dénué de sens. Car ici, il s’agit d’un film influencé seulement car la fiction à tendance à modifier certains aspects, gommer l’adversité des événements ou parfois, au contraire, rendre les choses plus difficiles pour accentuer la dramaturgie. Les larmes, les pleurs, les violons et les kleenex, un cocktail émotionnel. Le prisme du 7ème art doit rendre les histoires plus romanesques. Dans une simple reconstitution, l’expérience ne peut-être aussi intense qu’au moment de son déroulement, les détails s’émoussent et le vécu n’est pas le même. Room permet surtout la découverte de deux talents prometteurs : Jacob Tremlay et Brie Larson.
Pour faire court, Jack et Ma sont enfermés depuis des années dans une chambre. Ce petit espace confiné c’est l’unique monde que connaît le garçon. Ma est prête à tous les sacrifices pour sortir son fils de cet endroit afin de lui offrir une vie libre hors de ces 4 murs recouverts d’un papier peint miteux et d’un vélux comme seul source de lumière naturelle.
Le rythme du film est correctement soutenu. Découpé en phases bien distinctes, d’abord l’incarcération ensuite la libération, cela évite l’écueil de voir un film se passer uniquement dans un seul endroit avec une mère et son enfant. Cela aurait donné un côté expérimental, très art contemporain, assez éloigné du grand public. Tout au long de la première période le décor (assez étroit) se plante, les personnages prennent forme ainsi que cet univers, coincé entre 4 murs, inventé par une mère aimante afin de rendre les choses plus acceptables pour son fils. La deuxième est plus intéressante en traitant de l’après séquestration. La reconstruction d’une vie perdue pour la mère et la construction psychologique du fils dans un environnement nouveau, comme s’il débarquait sur une nouvelle planète. Cette liberté retrouvée est synonyme de perte de repères et une quête d’identité.
Les personnages sont la véritable richesse de Room, ce couple fusionnel qui unit une mère à son enfant est d’une grande puissance. Le film reste centré sur le petit Jack, c’est lui qui narre l’histoire avec ses réflexions pleine de candeur et d’interrogations. Sa perception des choses fait sourire comme lorsqu’ il se demande si certains animaux sont réels ou vivent seulement dans la télévision, ou bien sur sa naissance et sur le fait qu’il ne conçoit pas qu’il puisse y avoir un monde hors de cette cage. Ce point de vue au niveau de l’enfant permet de rendre le film plus léger et apporter une touche d’innocence. Jack est le moteur de tout ce qui arrive dans Room, la fuite, la délivrance et la recomposition de Ma. Malgré les apparences, la mère est plus fragile que son fils. Elle sait la vérité et conçoit dans quelle situation affreuse ils se trouvent. C’est une fois à l’extérieur que l’édifice se brise, la maison mère vole en éclat. La deuxième phase est teintée d’une certaine ironie troublante à propos de l’isolement, car aussi bien dans la cabane que chez sa mère, Ma est seule et loin de tous. Finalement c’est toujours entre 4 murs qu’elle est prisonnière.
Le grand absent de toute cette aventure c’est le bonheur. Ma fera une réflexion là dessus, elle pensait qu’une fois sortie des griffes du Vieux Nick, il reviendrait, en vain. Elle traîne une forme de tristesse et de ressentiment envers ses proches. Le sentiment d’avoir été abandonnée pendant 7 longues années à cause de sa bienveillance quand elle a voulu aider son ravisseur à retrouver un chien inexistant, prétexte pour qu’il commette son crime. Elle a l’impression d’être inutile pour ce monde qui a continué de tourner. Ses parents ont divorcé, sa mère a retrouvé un concubin et ses amies du lycée ont continué leur vie. Brie Larson est juste et émouvante toute au long du film, tout comme Jacob Tremlay jamais lassant et très professionnel pour un enfant de cet âge.
Le réalisateur prend un parti pris intéressant dans le déroulement de son film. En effet, alors que d’autres aurait pu aborder la deuxième phase avec le jugement du criminel, Leny Abrahamson l’élude complètement. Le ravisseur disparaît de la circulation, il n’est cité que deux fois très brièvement. Une choix qui focalise l’attention sur ce binôme naturel sans être pollué par un homme qui a déjà brisé leur existence.