C’est la chronique d’une amitié fusionnelle née sur les bancs d’un lycée entre deux adolescentes aux antipodes l’une de l’autre : Charlie la discrète,(Joséphine Japy), a comme modèle une mère victime consentante des caprices d’un père macho ; Sarah l’exubérante, (Lou de Laâge), a largement pire comme modèle ce qui sans doute a fait d’elle cette perverse narcissique. Et c’est parti pour une immersion oppressante dans l’univers de ces adolescentes issues toutes deux de familles décomposées pour un meilleur décryptage du processus du harcèlement moral aux conséquences dramatiques. 

Loin de former une symbiose, cette amitié ne tardera pas à se révéler hautement toxique. Consciente de l’emprise qu’elle exerce sur son amie, Sarah se joue impunément de la vulnérabilité affligeante de cette dernière. Sauf que courber l’échine par sentiment, par fragilité face à un infernal harcèlement connaît aussi des limites. A plus ou moins longue échéance, arrive parfois le moment où l’ultime goutte d’eau fait gicler le verre. Les rôles s’inversent, la victime devient bourreau et vice versa. 

"Plus facile de renoncer à la passion que la contrôler, la maîtriser" pensait l’élève en cours de philo au tout début du film ; pour le coup aucune des deux options n’a été à la portée de Charlie emportée dans les turbulences de sa passion. 

La durée du film n’excède pas les quatre-vingt-douze minutes mais alors pour les supporter, certains ne tiendront probablement jusqu’à la fin qu’à coups d’auto-encouragements du genre, respire, respire, la délivrance approche ! Poussé à son paroxysme, ce jeu malsain, aux relents de "la vie d’Adèle", finit à la longue par en devenir caricatural malgré de belles prestations. 

La mise en scène quant à elle ne lésine pas du tout sur la dimension esthétique à grands renforts de jeux de lumières, de ralenti, de floutage, de réfraction…Elle s’apparente dans certaines séquences à un défilé à la fois inopportun et lent de ravissantes cartes postales donnant à contempler un essaim d’oiseaux, un visage, parfois deux, de préférence à travers l’embrasure d’une fenêtre, ou autres. Alors que le coeur n’y est vraiment pas !

Respire, adaptation d’un certain roman d’Anne Sophie Brasme résonne comme une injonction adressée  à Charlie l’asthmatique chronique, laquelle renouvelle ses crises d’étouffements sous l’effet de l’angoisse. Sur l’affiche, on voit pourtant Sarah en dominante prenant la vie à bras ouverts en inspirant goulûment l’air frais…

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