Non, Meetic, pas davantage que tout autre site de rencontres amoureuses ou amicales en ligne, n’est pas spécifiquement en cause. Mais ces sites de rencontres ne peuvent sélectionner, par élimination, que des personnes présentant plus ou moins bien et pas trop injurieuses dans leurs propos. Et comme tout flatteur vit aux dépens de celui qui l’écoute, ce sont les meilleurs partis qui font les meilleurs escrocs, et vous ruinent.

Selon une étude de l’université de Leceister, dont fait état The Daily Mail, près de 200 000 personnes fréquentant des sites de rencontre, basés au Royaume-Uni ou ailleurs, sont déjà victimes d’escroqueries aux sentiments. Rien que pour l’an dernier, 592 victimes ont été recensées, dont 203 y ont laissé plus de 5 000 livres, les records dépassant les 275 000.

Donc, finalement, Vicky Fowkes, qui n’a perdu que toutes ses économies, soit 40 000 livres, s’en tire « assez bien » ou moins mal que d’autres. Mais elle est sacrément secouée et a dû cesser son travail. À 59 ans, ce n’est pas une midinette se berçant de romances et d’illusions. Mais son prince était venu sous la forme d’un ingénieur britannique, un certain Hawkins, qui a su prendre son temps pour l’amadouer.

Elle en fait la connaissance à distance en avril 2010. Il se partage entre le siège de son employeur et un chantier au Nigéria.
Il a pris quatre mois pour attendrir la « viande »,  en fournissant des photos, des détails, et fixer un rendez-vous à l’aéroport d’Heathrow. C’est quand même plus sympathique que de faire venir le correspondant à celui de Moscou, depuis Charles-de-Gaulle-Roissy.

Trop de discrétion : portez plainte !

Puis, « Hawkings » persuade Vicky qu’il n’a pu embarqué, car bloqué en douane en raison d’un impayé fiscal. Impossible de faire un transfert depuis sa banque en Angleterre. En trois mois, arguant de prétextes divers, il se fait transférer près de 43 000 euros. Mais, le Daily Mail n’explique pas comment, l’escroc s’était fait repérer par la police, qui se présente au domicile de Mrs Fowkes, laquelle tombe des nues.

Cette pédagogue n’est pas particulièrement crédule, mais son « John », censé résider à Leicester, s’exprimant avec un léger accent sud-africain au téléphone ou en visio, doté d’une vieille mère qu’il chérit mais ne veut inquiéter avec ces histoires de fisc et de cartes bancaires volées, sait trouver réponse crédible à tout.

D’ailleurs, il est aussi patient que gourmand. Elle le repousse, il attend six mois pour lui faire livrer une gerbe de rose, téléphone le lendemain : il peut tout expliquer, mais il lui faut 685 livres pour un billet d’avion et enfin se jeter aux pieds de sa « promise ».  Cette fois, elle raccroche.

Robin Longmore, de la police du West Mercia, expose que les cibles sont souvent des personnes intelligentes, bien éduquées, mais que les escrocs, toujours plus nombreux, sont tout aussi sophistiqués. Selon Colin Woodcock, d’une branche spécialisée de Scotland Yard, ce seraient environ 80 millions de livres sterling par an qui partiraient ainsi du Royaume-Uni vers des destinations inconnues, rarement localisées avec précision.

Bien sûr, celles ou ceux qui n’y ont pas laissé leur chemise hésitent à porter plainte. Même les victimes les plus dépouillées, selon leur tempérament ou leur milieu social, préfèrent garder le silence.

Cyberattaques et autres…

Les candidats au mariage ou à la vie commune, les femmes seules désirant refaire leur vie, ont appris à se méfier des sites russes ou autres. C’est désormais via des sites européens ou nord-américains, principalement (mais aussi maghrébins et autres) que les escrocs opèrent, piquant des photos sur l’Internet pour incarner leur personnage.

Mais il est d’autres formes d’escroqueries plus sophistiquées, notamment via les listes professionnelles ou universitaires. Le truc consiste à emprunter l’identité d’une ou d’un abonné à une liste d’échanges d’informations ou de discussions, et d’adresser une demande urgente à un autre, et par mégarde, à l’ensemble des destinataires de la liste.

C’est par exemple Untelle, professeure assez réputée, qui se retrouve bloquée dans tel ou tel pays alors qu’elle doit rentrer au plus vite pour refaire ses bagages et repartir vers une conférence où elle est invitée. L’histoire est abracadabrante, et à chaque fois, l’ambassade est censée ne pouvoir rien faire pour le rapatriement d’urgence. Si la personne dont l’identité a été usurpée ne réagit pas très vite (avec ces listes, parfois, on lit ou pas les messages chaque jour), il y a de fortes probabilités que d’aucunes ou d’aucuns, la connaissant un peu, se laisse prendre. Ce qui permet d’empocher x fois la somme.

Le « courriel nigérian » classique, promettant un legs important, le transfert d’une forte somme d’argent, est tombé en désuétude. Mais de nouvelles formes, plus élaborées, d’escroquerie, se multiplient.

En France, Internet-signalement, dépendant du ministère de l’Intérieur, et le numéro 0811 02 02  17, permettent de donner l’alarme. Une liste de QCF (FAQ), liste les escroqueries dites 419 (à la nigérianne), les fausses ventes, le « pishing » et autres escroqueries à la carte bancaire. Et il y a bien sûr les robots de cyberattaques qui pompent, après balayage, les données de vos disques durs.

En France, on n’a pas de pétrole mais…

Il suffit de consulter les actualités récentes (moins d’une semaine) sur Google pour constater les dégâts en France, en Belgique, ou au Québec notamment. L’Est Éclair fait état d’une condamnation (vente de pièces automobiles fictives), La Semaine de l’Allier fait état d’une escroquerie ayant consisté à emprunter le logo de la gendarmerie nationale (fausse page HTLM réclamant 200 € pour régler une amende, faute de quoi l’ordinateur sera bloqué), L’Union signale les escroqueries croissantes au « site Internet clefs en main » gratuit qui ne se concrétisera jamais, mais dont l’hébergement sera payant, &c.

Parfois, le bien existe. Ainsi, rapporte L’Est républicain, c’est un policier messin qui fourguait des voitures volées, aux papiers falsifiés, à ses collègues des commissariats de Metz. Cinq policiers ont porté plainte (il n’est pas sûr que tous aient vraiment porté plainte…).

 

À Revin, Ardennes, relate L’Union, hier, c’est une affaire de chiot fictif qui a fini par coûter 800 euros. Le chiot était donné, mais il fallait le faire vacciner, puis dédouaner. Le coup du logo emprunté, cette fois à la police nationale, a servi à signaler qu’une correspondante était mineure et qu’il fallait régler une amende pour éviter des poursuites judiciaires. À Montluçon, il faillait payer cent euros pour s’éviter de se voir poursuivi pour téléchargements illégaux.

Il y a aussi la vente de contrefaçons, de fausses Rolex cessant de fonctionner entre deux jours et quelques mois, et à Jumencourt (Aisne), c’était tout un stock de sacs, accessoires, &c., de Prada, Clavin Klein, Dolce & Gabanna (en fait des Soldé & Chabada bâclés).

 

L’escroquerie au remboursement de trop-perçu est aussi fort courante. Vous avez aussi les faux sites d’intervention en bourse ou sur le marché des changes (Forex). Il y a aussi les faux billets pour des spectacles ou des rencontres sportives.

 

Dans le Grand Est, signalent L’Alsace et Le Pays de Franche-Comté (merci à Pascal Lainé de l’avoir signalé), les acheteurs de voitures en ligne se présentent et fournissent un faux chèque de banque, au filigrane contrefait. L’acheteuse, Vanessa M, serait une Lorraine, mais elle n’est pas encore identifiée. Les voitures revendues sont souvent déclarées volées à temps mais l’acheteur en est de sa poche.

Bref, une extrême vigilance s’impose. Présent en ligne depuis 1993-1994, je n’ai été qu’une seule victime d’une quasi-escroquerie semi-légale (le « mode opératoire » a été revu depuis, grâce à une meilleure signalisation sur le site concerné).

Wizzair, l’opérateur de transports aériens low cost, proposait de s’inscrire sur un site tiers afin de recevoir une réduction sur un prochain voyage.

Je n’ai jamais reçu le chèque, mais j’étais débité mois après mois d’une vingtaine d’euros. Je n’avais pas lu les petites lignes (désormais plus lisibles) qui m’engageaient à souscrire un abonnement pour bénéficier d’avantages dont je n’avais nul besoin. En revanche, je compte par centaines les messages reçus du Nigéria ou d’ailleurs, ceux de remboursement de trop perçu de SFR, &c.

Soyez vigilants. Pas forcément trop réactifs, vous risqueriez de saturer les lignes ou les sites de la police ou de la gendarmerie. Le fin du fin consisterait d’ailleurs de créer un faux numéro d’alerte, et d’empocher le prix des communications. Si j’y ai pensé, soyez sûrs que, dans un pays ou un autre, cela a déjà été mis en pratique…