Jeudi passé, 20h. J’arrive devant chez Eleina. Elle vient m’ouvrir la porte. Je découvre une petite femme  bien portante au visage de poupée, un sourire joyeux sur les lèvres.  Nous nous embrassons. Enfin nous nous rencontrons.

 

Eleina avait préparé une bonne soupe de légumes comme je n’en avais pas dégusté depuis des lustres. Il y avait également un tabouler de graines très fines qu’elle avait préparé elle-même, avec les légumes coupés en tout petit bout. C’était excellemment bon ! Mais alors sa tarte aux pommes ! Oh miam miam ! Je m’en régale encore le palais rien qu’au souvenir !

 

Eleina m’explique comme ça fait longtemps qu’elle souhaitait me rencontrer. La première fois qu’elle avait entendue parler de moi sur C4N, en consultant mon profil et en voyant la photo où je suis assise en cercle parmi des étudiants vietnamiens (en médecines traditionnelles), elle s’était dit : « Oh mais qui est cette illuminée ? » Et elle m’avait oublié quelques temps. Puis un peu plus tard, en découvrant une partie de mon parcours, elle a regretté d’avoir eu cette pensée et de ne pas m’avoir lu plus tôt… Alors elle n’a eu de cesse que de suivre mes aventures, jusqu’à son vœu de nous rencontrer. Chose faite aujourd’hui et j’en suis moi-même très heureuse.

 

21h30 : Eleina me dit qu’il est l’heure d’aller se coucher.

 

Eleina est née le 20 avril 1930, à Montceau Les Mines, dans le quartier Le Magny. Elle a 82 ans. Elle a donc connu la deuxième guerre mondiale, de ses 9 ans à ses 14 ans. Mon Dieu ! Quelle adolescence traumatisante ! Nous en avons parlé. Elle n’en a retenu que ce fut une période de privation et d’angoisse. Dans sa famille, elle a eu la chance de ne perdre personne autour d’elle, chose rare pendant cette guerre de l’horreur.

Mais un de ses cousins qui était dans le Nord a perdu la vue et ses deux avant-bras suite à l’explosion d’une grenade… Mais vous pourrez découvrir tout cela en détail le jour où Eleina publiera ses mémoires qui s’appellent « Le voyage de ma vie », car elle a commencé… Eleina a déjà écrit une bonne centaine de pages. J’ai eu l’honneur de l’aider à mettre ses textes en place (les remettre dans l’ordre car tout était dispersé) et de faire une relecture « orthographique » de ses quarante premières pages.

 

Pour résumer le tout, Eleina a passé ses vingt-huit premières années à Montceau-Les-Mines. Vous savez qu’Eleina était une chapelière ? Elle fabriquait des chapeaux ! Elle m’en a montré quelques-uns que j’ai été lui cherché tout au-dessus de l’armoire. Elle a du talent ! Dommage que ma tête était trop grosse, sinon j’aurai fait défilé de mode tout le long de mon séjour !

 

En 1958, Eleina quitte la France pour Dakar. Elle s’en va rejoindre son frère qui l’a invité, pour travailler comme secrétaire à la société SASTONE. Une société africaine de stores vénitiens. Elle y restera pendant 14 ans.

 

Le 1er mai 1972, elle revient en France à Montceau où elle y restera un an avant de partir pour Marseille, jusqu’en juin 2001 où elle retournera à nouveau à Montceau-Les-Mines qu’elle n’a plus quitté jusqu’à aujourd’hui, et où elle compte bien y rester pour y finir sa vie.

 

On voit que ce village lui tient à cœur. Elle m’en a fait faire le tour. J’ai eu le droit à ma petite visite guidée vendredi.

 

Samedi matin, nous sommes allées sur le marché chercher quelques légumes. C’est une bonne vivante notre Eleina, elle fait sourire tout le monde ! A midi, elle a fait une bonne ratatouille ! J’ai dû prendre deux kilos en deux jours avec tout ce que j’ai mangé. Mais qu’est-ce que c’était bon ! Je suis gâtée !

 

Nous avons été visiter la vieille église de Montceau à Le Magny. Eglise qui aurait dû être détruite, mais qui a été racheté pour une bouchée de pain par un souffleur de verre. Avec les fours, il y faisait bien chaud ! Ce fut intéressant à voir.

 

Eleina est une excellente couturière. Elle m’a fait un cadeau, un drap qu’elle a brodé elle-même… Magnifique ! Cette femme a vraiment du cœur. Elle m’a offert un parfum aux lilas (J’adore !) et de la crème pour le visage parce qu’elle l’avait en double m’a-t ’elle dit… Puis elle m’a dit qu’elle ne voulait pas que j’ai froid dans les montagnes l’hiver. Alors elle m’a donné un pull et un anorak avec un châle. Cette femme est vraiment attendrissante… snif…

 

Je la quitte avec un peu de nostalgie dans l’âme. On ne sait pas si l’on se reverra, alors nous ne faisons pas de projets. Ce que je sais, c’est que je ne l’oublierai jamais.

 

Merci Eleina pour m’avoir fait venir à vous, pour m’avoir reçu avec autant de chaleur. Ces quelques jours passés en votre compagnie m’ont fait du bien et je suis flattée que vous m’ayez conté votre histoire. J’ai hâte de vous lire à nouveau. Vous êtes une femme formidable !