Raffarin – un train de sénateur peut en cacher un autre

Ah c'est qu'il s'y voyait quand même bien tout là-haut, à la présidence du Sénat. L'inventeur de la France d'en bas briguait la haute assemblée, raté. Malgré une carrière débutée chez Jacques Vabre, il n'a pas su lire dans le marc sa cruelle destinée. Jean-Pierre Raffarin, jadis jeune giscardien est aujourd'hui un vieil homme politique à la dérive dont les engagements sont un à un remis en cause.


Le voilà même à s'interroger sur la suite de sa carrière lui qui pourtant fut jadis un joyeux cumulard. N'était il pas (frauduleusement) salarié de l'ANPE et chef de la cellule communication du cabinet du Ministre Stoleru ?

L'homme fort de la région Poitou-Charentes dont il fut le président du Conseil régional ne pouvait plus que fulminer, cette zone géographique constituant désormais le fief d'une ex candidate socialiste à la présidentielle…
Auteur d'une loi RAFFARIN, consécration d'un parlementaire, il avait abaissé de 1000 à 300 mètres carrés la surface au-delà de laquelle il est obligatoire d’obtenir une autorisation administrative pour ouvrir un supermarché. La loi de Modernisation de l'Economie vient exactement de réinstaurer l'inverse…
Le créateur de la journée nationale de solidarité avec les personnes dépendantes, le lundi de Pentecôte, sait depuis que ce jour est redevenu férié…
De désaveu en désillusion, l'élection sénatoriale paraissait une ultime chance de rebond.
Pourquoi le bonhomme ne s'est il donc méfié de ses "amis" tout autant que de ses ennemis politiques ?
Et si tout ça ne datait déjà de 2002 quand le Premier Ministre Alain Juppé le désigna
ministre des Petites et Moyennes Entreprises, du Commerce et de l’Artisanat ? Emporté dans une carrière nationale peut être trop large pour lui, il obtint même la consécration en devenant plus tard Premier Ministre oui, mais au détriment d'un certain… Sarkozy.
Depuis pourtant, après le retrait de son mentor Jacques Chirac il avait fait amende honorable ne manquant pas de voler même au secours du nouveau Président. Depuis les élections présidentielles et législatives de 2007, il sévissait même comme porte-parole de l'UMP dans de nombreux "meeting" et interventions télévisées. Car l'homme des raffarinades est aimé des médias qui espèrent toujours le voir sortir un bon mot. Mais la source s'est tarie et les formules ont lassé.
"Nicolas Sarkozy est un homme d'État qui assume ses choix" ; en devenant sérieux, Raffarin a perdu sa crédibilité.
Il avait certes savamment manoeuvré dés 2004 quand, depuis Matignon, il avait fait en sorte que le président sortant du Sénat, Christian Poncelet, soit prolongé dans ses fonctions un mandat supplémentaire, un voeu à exaucer, comme une promesse de succession prochaine.
Mais sur 152 votants, seuls 56 se sont rangés aux côtés de JPR… un rêve qui s'éloigne pour celui qui pensait avoir toutes les cordes a son arc, mais il est battu par… Larcher. Coup du sort !
C'est également et surtout ? un confort exceptionnel qui s'envole : faut il rappeler que l’indemnité parlementaire s’élève à 11 540 euros net par mois plus une “prime informatique” de 1 000 euros. Sans compter l' enveloppe d’un peu moins de 7 000 euros brut mensuel, pour rémunérer trois ou quatre “collaborateurs” personnels ; (30 % des sénateurs en profitent pour employer leur ­famille). Ou la voiture et appartement de fonction, la gratuité de La Poste, de la RATP et de la SNCF, la cinquantaine d’allers-­retours par an sur Air France. Coiffeur, courts de tennis, salle de sport, médecin, kiné sont à disposition comme la buvette où le verre de whisky est à 50 centimes ! Et la retraite commence bien à 60 ans. Pour vingt-cinq ans de mandat, ils touchent 6 000 euros, et pour quinze ans, le temps moyen des mandats, 4 000 euros.
Alors oui tout cela Jean-Pierre le voulait avec beaucoup d'ardeur, peut être trop. Soutenu, disait il, par l'ancien et le nouveau Président de la République, il paye ses amitiés impopulaires autant que sa décentralisation décriée par les élus locaux, ceux-là même qui sont majortitaires au Sénat…
L'heure est à la solitude, le début d'une longue marche en quelque sorte qui pourrait le mener en Chine, civilisation qu'il admire tant. A moins qu'il ne préfère les vastes étendues canadiennes.
Ou qu'un mandat de Commissaire européen délicatement offert ne le conduise à Bruxelles.
Dans tous les cas, il mesurera sans doute combien il lui est arrivé quand même d'être clairvoyant : "L’eau trouble en amont a peu de chances d’être claire en aval" disait-il, au regard de son parcours politique ce n'est guère encourageant pour la suite…