«Mon engagement a commencé lorsque j’avais 13 ans, très exactement le 4 avril 1968», explique le réalisateur américain Michael Moore. «J’étais à la messe avec ma famille lorsqu’un homme est entré dans l’église et a crié «Martin Luther King a été tué à Memphis». Tout autour de moi, les gens se sont mis à applaudir et à crier de joie ! Moi, j’étais dégoûté. C’était encore l’époque des discriminations raciales.»
Michael Moore est probablement le cinéaste le plus à gauche d’Hollywood. Le réalisateur de «Bowling for Columbine» et « Capitalism : A love story » dépeint au vitriol les compagnies américaines en quête de profits.
Michael Moore, malgré ses 56 ballets, reste survolté comme le plus rebelle des adolescents. On se rappelle, lors d’une cérémonie des Oscars, devant le gratin du cinéma, qu’il s’était lancé dans une violente diatribe contre la politique du président américain en Irak. «Honte à vous, monsieur Bush», avait-il crié. «Le Pape est contre vous. Vous êtes fini !» De passage en France, il avait alors déclaré que «ceux qui ont ruiné des sociétés comme Enron et Worldcom, laissant des milliers de travailleurs sur le carreau, ont financé les criminels qui logent aujourd’hui à la Maison-Blanche».
«Je n’ai jamais eu ma langue en poche», reconnaît-il rétrospectivement. «Dès le collège, cela m’a valu des problèmes. Avec des copains, nous avions même pensé nous enfuir au Canada. C’était la guerre du Vietnam et nous ne voulions pas participer à la boucherie. Dernièrement, des représentants officiels du gouvernement Bush m’ont qualifié d’ennemi public. Cela n’a fait que renforcer ma notoriété auprès des millions de compatriotes qui sont exclus du rêve américain.»
Outre quelques hommes politiques, Michael Moore s’est mis à dos une partie du monde industriel américain. «J’ai été poursuivi vingt-trois fois en justice par des compagnies gênées par mes écrits ou mes reportages. Par vingt-trois fois, j’ai gagné mon procès devant la cour.»
Loin d’être totalement contemplative, la caméra de Michael Moore parvient aussi à modifier certains destins. La multinationale Nike a notamment mis fin, après la diffusion de «The Big One», au travail des enfants dans ses usines indonésiennes. Personne ne réussira à me faire taire», poursuit l’indécrottable anarchiste. «Ce n’est pas pour rien que mon deuxième prénom est Thomas, comme l’utopiste Thomas Moore. J’espère cependant que je ne finirai pas comme lui (décapité). En attendant, je n’ai pas fini de faire parler de moi !» Caméra au poing (son arme favorite), images trempées dans le vitriol, Moore promet de nous revenir plus enragé que jamais.
Un paradoxe pour un homme qui a la violence en horreur et qui exprime, au travers de son art, un dégoût absolu pour les armes à feu.