Dominique Strauss-Khan au sommet de Pittsburgh.

 

Aux États Unis, une loi de protection de la victime, connue sous le nom de « Rape Shield Law » – ou loi bouclier sur le viol-, a été votée en 1975. Cette législation interdit à la défense d’interroger la plaignante sur sa vie sexuelle passée, le nombre d’hommes avec lesquels elle couchait, ses pratiques sexuelles… Cette loi a obligé la justice pénale à se concentrer, exclusivement, sur les faits jugés, pas sur le reste, car il est inacceptable que les femmes soient soumises à une véritable torture morale. Et dans le cadre d’un procès et pour le cas Dominique Strauss-Kahn, celui-ci est débuté dès l’instant où sept chefs d’inculpation lui ont été notifiés formellement le 16 mai 2011. De plus, selon l’accusation, « Dominique Strauss-Kahn pourrait être accusé de faits similaires, à au moins une reprise, sans donner plus de précisions sur l’affaire.(1) »


Mais qu’ont fait les avocats et les communicants de Dominique Strauss-Kahn ? Sans aucune honte, ils sont « allés fouiller » dans le passé de la plaignante et ils ont arboré de grands titres de « Unes » et étalé dans toutes les presses et tabloïds mondiaux des groupes Lagardère et consorts, Hearst Corporation et Murdoch aux ordres d’EuroRSCG Worlwide(2), avec la complicité manifeste des journalistes à solde agissant tels des perroquets et publiant des articles formatés, – les pseudos-résultats, « arrangés et accommodés à la sauce de la Firme(3) », présentant Nafissatou Diallo telle une menteuse et une prostituée -, scandant au complot et faisant l’éloge de Dominique Strauss-Kahnn, jusqu’au choix des mots, – « Toute cette histoire ne lui ressemble pas… » -, appelés dans le monde de la communication « des éléments de langage » signés Stéphane Fouks et son équipe d’EuroRSCG.


Dans la presse française et dans les tabloïds étrangers, les « mensonges » dans lesquels se serait commise Nafissatou Diallo, accablants, pénalisants, accusateurs et, – documentés anonymement-, diffamateurs, pullulent et encombrent les pages des quotidiens, des hebdomadaires, des journaux télévisuels, radiophoniques et web. Les recenser tous, tant ils sont pléthore dans la démesure, l’exagération et l’outrance, – la plaignante passant de l’image d’employée modèle à celle de manipulatrice -, serait vain. Pour les principaux, même si son avocat Kenneth Thompson a pu reconnaître que sa cliente avait commis des erreurs par le passé, et non par le présent depuis son installation définitive aux États-Unis, il est seulement utile de signaler que :

– veuve et mère d’une fille de 15 ans, elle mènerait une « double vie » et aurait épousé, religieusement, un Gambien, rencontré dans le Bronx, et incarcéré pour trafic de drogue ;

– plusieurs versements inexpliqués, en liquide, – blanchiment d’argent sale -, sur un compte bancaire ouvert à son nom, avoisineraient les 100.000 dollars depuis deux ans :

– elle ne posséderait pas moins de cinq abonnements téléphoniques ;

– elle serait une quasi-prostituée « habituée à avoir des relations tarifées avec des clients du Sofitel » et, bien plus, une source proche de l’accusation, – l’anonymat aidant à tenir des propos diffamatoires -, aurait assuré qu’elle aurait continué à recevoir des hommes dans l’hôtel de Brooklyn où elle a été mise à l’abri, notamment des clients du Sofitel ;

– après avoir plusieurs fois expliqué être restée prostrée dans un recoin de l’hôtel, attendant que le client quitte la suite 2806 pour prévenir ses supérieurs, l’employée aurait finalement raconté, le 28 juin, qu’elle aurait nettoyé une autre chambre avant de se confier ;

– les autorités auraient appris, par une conversation enregistrée, qu’un homme « disant connaître » Nafissatou Diallo aurait eu un échange avec un autre homme soupçonné de trafic de drogue ;

– s’exprimant en fulani pour certains, en peul pour d’autres, un dialecte guinéen, elle aurait déclaré, à son interlocuteur détenu dans un centre pour immigrants illégaux en Arizona : « Ne t’en fais pas, ce type a beaucoup d’argent. Je sais ce que je fais… » ;

– le récit de son immigration aux États-Unis aurait, lui aussi, beaucoup fluctué : Elle et son premier mari auraient subi les exactions de l’armée guinéenne et elle-même aurait été violée. Et elle aurait admis que les détails lui auraient été suggérés pour renforcer sa demande d’asile déposée en 2004… :

– elle aurait minoré ses revenus, et aurait déclaré un second enfant à charge, pour conserver son logement social ;

– elle se serait embrouillée en donnant plusieurs versions contradictoires des circonstances de l’agression supposée ;

– elle aurait menti sous serment devant « le grand jury » constitué pour inculper l’accusé.

– dans les premiers temps, la jeune femme aurait bien collaboré, mais, le 9 juin, une audition aurait mal tourné et sa fille, qui l’accompagnait, aurait même entendu des cris : « Sortez d’ici, sortez d’ici! », provenant des bureaux…

– etc. etc. etc., des pages entières seraient nécessaires pour les recenser tous.


Face à l’afflux de tous ces mensonges, la crédibilité de « l’employée modèle » du Sofitel s’en serait, alors, trouvée sérieusement entamée et l’accusation aurait été contrainte de le dire publiquement. Le 30 Juin 2011, une lettre à en-tête « Cyrus R Vance Jr, District Attorney », de trois pages, à propos de mensonges proférés sous serment par Nafissatou Diallo, signée par deux assistants, – Joan Illuzzi-Orbon et Jhon Artie McConnell -, du District Attorney, mais pas par le District Attorney lui-même, a ainsi été adressée conjointement aux avocats de Dominique Strauss-Kahn, William W. Taylor, – Cabinet d’Avocats Zuckerman Speader LLP -, et Benjamin Brafman, – Cabinet d’Avocats Brafman et Associés -, et au « Très honorable Michael J. Obus, Cours Suprême de l’État de New York. »


Cette lettre est bien étrange car un « plausible conflit d’intérêts », ayant pour origine le fait qu’une des adjointes du bureau du procureur est mariée à l’un des avocats de Dominique Strauss-Kahn, existerait entre l’ex-Directeur Général du Fonds Monétaire International et le bureau du District Attorney. En outre, le bureau, par le truchement de Daniel Alonso, adjoint du procureur, serait « apparemment responsable de fuites répétées et préjudiciables, dans les médias, qui visaient à discréditer la réputation de la victime, voire, et c’est peut-être le plus grave, à ébranler les charges qui pèsent contre Dominique Strauss-Kahn(4) », une divulgation des informations dommageables à Nafissatou Diallo, qualifiables en « déni des devoirs et des responsabilités d’un procureur.(5) ». En outre, alors qu’il en a fait suivre copie et au New York Time et aux avocats de Dominique Strauss-Kahn, le bureau du procureur n’a pas remis, à l’avocat Kenneth Thompson, un enregistrement d’une conversation téléphonique entre Nafissatou Diallo et un détenu, à qui elle disait que « cet homme avait beaucoup d’argent » et qu’elle « savait ce qu’elle faisait. » Et enfin, le chef de l’Unité des Crimes sexuels de la police new-yorkaise, Lisa Friel, a démissionné au lendemain même de l’envoi de la lettre au juge Michael J. Obus et aux avocats de Dominique Strauss-Kahn, William W. Taylor et Benjamin Brafman.


Dans certains pays africains, la perte de crédibilité de la femme de ménage du Sofitel et les doutes sur sa parole résultant des « faux-vrais mensonges » et des « vrais-faux mensonges » qui ont conduit à la levée de la résidence surveillée de Dominique Strauss-Kahn et à la restitution de la caution d’un million de dollars, interpellent d’autant que « la gloire, l’argent, les relations, les réseaux et les compromissions » ne semblent pas étrangers à la décision prise par le juge Michael J. Obus :

– Dans une tribune éditoriale, le journal tunisien « Le Temps » demande, espérant voir tomber les tabous du « harcèlement sexuel et délit de cuissage », « A quand le grand déballage ? » car, rajoute-t-il, prémonitoire, « qui, en Tunisie et dans tout le monde arabe, ose aborder de telles questions restées forcément taboues et exposant toujours celui qui ose lever ces interdits à des poursuites déchaînées, revanchardes et implacables ! »

– Le « Mail&Guardian », un journal sud-africain, interpelle ses lecteurs par une série de questions soulevées par le scandale planétaire. « Comment se défend-on… », écrit-il, « …dans une affaire de viol si l’on a été amené à mentir, pour sauver sa vie, par le passé et si une femme est sexuellement active ? Comment combat-on, dans une affaire de viol, quand on espère être prise au sérieux et être perçue comme autre chose qu’une victime de viol ? » Il conclue l’article d’un cinglant : « Le scandale Dominique Strauss-Kahn a ébranlé le monde. Il a posé des problématiques liés au sexe, à la puissance, à la race, à la classe sociale et au genre. Cela va au-delà de gagner ou de perdre dans ce procès particulier. Les enjeux sont beaucoup plus élevés. Ce procès est un moment stratégique qui indique la direction dans laquelle nous nous dirigeons, vers le changement ou vers plus d’abus et de perdition. »

– En Ouganda, le chroniqueur du « New Vision » n’est nullement surpris. « De toutes façons… », assène-t-il, « …c’était perdu d’avance, non pas parce que le viol n’aurait pas eu lieu… », mais parce qu’il « n’est pas rare que des immigrés racontent tout ce qui peut leur permettre de garder un pied dans leur nouveau pays. Si aujourd’hui on inventait une machine à détecter les histoires mensongères des candidats à l’immigration dans les nations occidentales, des centaines de millions de gens… », – même au plus haut niveau États-unien, l’occupant de la Maison Blanche est descendant d’émigré ghanéen -, « …seraient contraints de rentrer dans leur pays d’origine… En tant qu’immigrée africaine qui mène une vie dérisoire dans les rues de New York, Nafissatou Diallo a été plus susceptible de connaître deux ou trois personnes qui ont des démêlés avec la justice. Cela ne signifie pas, pour autant, qu’elle-même était ou est une tricheuse, une menteuse et une complice. » Sur ce point, Dominique Strauss-Kahn, avec toutes les affaires politico-financières pour lesquelles il a été poursuivi, ne peut en dire autant. Il est vrai, avec la complaisance des juges et la bénédiction de la justice, malgré les millions de francs escamotés, elles se sont toutes achevées par des non-lieux, des relaxes, des blanchiments, – mais le blanchiment d’argent détourné illicitement n’est-ce pas un délit condamnable ? Que dire, lors des juges qui, par leurs rendus iniques, ont avalisé des enrichissements personnels ? Juridiquement, ils ont fait acte de complicité et auraient dû être poursuivis… comme tel-, et des plaintes, à son encontre, classées sans suite.


Les avocats et les communicants de Dominique Strauss-Kahn, en violation de la loi de protection de la victime et véritable bouclier sur le viol, connue sous le nom de « Rape Shield Law », une loi transgressée, de même, par le bureau du District Attorney et le juge Michaél J. Obus, ont « fait passer » Nafissatou Diallo pour une menteuse, une prostituée et une délinquante sur des faits autres que des faits jugés… Si tel en est et si la violation de la loi, à l’encontre de la victime, fait loi, en toute illégalité, pour le présumé coupable, que dire, en revanche, frisant le ridicule, sur le nombre de versions « vendues à l’encan » par la défense américaine de Dominique Strauss-Kahn et par le prévenu lui-même ?


Le plus insipide de ces mensonges a été proféré par l’ex Directeur Général du Fonds Monétaire International qui a tenté, lors de son arrestation, de se dérober plusieurs fois à la justice, étant persuadé qu’elle le protégerait des poursuites, en invoquant son immunité diplomatique. Mais, même s’il avait bénéficié de la réduction accordée à l’institution internationale par le Sofitel, – 500 et quelques dollars au lieu de 3.000, la facture adressée et prise en charge par le Fonds Monétaire International tout en n’étant pas en mission à New-York les 13 et 14 mai 2011-, il avait occupé la suite « à titre personnel. » En outre, le rapport de police passe sur les pressions que Dominique Strauss-Kahn a tenté d’exercer auprès de la Special Victims Unit, – le SVU -, en charge des crimes sexuels. Enfin, après avoir « avoué qu’il aurait parlé si ses avocats ne lui avaient pas conseillé de se taire », puis « avoir nié connaître Nafissatou Diallo », la présence de « liquide séminal » en démontrant le contraire, il a opté, ayant une idée précise de ce qu’il ne pourrait pas contester, pour une version médiane, « le rapport sexuel consenti » et, ainsi, plaider l’option « non coupable. »


De même ses avocats, Benjamin Brajman, – ex-procureur adjoint du District Attorney de Manhattan, outre une actuelle adjointe du procureur Cyrus Vance mariée à un défenseur de Dominique Strauss-Kahn, ne serait-ce pas un nouveau type d’ingérence et plausible conflit d’intérêts… favorisant les fuites opportunes et plus si affinités…-, et William Taylor, dans cette affaire ne font-ils point preuve de mythomanie patentée ? Après « avoir dépensé des fortunes » en engageant des détectives privés, tous salariés des sociétés de communication EuroRSCG Worlwide et EuroRSCG, –EuroRSCG de Stéphane Fouks rémunéré par le Fonds Monétaire International -, après avoir fait les poubelles de Guinée, du Ghana, du Sénégal, de Côte d’Ivoire… – Alpha Condé, John Atta Mills, Abdoulaye Wade, Laurent Gbagbo… étant tous des clients de dite société, du groupe Bolloré ou du groupe Havas-, et des États-Unis, les avocats de Dominique Strauss-Kahn ont fait un communiqué pour déclarer que leur but n’était pas de « salir » la jeune Guinéenne. D’autant que s’engageant à plaider non coupable et acceptant de vivre un procès, la défense s’arrogeant tous les droits au travers des « coups » les plus illicites, les plus usurpatoires et les plus ignominieux, peut-on imaginablement croire à cette légende ?


Et, depuis le 14 Mai 2011, les avocats Benjamin Brajman et William Taylor, des amis du magnat de la presse australo-américain Ruppert Murdoch et des groupes, propriétaires de tabloïds aux États-Unis, Hearst Corporation et Lagardère Publishing, ne cessent, ne reculant devant rien, multipliant les abjections, les actes diffamatoires et, avec dédain, « foulant aux pieds », en toute impunité, la loi de protection de la victime, le « Rape Shield Law », de mentir, de mentir et de mentir encore. A ce fait, un proverbe ne dit-il point : « Passer son temps à chercher à dénigrer les autres est preuve de faiblesse et de manque d’argumentation… ? »


Notes.

 

(1) « Dossier spécial DSK », Planet, le 16 Mai 2011.

(2) Mercédes Erra Directrice Générale Havas et Présidente exécutive d’EuroRSCG Worlwide, et Stéphane Fouks Directeur Général Havas et Président exécuteur d’EuroRSCG.

(3) « A la Une, les bons résultats de la croissance française », Radio France International. Gilles Moreau du 14 mai 2011. « Le Monde, lui, a enquêté sur « la bande des quatre de Dominique Strauss-Kahn ». Ils ont pour noms Stéphane Fouks, Ramzi Khiroun, Gilles Finchelstein et Anne Hommel. Tous quatre sont salariés d’EuroRSCG Wordwide, l’une des grandes agences de communication mondiales, coprésidée par Mercédes Erra et Stéphane Fouks. Tous les quatre forment les conseillers en stratégie autant que la garde rapprochée du probable candidat à la présidentielle. Or, au Parti socialiste… » où certains les dénomment la Firme, « …on se méfie d’eux : un peu trop voyants, brutaux parfois, amateurs d’intox dans les médias et de mélange des genres entre politique et affaires. Et plus que tout… », ajoute Le Monde, on leur reproche de « …renforcer Dominique Strauss-Kahn dans ses défauts supposés : train de vie trop ostentatoire, négligence à l’égard des élus et distance pour les milieux populaires ».

(4) et (5) « Affaire Strauss-Kahn : le procureur de Manhattan refuse de se récuser », Radio Canada International du 6 juillet 2011.

 

Suite de l’article ; « Plus pourri que moi, je meurs… », Acte XVII : Politiques, justice et communicants 6

 

Précédents articles concernant le même sujet :

« Plus pourri que moi, je meurs… »

« Plus pourri que moi, je meurs… » Acte II : Les politiques, la justice et les think thanks 1.

« Plus pourri que moi, je meurs… », Acte III : Les politiques, la justice et les think thanks 2.

« Plus pourri que moi, je meurs… », Acte IV : Les politiques, la justice et les think thanks 3.

« Plus pourri que moi, je meurs… », Acte V : Les politiques, la justice et les think thanks 4.

« Plus pourri que moi, je meurs… », Acte VI : Femmes, vieilles affaires et communicants 1

« Plus pourri que moi, je meurs… », Acte VII : Femmes, vieilles affaires et communicants 2

« Plus pourri que moi, je meurs… », Acte VIII : Femmes, vieilles affaires et communicants 3

« Plus pourri que moi, je meurs… », Acte IX : Femmes, vieilles affaires et communicants 4

« Plus pourri que moi, je meurs… », Acte X : Femmes, vieilles affaires et communicants 5

« Plus pourri que moi, je meurs… », Acte XI : Femmes, vieilles affaires et communicants 6

« Plus pourri que moi, je meurs… », Acte XII : Politiques, justice et communicants 1

« Plus pourri que moi, je meurs… », Acte XIII : Politiques, justice et communicants 2

« Plus pourri que moi, je meurs… », Acte XIV : Politiques, justice et communicants 3

« Plus pourri que moi, je meurs… », Acte XV : Politiques, justice et communicants 4