Plongée dans l’univers burtonien




L’actualité des expositions est trustée depuis quelque jours par l’une d’entre elles rendant hommage à l’un des plus merveilleux réalisateurs sachant nous entraîner dans son univers fantasmagorique peuplé d’êtres étranges et fascinants. Un monde où les méchants ne sont pas ceux que l’on croit et les gentils ne sont pas si aimables. Un monde sombre et enchanteur où il fait bon s’y rendre le temps d’un film… ou bien celui d’une exposition.

 

Jusqu’au 5 aout prochain, à la Cinémathèque de Paris, vous pourrez arpenter les couloirs tout en admirant les quelques 700 œuvres qui y sont présentés. Des dessins, des croquis, des costumes ou encore des marionnettes nous transposent dans l’esprit du réalisateur. Le cheminement est étudié de la sorte qu’il nous entraîne dans son processus créatif, nous amenant à la sortie avec la frustration de ne pouvoir embarquer son le bras une de ces pièces de collection.

 

Mais qui est Tim Burton, ce maître du gothique et du macabre et qui a su redonner ses lettres de noblesse à ce courant laissé en désuétude depuis Edgard Alan Poe ?

 

Le petit Tim est né à Burbank en Californie lors du mois d’août 1958. En plein été, le soleil californien tape fort sur les terres de l’état et il y a peu d’obscurité. Les seuls endroits au frais et à l’ombre sont les salles de cinéma. Une vraie mine de trésors et de richesses culturelles que le petit Tim va extirper pour se forger la sienne. Il y découvre les classiques du cinéma d’horreur et des monstres gigantesques. Il passe des heures confortablement assis dans les fauteuils des salles locales et aligne les séances devant la toile blanche sur laquelle sont projetés Godzilla, les films de la Hammer, les Frankenstein, les films d’OVNI, etc. Tant de références que l’on retrouvera par la suite.

 

Tim est enfant solitaire et introverti, il ne se sent pas en phase avec son univers, il a besoin de s’évader et pour l’instant cela se fait par le dessin et l’écriture. Il est doué, très doué, son talent est reconnu par son entourage qui le pousse à faire des études d’Arts à l’Institut californien. Il obtient ses diplômes comme une simple formalité et Disney se penche sur son cas. L’enseigne aux grosses oreilles, à cette époque, fin des années  1970,  est en pleine crise et recrute à tout va, ne vérifiant pas si l’univers des dessinateurs se marient avec le leur. La relation entre les deux tourne court, les divergences artistiques à force d’avorter les procès trop noirs et trop morbides de Burton, le force à claquer la porte.

 

Les hommes talentueux sont convoités, immédiatement après franchit la porte de Disney, il rentre à la Warner Bros. On lui propose l’adaptation de Pee Wee Big Adventure et une collaboration avec Danny Elfman. Les deux hommes devaient se trouver, leur association restera indéfectible pendant plusieurs années malgré un passage nuageux. Pee Wee où les péripéties d’un enfant dans un corps d’adulte est un succès. Enfin vient le grand jour, les directeurs de la Warner lui débloque des fonds pour mettre en scène une de ses créations personnelles, Beetlejuice. Une histoire morbide, poétique et teintée de comédie avec des acteurs performants font du film un nouveau succès.

 

Il est l’heure de passer aux choses sérieuses, la Warner fait confiance à son nouveau poulain, elle lui confie les clefs de l’adaptation d’une série mythique, Batman. De nombreux projets ont été esquissé mais nuls n’ont jamais vu le jour, ils sont restés à prendre la  poussière dans les tiroirs des scénaristes. Malgré les protestations des puristes outrés par tant de remaniements, le film sort sur les écrans. Tim Burton sait redonner vie à l’œuvre, le merveilleux, l’enchantement et le gothique sont de la partie. On se rappelle tous de Jack Nicholson en Joker dans une prestation aliénante lui collant parfaitement à la peau et pourtant les rôles de fou, il en a joué à la pelle. Trois ans plus tard, il réalise brillamment la suite avec deux nouveaux ennemis, des méchants pleins de noirceurs, faisant de l’ombre au justicier de Gotham City. Le Pingouin et Catwoman sont incontestablement les vedettes de ce second opus couronné lui aussi par des millions de dollars au box-office.

 

De nouveau le succès et nouveau film personnel. Edward aux mains d’argent, est un film où il se livre comme dans une psychanalyse, il fait part de ses souffrances enfantines et de ses états d’âmes. Edward, cette étrange créature aux mains d’argent, c’est un peu Tim avec ses crayons et ses dessins. Un véritable conte et un manifeste pour la tolérance que l’on peut narrer à nos enfants. L’œuvre est également la première collaboration avec son acolyte et ami, Johnny Depp.

 

Les deux hommes poursuivent leur aventure artistique dans Ed Wood,  révérence réussie au « plus mauvais réalisateur de tous les temps », Sleepy Hollow, legende noire d’un cavalier privée de tête et qui a envie de faire partager son manque en étêtant à tout vau-l’eau, Charlie et la Chocolaterie, adaptation de la nouvelle de Roald Dahl, Les Noces Funèbres où Johnny Depp apparaît sous les formes d’une marionnette tout en lui prêtant sa voix, Sweeney Todd, récit macabre d’un barbier sanguinaire faisant jouer ses rasoirs en argent pour assouvir sa terrible vengeance et Alice aux pays des Merveilles, adaptation du roman de Lewis Caroll où Tim Burton transpose son univers gothique.

 

A côté de cette association fructueuse, il a supervisé de près un étrange Noel d’un certain Monsieur Jack, il a tourné l’invasion de martiens hostiles voulant devenir nos amis tout en nous désintégrant de leur rayon laser, s’est perdu dans un film commercial, une commande pour les studios, relatant la domination simienne sur une minorité d’hommes oppressés et s’est livré une nouvelle fois dans un film aux aspects autobiographiques, un deuil cinématographique, le retour sur sa vie d’un père mourant où la magie tutoie la réalité.

 

Tim Burton est un cinéaste reconnaissable, il vous suffit de voir un de ses films pour reconnaitre sa touche artistique. Des éléments récurrents permettent de vous aider, les spirales, les éléments du décor tordus, les personnages solitaires ou encore la place de l’enfance dans la vie actuelle de nos héros. Un génie qui ne peut nous laisser indifférent, un maître dans son domaine. Afin de clore l’article, un message pour les fans, son prochain film sort sur les écrans français le 9 mai, prenez vos crayons et vos agendas pour y inscrire en grosses lettres son titre : Dark Shadows