Pour la seconde fois, devant un tribunal, Michel Dubec, expert psychiatre devant la Cour de cassation et auprès d’autres ressorts, obtient « réparation » de Dame Justice. Ce n’est point à Riom-sur-Seine, mais à Paris que Brigitte Brami, son ancienne patiente, a été condamnée de nouveau à quinze mois de détention pour harcèlement à l’encontre de Michel Dubec, psychiatre devenu psychanalyste. Un mandat d’arrêt a été délivré à la suite du prononcé du délibéré.


Pourquoi, tout à coup, me suis-je mis à penser au Dresde de Kurt Vonnegut Junior ? Pourquoi ai-je revu en pensée Helma Sanders Brahms, la réalisatrice de Deutschland, Bleiche Mutter (Allemagne, mère blafarde), telle que je l’avais côtoyée ? Pourquoi soudain ai-je imaginé la soldatesque « alliée » (soviético-franco-américano-britannique) se ruer sur la vaincue à dépecer et ai-je fantasmé un Riom-sur-Seine ? Allez savoir. C’est totalement subjectif. Outrancier, onirique, voire autoanalytique. On peut tout dire, tout écrire, n’est-ce pas, quand on se projette ? Sachons raison garder et n’allons pas mêler Jean de La Fontaine à des débats judiciaires qui disent le droit, et non la morale, ou l’émotion.

Nous avions, à ma gauche, Michel Dubec, médecin psychiatre, psychanalyste, ancien boxeur, habitué des salles de musculation, avec pour entraineuse Chantal de Rudder, ancienne redcheffe du Nouvel Observateur, et à ma droite, Brigitte Brami, petite femme un peu « grassouillette » (selon  les termes de Chantal de Rudder), environ 1 m 55 à hauteur d’aisselle du Modulor du Corbusier, soutenue par l’association Sos-Sexisme, sa soigneuse ; et là, il s’agit de faits.

Il semblerait qu’en deux instances et en deux reprises Mes Coutant-Peyre et Thierry Levy aient fait valoir que le boxeur (trois références à sa prestance ou à ses qualités pugilistiques dans son livre du Seuil, cosigné avec Chantal de Rudder, Le Plaisir de tuer) aurait un peu cogné et estourbi son adversaire, Brigitte Brami, condamnée pour les mêmes voies de  fait, soit une sorte de rixe, une première fois à quinze mois de détention. Ils avaient produit des pièces, des certificats. Mais elle avait, semblerait-il, agressé avec préméditation, dans le hall de son immeuble où il exerçait ses consultations (drôle d’endroit, mais l’électricité doit être payée par la copropriété, ceci expliquant peut-être cela), Michel Dubec, qui avait été autrefois son médecin psychiatre traitant. Elle fut estourbie, il obtint un certificat médical pour deux jours d’interruption temporaire de travail au titre de l’exercice de sa légitime défense qui l’avait quelque peu moralement commotionné (pensez, être obligé de frapper une demi-portion, c’est traumatisant, non ?). Elle fut une première fois condamnée à 15 mois de détention, interjeta appel, et finit  par effectuer près de six mois à la prison des femmes de Fleury-Mérogis.

Là, on lui reprochait d’avoir envoyé à Michel Dubec trois cartes postales d’hommes nus. Adressés à son adresse, à son nom. Et assorties de commentaires peu amènes ou d’une ironie malséante. Lors de la même période pour laquelle elle avait été déjà condamnée. Période où elle se sentait mal, pendant laquelle elle n’allait pas trop bien, ce qui ne regardait qu’elle-même. Mais les deux affaires ont été dissociées et cette fois, elle se voit infliger 458 jours de détention, avec mandat d’arrêt délivré à l’issue du prononcé du délibéré. Elle a fait appel, ce n’est pas suspensif.

Peut-être lui reste-t-il la requête auprès de notre bon maître, le futur prix Nobel d’économie et archevêque de Paris, Jean Sarközy. Car, c’est sûr, si notre bon prince savait cela, il s’étonnerait. Il guérirait ces écrouelles judiciaires, voire réconcilierait les parties.

Pour le moment, Michel Dubec, objet d’une dizaine de plaintes devant le Conseil de l’Ordre des médecins, sur, semblerait-il, une centaine de déposées et estimées non recevables (dixit divers membres du barreau dont Mes Vuillemin ou Coutant-Peyre), n’a pas un encaissé un seul point, un seul jour d’admonestation. Bravo le welter ! En combat libre ; chacun est libre, n’est-il pas ? La justice départage et arbitre au final. Bref, Brigitte Brami s’est inclinée, mais elle fait preuve de bien peu de sportivité. Il y a une glorieuse incertitude du sport judiciaire : rien n’est décidé par avance. Or, selon les déclarations de Brigitte Brami recueillies à chaud, on sent comme un relent – déplacé, inconvenant – d’amertume.

« Aujourd’hui, 15 octobre 2009, le délibéré a été prononcé. Il y a, dans cette affaire, deux perdants et un gagnant. On a deviné qui est le gagnant. La perdante, c’est moi, mais la plus grande perdante, c’est la justice française. Elle voit très clair. La loi est supposée faite pour affranchir le faible, mais c’est le contraire qui se vérifie trop souvent. Rendons la justice aveugle, de façon à ce qu’elle ne puisse distinguer le faible du puissant… ». Elle dit cela encore un peu sonnée, mais on sent que c’est réfléchi. Mauvaise perdante ! Et puis d’abord, c’est absurde. Affublerait-on les juges, les procureurs et les avocats de perruques qu’ils cultiveraient leur accent pour se distinguer et marquer leurs différences. Devrait-on les contraindre à des scansions de robots ? Cela nous rapprocherait-il d’une justice immanente ? Et puis, la réduirait-on à jouer à colin-maillard que la justice ne perdrait pas son flair : entre la sueur de qui a connu la geôle et les effluves de l’eau de Parme, qui s’y trompe ?

L’entourage de Brigitte Brami fait preuve, lui, d’un singulier aveuglement :  le ressentiment pervers serait à chercher du côté de Michel Dubec. Lequel s’acharnerait à obtenir pour son ancienne patiente des peines habituellement réservées à des ex-conjoints particulièrement brutaux, violents, tabassant des femmes dépourvues de moyens de répliquer, de parer les coups. Pas du tout ! Il y a, chez Michel Dubec, un côté chevalier blanc. Ou Mister Muscle (en français, Monsieur Propre). Et si on cherche la tornade blanche, celui qui sait pourtant d’habitude réfréner la « taloche » qui peut envoyer un « macho d’opérette contre le mur » (page 139 du Plaisir de tuer), ben, il se lâche. Il cogne. Rien de pervers là-dedans. Où vont-elles, où vont-ils donc chercher tout cela ? Mais, attention, par la suite, remis du coup de l’émotion, il tabasse avec des gants. Selon les règles. D’ailleurs, le parquet, le ministère public, suit ou outrepasse les conclusions que ses conseils déposent. Va-t-on le tenir pour responsable du fait que le parquet général, qui vient de le reconduire dans ses fonctions d’expert judiciaire pour cinq ans, le tient en haute estime ? Il n’y peut rien, il a juste modestement apporté son petit caillou de Petit Poucet à la manifestation de la vérité vraie !

Un moment, Monsieur Propre, Mister Muscle, « on peut le comprendre, et même, il nous fait presque rêver, il nous agrippe crûment par nos fantasmes ». Mais après « on le rejette, incapable de saisir, ressentir, appréhender pourquoi il le fait, aussi “proprement” qu’il le fasse. ». C’est tiré du Plaisir de tuer, page 213. Mais détourné. Ce n’est pas grave, ce n’est que fantasmé. Mais chassons là ces images de Dresde, de lueurs blafardes sur des vies broyées. « On se réveille comme d’un mauvais rêve » (idem), et on en veut à Brigitte Brami « du bout de chemin » (ibid.) fait avec elle. Et ouf, Captain Flamme Dubec et SuperWoman Thémis nous sortent du « piège ». Rendormons-nous, nous sommes du bon côté !

Voir aussi :
B. Brami contre M. Dubec : relax, restons couchés !