Philippe Pétain, Maréchal de France, suite 12,

a la Main-de-Massiges.

Les exploits du 95ème R.I.

Voir aussi l’historique du 95ème RI.

La Main-de-Massiges.

Le ravin de l’Index vu du promontoire, on distingue l’Index à gauche et le Médius à droite, référence, La main de Massiges .

La Main de Massiges est un haut lieu de cette guerre 1914-1918. Elle se trouve située à l’extrême droite du front de Champagne, à la jonction du front de l’Argonne. Les Allemands se sont, dès leur repli en septembre 14, retranchés sur cette hauteur naturelle dont la forme ressemble à une main gauche posée à plat sur le sol, chaque doigt représentant un bastion de cette forteresse naturelle. De gauche à droite, nous avons la faux, le pouce, le faux pouce, l’index, le médius, l’annulaire et le cratère. Au nord, la tête de vipère clôt avec le «creux de l’oreille» cette fortification. Face à elle à gauche, le secteur Français sur le promontoire séparé par le ruisseau de l’étang et le village de Massiges.

Support Wikipedia La 4ème armée était commandée par le général Gouraud, un colonial, célèbre par la capture de Samory qu’il avait faite étant capitaine. Gouraud avait perdu un bras aux Dardanelles. Il était populaire parmi ses hommes pour son sang-froid, une extrême douceur qui savait à l’occasion être d’une extrême fermeté, une indépendance de caractère et une largeur de vues qui lui permettaient de revenir sur des décisions arrêtées par lui, lorsque ses subordonnés lui soumettaient des décisions qui lui semblaient préférables.

Nous n’étudierons les opérations que sur un seul point, à la Main-de-Massiges. Les péripéties de la bataille furent partout identiques, et la manœuvre de la Main-de-Massiges, exécutée par le 95ème régiment d’infanterie, mérite d’être citée en modèle. La Main-de-Massiges avait été prise en 1914 par les Allemands et reprise par nous en 1915. Le 95ème régiment d’infanterie occupait les secteurs de cette position depuis le 6 juillet 1917. Les hommes pouvaient s’y diriger les yeux fermés. Cette connaissance parfaite du terrain doit être prise en compte, sur le même plan que le courage des hommes et la science des chefs, pour expliquer le succès surprenant de cette manœuvre qui nous occupe. La connaissance des lignes ennemies était toute aussi complète.

Presque chaque nuit, des groupes de volontaires allaient dans le terrain neutre, traquant les patrouilles Allemandes, enlevant les petits postes ennemis. Les lieutenants Fontaine et Cayré et le capitaine Galy devinrent légendaires par l’audace avec laquelle ils menaient ces coups de main. Un régiment Américain de noirs avait été détaché à la 4ème armée, et se trouvait immédiatement à droite de la 16ème division. Les officiers de ce régiment, enthousiasmés par les exploits du 95ème de ligne demandèrent à participer aux patrouilles comme simples volontaires, afin de s’initier à notre tactique. A plusieurs reprises, les Allemands dirigèrent sur la Main-de-Massiges de fortes reconnaissances, chargées de ramener des prisonniers. Pas une seule fois le succès ne couronna leurs efforts. Un officier Allemand, capturé dans la nuit du 4 au 5 juin, avoua le dépit du Commandement allemand, qui n’avait pu parvenir à identifier le régiment qui lui portait des coups si rudes.

Le 7 juillet parut l’ordre «célèbre» du général Gouraud aux soldats Français et Américains de la 4ème armée,

«le bombardement sera terrible, vous le supporterez sans faiblir. L’assaut sera rude, dans un nuage de poussière, de fumée et de gaz, mais votre position et votre armement sont formidables. Dans vos poitrines, battent des cœurs braves et forts d’hommes libres. Personne ne regardera en arrière, personne ne reculera d’un pas. Chacun n’aura qu’une pensée, en tuer, en tuer beaucoup, jusqu’à ce qu’ils en aient assez..».

Le 14 juillet, vers 20h30, l’ennemi commençait un violent bombardement par obus toxiques. L’ordre de repli, qui fut aussitôt donné, ne s’exécuta pas aisément, tant à cause de la nuit noire que des nappes de gaz que les hommes devaient traverser, le masque au visage. Le bombardement continua toute la nuit du 14 au 15, et toute la journée du 15. Il était particulièrement violent sur la première ligne où les minenwerfer s’abattaient en trombes. Notre artillerie à nous ripostait avec vigueur. Une attention spéciale doit être accordée aux hommes demeurés dans les petits postes d’observation. Ce sont tous des volontaires. Que l’on se représente la situation de ces soldats ! Abandonnés de leurs camarades, traqués par les obus de l’un et l’autre parti, presque assurés de leur mort, et qui, cependant, doivent garder leur cœur ferme et leurs nerfs solides, car c’est sur eux que repose la victoire, salut de l’Armée. Ils ont étudié avec soin leur itinéraire de retour, agité les diverses hypothèses. Dans un groupe, il a été décidé qu’on ne s’arrêterait pas pour soigner les blessés. Dans un autre, au contraire, tous devront se sauver ensemble ou mourir ensemble.

«Une seule hypothèse n’a pas été envisagée, celle de la capture par les Allemands. Tous ont juré de mourir plutôt que de tomber vivants aux mains de l’ennemi».

Dans la nuit du 15, vers 23 heures, l’infiltration ennemie commence. Le petit poste Bugeaud se replie après avoir lancé ses fusées-chenilles, fusées lancée à partir d’un engin chenillé. La compagnie Néron, 1ère compagnie du 95ème, qui avait, dans la soirée, réoccupé une partie de notre première position pour retarder l’avance ennemie, s’acquitte magnifiquement de sa mission. De nombreux éléments Allemands sont repoussés à la grenade ou aux violents bombardements. Le 16 juillet, à l’aube, la progression ennemie continue.

Le petit poste du Balcon, trois hommes commandés par le caporal Rousselet, s’aperçoivent soudain qu’ils sont coupés de sa ligne de retraite. Les hommes lancent leur fusée chenille, sortent de leur abri, «se jettent dans le creux de l’oreille», à travers les éléments adverses, gagnent la plaine sous le feu des mitrailleuses, rampent vers les lignes du régiment voisin, le 27ème qui, les prenant pour des Allemands, les accueille à coups de fusil. Sitôt en sûreté, l’uniforme déchiré, les mains et le visage ensanglantés par les réseaux de barbelés ces hommes n’ont plus qu’une pensée, retourner dans leur compagnie.

Une heure après son arrivée dans nos lignes, le caporal Rousselet avait repris le commandement de son escouade !

Les Allemands manifestent l’intention de prendre à revers le réduit du Plateau-Annulaire. La compagnie Néron les disperse à coups de violents bombardements, et leur cause de telles pertes qu’il leur enlève toute idée d’attaque pour ce jour-là. Nous sommes, vers 9 heures du matin, établis sur la ligne, réduit de l’Annulaire, «croupe de l’Annulaire», ouest de Massiges. Mais à gauche la situation n’est pas aussi favorable. Le Promontoire, évacué par le régiment voisin, a été occupé par l’ennemi. C’est le capitaine Néron lui-même qui s’aperçoit de cette occupation, au cours d’une des nombreuses randonnées qu’il effectue d’un poste à l’autre et à travers la plaine, seul suivi seulement de son chien. Or, qui tient le Promontoire, tient la vallée de la Tourbe et, par conséquent, la position tout entière. Sans hésiter, le capitaine Néron fait avancer une demi-section, reprend le Promontoire par une attaque brusquée, repousse les contre-attaques, et envoie au colonel Andréa, par un agent de liaison, le rapport de son opération, «10 heures, le Promontoire a été occupé par l’ennemi, 19h30, j’ai repris le Promontoire». Mais sa ligne s’étend maintenant du Promontoire au Cratère, et il n’a qu’une compagnie avec lui. Une, contre-offensive n’est-elle pas à craindre ?

L’entonnoir du cratère.

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Cet entonnoir de mine à été formé, par l’explosion de trois mines le xx 1915, référence, La main de Massiges .

Néron supplée au nombre par l’audace. D’heure en heure, il change de place ses demi-sections, dissimulant parfois ses mouvements et parfois les exécutant à découvert, de façon à donner à l’ennemi qu’il a devant lui des troupes nombreuses, un trompe l’œil en quelque sorte. Les Allemands tentent pourtant plusieurs sorties. Nos violents bombardements les brisent dès les premiers pas. A 13 heures, le reste du 1er bataillon du capitaine Daval, vient renforcer la 1ère compagnie. Malgré un bombardement assez violent, nos éléments s’avancent par infiltration à travers la vallée de la Tourbe et s’établissent sur le Balcon. A 17 heures, tout était terminé, et nous avions arraché à l’ennemi un nouveau morceau de sa conquête. Les Allemands étaient visiblement stupéfaits de notre manœuvre. Ils ne la comprenaient pas. Ils avaient cru trouver la première ligne, avec ses réduits, ses abris profonds, ses champs de tir magnifiques, formidablement occupée, elle était vide. Et pourquoi ce recul d’hier ? et pourquoi cette avance d’aujourd’hui ?

Il faut admettre cette stupéfaction et aussi la crainte d’un piège de notre part, pour expliquer les hésitations des Allemands et leurs paniques soudaines. Le même jour, à 10 heures, un nouvel effort est demandé à la compagnie Néron. Hommes et chefs sont exténués par une nuit sans sommeil et une journée saturée de dangers et de fatigues. Qu’importe! En moins d’une heure, Néron établit son plan. A 21 heures, la compagnie s’élance à l’assaut. A 21h30 elle s’installe sur le Plateau, jusqu’au Col des Abeilles, en capturant trois mitrailleuses Allemandes. Une vingtaine de mitrailleuses se démasquent sur la ligne Balcon Verrue Index et empêchent le développement de l’offensive. Les hommes passent le reste de la nuit à s’organiser sur les positions conquises. Le rôle de la 1ère compagnie est maintenant terminé. «C’est au capitaine Néron et à sa compagnie que nous devons d’avoir pu conserver la Main-de-Massiges» écrira, quelques jours plus tard, le colonel Andréa, dans son rapport.

Parmi tant de soldats, qui se sont distingués au 95ème, Néron fut l’un des premiers, par un sang-froid étourdissant, une maîtrise de soi qui tenait du prodige, une sûreté de coup d’œil qui ne se démentit pas une seule fois, un courage surhumain qui faisait dire à ceux qui en étaient le témoins, «pas de doute, Néron cherche à se faire tuer !» Cette digression ne paraîtra pas un hors-d’œuvre. L’histoire d’une guerre est surtout l’histoire de ceux qui la font avec leurs pieds, leurs mains, leurs yeux, leurs nerfs, leur cœur, leur intelligence. La part des grands chefs est belle aussi, mais dans un autre plan, bien loin derrière.

Le 17 juillet, une opération est montée en vue de reprendre la ligne Balcon Verrue Index, que l’ennemi occupe avec un effectif évalué à plusieurs compagnies, étayées par de nombreuses mitrailleuses, comme l’a montré l’attaque de la veille. Six sections d’infanterie et trois sections de mitrailleuses doivent prendre part à l’attaque sous le commandement du capitaine Galy. Le colonel Andréa, qui commande le 95ème et qui a été à plusieurs reprises, comme un incomparable manœuvrier, se surpassa lui-même dans l’élaboration minutieuse du plan d’attaque. Aucun détail ne fut laissé au hasard. Deux sections d’infanterie se porteront sur les faces est et sud-est de la Verrue par le col des Abeilles, une section enlèvera le Balcon et Kellermann, deux sections traverseront le haut du Médius, et pendant que l’une attaquera la face sud de la Verrue, la deuxième filera, sous sa protection, vers l’Index, avec l’ouvrage Merlin pour objectif.

La sixième section partant du bas de l’Annulaire s’emparera du Médius, partie sud et s’y installera. Une septième section aura pour mission de protéger, dans le ravin de l’Étang, le flanc gauche de l’attaque. Une section de mitrailleuses, installée au Cratère, flanquera le Balcon à droite, une autre sur le Promontoire flanquera l’Index dans le ravin de l’Étang, une troisième section marchera avec l’attaque et aura pour mission de s’installer à Kellermann et d’ouvrir le feu sur le col de la Verrue pour flanquer cet ouvrage et tirer sur les éléments ennemis qui viendraient à se replier. L’artillerie fera un tir de destruction de quinze minutes sur le Balcon, Kellermann, la Verrue et l’Index. Chaque unité connaît à fond sa mission et l’itinéraire qu’elle doit suivre, l’enthousiasme des hommes est très visible, la confiance se lit sur tous les visages.

A 20h15, l’artillerie lourde exécute un tir de destruction très précis et des plus efficaces. Le barrage roulant, allure 50 mètres à la minute prend naissance sur la ligne, Balcon-col des Abeilles – Médius, se reporte pendant deux minutes sur la Verrue et l’Index, et va se fixer sur le ravin du Faux-Pouce et le col de la Verrue.

A 20h30, l’infanterie part à l’assaut, très bien engagée par l’artillerie de campagne. Tout se passe ainsi qu’il a été prévu. Le mouvement se fait au pas de course, les hommes n’ont pas à reconnaître le terrain, ils le connaissent «par cœur». En quatre minutes le sous-lieutenant Palémon s’empare du Balcon. Le lieutenant Rey avec sa section se heurte à des mitrailleuses qui flanquent la porte annamite vers l’ancien PC. Kellermann. Il laisse des hommes pour escarmoucher avec les mitrailleuses, saute dans le bled, contourne l’ouvrage, tombe sur les mitrailleurs Allemands par derrière et les tue ou les fait prisonniers. La section Cayré suit le boyau des Abeilles. Au boyau 33, elle est arrêtée par un groupe important d’ennemis. Nos violents bombardements entrent en action et font terrer les Allemands pendant que le reste de la section se déploie en plein terrain, les déborde par la gauche du boyau, en tue trois dont un sous-officier, en capture trois autres avec deux mitraillettes Allemandes, cependant que le reste des Allemands prend la fuite. La section continue jusqu’à hauteur de la tranchée Dumouriez, qu’elle suit pour atteindre le poste de commandement Chapelle.

Le groupe de tête continue, cependant que le groupe de queue rejoint le capitaine Bourbon. Sa liaison nettoie l’abri du poste de commandement et capture 28 Allemands. L’élément de tête entraîné par le lieutenant Cayré se porte à Deshaires et pousse quelques hommes dans le boyau 31. Le caporal Soulié et un homme détachés en liaison à droite, avec la section Rey, trouvent trois Allemands à l’observatoire Périgueux et les capturent. Le lieutenant Cayré, vingt-deux ans, est d’une imprudence folle, à plusieurs reprises le capitaine Galy doit le rappeler à l’ordre et le menacer de huit jours d’arrêt pour l’obliger à ne pas rester sur le parapet, bien en vue. La demi-section Bellidon nettoie le boyau Lefaucheux où elle trouve deux Allemands, que le sergent tue lui-même à coups de fusil du haut du parapet. La demi-section de l’adjudant Parent occupe le col des Abeilles. Le caporal Mercier descend dans une sape avec une bougie pour l’explorer, il croit la sape vide et comme son fusil l’embarrasse il le laisse en route. En bas de la sape, il se heurte à six Allemands. Mercier remarque un marteau contre une paroi; il s’en empare, le braque à la façon d’un revolver sur les Allemands, et ceux-ci font «camarades».

Vers 21 h15, tout était terminé, les deux fusées annonçant la fin de l’opération étaient lancées de la Verrue, et on procédait immédiatement au nettoyage. Le mouvement avait demandé trois quarts d’heure. Nous avions atteint tous les objectifs prévus en bousculant un bataillon, fait 55 prisonniers, tué une centaine d’ennemis, sans compter les cadavres échelonnés jusqu’aux anciennes lignes Allemandes, ramassé une vingtaine de mitrailleuses et un matériel considérable.

De notre côté, 5 tués et 5 blessés. Aux noms déjà cités, il convient d’ajouter ceux des lieutenants Python, Kuntz, Mignot, Odin, de l’adjudant Conrad, du sergent Bailly. Il convient également de donner une mention spéciale au capitaine Galy qui prit la succession de Néron et sut demeurer digne d’un pareil exemple. Une fois les Allemands en fuite, Galy assura lui-même la liaison avec ses divers éléments. Et comme Néron la veille, il l’assura seul, au milieu de la pétarade des mitrailleuses et des éclatements des obus. «Avec des chefs comme ça, on irait, partout !» Cette parole, dite le lendemain par un des soldats de Galy, est la plus belle citation dont puisse s’enorgueillir un homme.

Le 18, l’ennemi, visiblement démoralisé, se retirait sur notre ancienne première ligne, sur la simple poussée de nos patrouilles.

Le 19, il retournait à ses positions d’avant l’attaque. La Main-de-Massiges était à nouveau en nos mains tout entière. La grande offensive qui devait, au témoignage des prisonniers, mener les Allemands à Chalons en quarante-huit heures, était noyée dans le sang.

La suite 13 portera sur la seconde victoire de la Marne

6 réflexions sur « Philippe Pétain, Maréchal de France, suite 12, »

  1. Bonjour Anido.

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    Merci pour ta future réponse Positive.

    HIAWATHA

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    Anido

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