Philippe Pétain, Maréchal de France ses années noires de 1940 à 1944, suite 56,

vivre en France sous l’occupation.


 

Ce fut une période difficile pour tous les Français mais ceux de la zone occupée ont subi plus de privations que ceux de la zone libre pendant le temps ou elle le resta. Les Français qui s’en sont mieux tirés sont ceux des champs, de la campagne, ceux qui pouvaient cultiver et élever des bêtes, mais aussi ceux des boutiques d’alimentation dont certains ne se privaient pas de vendre au marché noir, les profits n’avaient pas d’odeur. D’ailleurs nombreux sont ceux de la capitale, par ce que nous en étions, qui allaient clandestinement en zone libre, mon père en fut, chercher de la nourriture. Je me souviens avec ma mère, mon père était pas présent pour ne pas être réquisitionné, nous allions à Boulay-les-Troux commune essentiellement rurale qui est maintenant dans l’Essonne. Nous prenions la ligne de Sceaux, la plus ancienne ligne du RER actuel ouverte, mise en service en 1846, qui reliait Paris de Denfert-Rocheteau à la commune de Sceaux. Nous y allions pour acheter des pommes de terre, et ma mère et moi nous portions sur le dos des sacs de plus de dix kilos. Nous faisions comme beaucoup pour vivre, les restrictions étaient lourdes nous n’avions droit qu’à moins de ≠300 grammes de pain par jour, c’est très peu et de plus le pain était gris. Avec le pain, puis les pates, le sucre remplacé par la saccharine, le beurre, le saindoux pour la cuisine et le savon, la viande, le café remplacé par la chicorée, la charcuterie, les œufs, l’huile, le chocolat, le poisson frais, le lait, et enfin les pommes de terre qui étaient remplacées par les topinambours. Je me souviens lors de la distribution de pommes de terre je me levais à 4 heures du matin pour faire «la queue» sur la place de la mairie jusqu’à 8 heures et plus pour quelques kilos. Pour les légumes c’était le rutabaga. Ce sont des souvenirs que l’on n’oublie pas, nous étions en rangées de 8 sur plus de 100 mètres. Il n’y avait pas d’obèses sauf parmi les commerçants de nourriture, c’est quelque chose qui n’est resté, les accidents cardiaques étaient rares.

Si les restrictions avaient un effet bénéfique sur les maladies cardiaques par contre, la sous nutrition avait des effets sur la population la plus pauvre en particulier les enfants. Parmi les personnes âgées, beaucoup sont décédées pour cause de privations. Le taux de mortalité s’accroîtra de 24 % pour la région parisienne, de 29 % à Marseille et jusqu’à 57 % pour la région de Lyon, entouré de vignobles et de montagnes ! En revanche, dans les terres plantureuses de l’Ouest, la mortalité décroîtra de 11 %, c’est dire que la privation n’était pas égale partout. La santé morale se détériorait en proportion de la santé physique. Les citadins perdaient du poids, même à Paris avec son marché noir. 24 % des parisiens adultes pèseront quelques kilos de moins que le poids normal, 38 % de 4 à 8 kilos. Je me souviens à l’école les distributions de vitamines étaient courantes, nous étions pauvres.

La distribution de soupe populaire

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 document Wikipédia.

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Le Zazou des années 1940, 

C’était le système D qui se jouait des lois et des règlements, pour apporter un léger mieux. La génération des moins de vingt ans, souvent privée de père, prisonnier de guerre, ou planqué pour ne pas être réquisitionné s’y adonnait allégrement. je ne me suis jamais autant amusé avec mes copains dans les Buttes à Morel de Montreuil-sous-Bois voisines de mon domicile. On peut encore s’estimer heureux si ces J3 de 13 à 21 ans qui bénéficiaient d’une nourriture plus riche que les adultes ou ces Zazous, avec leurs cheveux longs, leur pantalon trop étroit et leur amour de la musique Américaine se confinaient dans les activités excitantes du marché noir. Ils marquaient leur opposition au régime en place, et lorsque les juifs portèrent l’étoile jaune ils mirent un point d’honneur à la porter au risque d’être arrêtés. Des individus jusque-là honnêtes se mettaient à chaparder des produits alimentaires, surtout du pain, ou à acheter des cartes de pain volées, ou fausses dont la fabrication était passible de la peine capitale. Beaucoup considéraient ces trafics par nécessité et n’y voyaient rien à y redire. L’Église, les prêtres étaient comme tout le monde souffrant aussi des privations profitant également du marché noir. Au «ils nous prennent tout» s’ajoutait «c’est toujours ça qu’ils n’auront pas», tiré de la référence, Les Français sous l’occupation.

Les restrictions allaient jusqu’au chauffage, le cuir les semelles de chaussure étaient en bois articulées, les vêtements, le tabac ou d’aucuns le cultivaient dans leur jardin. Les chaussures deviennent aussi très rares, en janvier-février 1942, Paris ne reçut que 88.280 paires de chaussures ce qui était dérisoire pour une ville qui compte alors plus de deux millions d’habitants. Des tickets de chaussures firent leur apparition. Une commission a même été créée à l’hôtel de ville pour examiner les demandes d’attribution de chaussures. Les bottiers furent soumis à l’interdiction de fabriquer des chaussures montantes ou des bottes. L’essence était remplacée par le gazogène, les voitures étaient équipées d’un ensemble d’alimentation de gaz produit par la combustion de charbon de bois, de coke ou d’anthracite avec de l’air ou l’hydrogène permettant la production de méthane.

Voiture équipée d’un gazogène

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Une des premières voitures équipée d’un gazogène document Wikipédia

Les difficultés de transport ont fait fleurir «la petite Reine», la bicyclette devant le moyen de déplacement pour beaucoup d’entre-nous. Des vélos à remorque aux vélos taxis tout le monde devenait sportif. De 8.400.000 en 1938, le nombre des bicyclettes passera à 10.700.000 en 1942. Vélos parfois dénichés du grenier ou rapportés de la campagne et à qui l’obligation de porter une plaque minéra­logique, avec une carte grise, donnait au vélo le trait d’union avec la voiture. Le métro parisien était très prisé comme moyen de transport à Paris.

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Affluence dans le métro ou des Allemands se prêtaient aux circonstances, collection Schall, document, Le métro parisien sous l’occupation

Les tickets de rationnement et les cartes d’alimentation pour lesquels il fallait s’inscrire afin de déclarer la charge de la famille étaient le souci permanent des femmes qui en avaient pour tout. Voici quelques exemples de cartes d’alimentation et de tickets.

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Référence, La documentation pédagogique.

Les Français avaient pris en compte toutes ces contraintes ne serait-ce que les filles d’attentes aux boulangers, aux commerçants en général. Mais cela ne se passait pas toujours en parfaite harmonie lorsqu’une personne munie d’une carte de priorité passait devant tout le monde. Combien étaient ces privilégiés ou «collaborateurs» femmes ou hommes que l’on commençait à connaître qui bénéficiaient de cette carte ? Il y en a même qui arrivaient en voiture Allemande.


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Elles ont pourtant été interdites, ces files d’attente, à Lyon d’abord, puis à Paris, le 1er juillet 1941. On ne pouvait les éviter, les privations faisaient que les premiers étaient servis, et pas les autres. Elles se formaient à chaque ouverture des boutiques que ce soit pour le pain ou tout autre chose qui pouvait améliorer l’ordinaire, document, Les files d’attente.

Les bombardements sous l’occupation.

On nous avait construit des abris anti-bombes histoire de nous protéger des attaques des alliés, c’était mieux que rien, mais surement pas anti-bombes eu égard à la protection qu’ils étaient censés offrir. Des tranchées cimentées avec bancs mais recouvertes de dalles de béton d’environ 10 cm puis de la terre sur une épaisseur de l’ordre de 40 cm. Cela pouvait nous préserver des éclats de bombes, ou d’obus, des mitraillages mais pas des bombes. Avec environ 75 000 victimes et 550 000 tonnes de bombes déversées, la France était, après l’Allemagne, le second pays le plus touché par les bombardements alliés de 1940 à 1945. Ceux-ci furent particulièrement intenses en 1944, à l’occasion de l’opération Overlord de la bataille de Normandie, avec en particulier le bombardement du 26 mai 1944. Pour ceux qui étaient proches du métro, l’abri était tout trouvé et confortable. Pour ce qui nous concernait, nous avons subi le bombardement de la gare de Noisy-le-Sec qui était une gare de trillage, le ciel était rouge par le feu de la DCA mais aussi par celui des bombes. Par le souffle des bombes j’ai été projeté contre le mur de la maison qui était proche de la zone de bombardement. Et ces fameuses sirènes d’alerte déclenchées quelques dizaines de minutes avant l’arrivée des avions nous signifiaient de nous mettre à l’abri. Curieux, nous regardions passer les vagues d’avions soumises au feu de la DCA. Encore en service aujourd’hui ces sirènes que l’on fait sonner chaque premier mercredi du mois pour, non pas rappeler cette triste période, mais pour s’assurer qu’elles peuvent encore fonctionner, et pour alerter de la montée des risques technologiques naturels sans négliger les aspects militaires.

Nous nous en sommes sortis mais pas tous. Nous attendions notre libération nos oreilles collées à la TSF écoutant les messages, les Français parlent aux Français, de radio Londres. Quotidienne elle fut diffusée du 14 juillet 1940 au 31 août 1944 après l’appel du 18 juin du général de Gaulle. Elle transmettait également des messages codés pour la résistance, jouant ainsi un très grand rôle pour notre moral. Dans un premier temps, les messages personnels diffusés par la BBC permirent aux soldats séparés de leur famille et de leurs proches d’échanger des nouvelles.

Lors de l’opération Overlord, pour activer la résistance juste avant le débarquement en Normandie, plusieurs centaines de messages codés ont été diffusés par Radio-Londres,

* le 1er juin, à titre de mise en alerte des réseaux,
* le 5 juin, à 21 h 15, pour déclencher l’action la nuit même.

Comme exemple célèbre souvent cité, la première strophe du poème Chanson d’automne de Verlaine a été utilisée pour le plan rail du réseau Ventriloquist de Philippe de Vomécourt en Sologne, celui-ci avait pour mission de saboter les voies ferrées allant vers la Normandie, afin de les rendre inutilisable pour l’envoi de renforts Allemands, sous une forme légèrement altérée,

* le 1er juin «Les sanglots longs des violons d’automne… », Verlaine écrit : « … de l’automne», invite les saboteurs ferroviaires de se tenir prêts.
* le 5 juin «Bercent mon cœur d’une langueur monotone». Verlaine écrit, «Blessent mon cœur … », donnait l’ordre au saboteurs s’agir la nuit même.

Contrairement à une idée répandue, ces messages étaient bien destinés à Ventriloquist uniquement «la guerre des ondes», chaque réseau ayant reçu deux messages spécifiques.

Les Français parlent aux Français

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Paris sous l’occupation

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La suite 51 sera la ligne de démarcation, et la zone libre.

Les références peuvent être lues sur mon blog au Monde.fr

 

Une réflexion sur « Philippe Pétain, Maréchal de France ses années noires de 1940 à 1944, suite 56, »

  1. [i][b]Mon père, qui a vécu à Paris pendant l’occupation m’a raconté énormément de choses sur la présence allemande dans notre pays et sur les difficultés à se nourrir, travailler, vivre…

    Bravo, Anido, pour ce travail d’enquête…

    Amitiés

    Dominique[/b][/i]

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