Peut-on encore rire de tout… avec Cabu, sans doute, avec Plantu (n’en déplaise à Mélenchon) l’un des meilleurs caricaturistes du siècle dernier et du présent ? Oui, assurément. Plutôt sourire, pour ma part… Plus difficile était de sourire de son attitude à l’égard de Siné, mais admettons volontiers qu’avec cet album Peut-on encore rire de tout (éds Cherche midi), il y a encore de quoi sourire et même rire, plutôt jaune d’ailleurs.

Cabu, écolo de longue date, anar jamais vraiment grimaçant, mais au coup de crayon corrosif, est un « gars » (damned, faut le faire, car Jean Cabut aborde ses 75 printemps) plutôt jeune et très amène, la plupart de ses connaissances – dont je fus vaguement car aussi Rémois d’occasion – vous le confirmeront. Cabu, dans Pilote, puis d’autres titres (actuellement Charlie et Le Canard), ce fut un peu l’anti Jacques Faizan (du Figaro), lequel était rarement drôle. Sempé non plus n’est pas formidablement rigolo, mais il ne joue pas dans la même catégorie.

Je ris rarement à présent à gorge déployée en voyant un dessin de Cabu, sauf lorsque son humour se fait particulièrement rosse et vachard. C’est peut-être que je suis tellement habitué à le retrouver avec plaisir dans les huit pages hebdomadaires du « volatile ». Une si fréquente fréquentation émousse peut-être l’hilarité. En revanche, bien sûr qu’il parvient encore à me faire me taper sur les cuisses, ce qui n’est pas le cas avec cet album du Cherche midi, Peut-on encore rire de tout ?
Sur l’instant en tout cas. Dois-je avouer qu’une longue virée nocturne m’a réveillé grave les hémorroïdes ? Il me semble, vu le sujet, déontologiquement opportun de vous mettre dans cette petite confidence.

Actualité sociale

Ou plutôt, actualité politique et sociale. Brigitte Liot, l’attachée de presse, me glisse d’indiquer pour Google que c’est un album d’actu sociale, voilà, c’est fait. D’autant que ce n’est pas faux du tout. Ce qui caractérise encore Cabu, c’est justement son sens aigu de l’actu, de nos manières de vivre, de penser (ou le croire), de réagir. En cela, il est irremplaçable, tout comme Daumier, et ses albums sont de longue garde.

De quoi donc qu’il « cause » ? Évidemment de tout et l’index va des accidents de la route aux vide-greniers en banlieue et au vote populaire (page, ou plutôt planche finale, 94).

Bardot voisine avec Burqa, Christianisme avec Crémation, Financement (RPR ou UMP) avec Flambée de l’immobilier, Régimes amincissants avec Religion ou Romanichels, Terroristes avec Tourisme monacal et Traders. Bon, Google est content. En sus vous retrouvez la bande Mélenchon, Hollande, Chirac, Longuet, et même, évidemment Sarkozy (Pal, le père), et nombre d’autres noms.

94 planches, donc, pour 17 euros (un peu moins selon les libraires). Évidemment, on retrouve des thèmes récurrents de Cabu (les pasteurs de brebis croyantes, les militaires, un peu moins l’écologie cette fois, les sportifs de compétition), quelques-unes de ses têtes de turc (Bernard Tapie, Claude Allègre), un peu moins Sarkozy et de Carla Bruni que d’habitude. 

C’est parfois légèrement méchant (pauvre Johnny Halliday, voulant mourir en scène… comme Robert Molière, pauvre Mireille Mathieu, décorée par Sarkozy, et affichant un sourire mongoloïde). Nicolas Hulot, en candidat sandwich (maillot Rhône-Poulenc et autres), est un peu moins écorné… Le pompon, c’est l’affaire DSK avec Depardieu en soubrette et Jamel Debbouze en Dominique Strauss-Kahn (plutôt salace).

Ne vous précipitez pas tout à fait pour aller acheter cet album, il ne sera sur les tables que le 8 mars. Enfin, bien sûr, vous pouvez le commander en ligne.
Mais je crois que Cabu préférerait que vous alliez d’abord le feuilleter chez un petit libraire de quartier, quitte à ce que vous repartiez avec l’album d’un concurrent (et néanmoins ami).

Voyez aussi si (hiatus voulu) l’album L’Étranger de Cabu est toujours disponible (non, rien sur l’ex-impératrice d’Autriche).

C’était, je l’avoue, pour tirer un peu à la ligne (et faire pendant au dessin ci-contre, sur la flambée immobilière).

En revanche, j’ai cherché Cabu sur le site du Salon du Livre et pas trouvé de mention.
Donc, pour une dédicace, le meilleur est d’aller traîner, le lundi, du côté du Canard enchaîné. Avec vos albums sous un bras et au bout de l’autre, une pancarte, avec « Cabu, dédicace ! », ou encore une inscription « Cabu, au bistrot ! » (vous ne risquez rien, il boit plutôt de l’eau, l’addition devrait être à peu près douce). Mais, hein, moi, j’vous ai rein dit…

P.-S. – je n’aime pas trop reproduire plein pot des dessins de Cabu, qui a certes l’habitude de s’en faire piquer par tout le monde, mais j’estime que cela ne se fait pas (sauf pour la une de couv’ des albums).
Or donc, si vous ne décryptez pas la planche avec Geneviève de Fontenay, supra, mettons que la faiseuse de misses élève ses poulettes en plein air et au grain, comme, on l’espère encore, du côté de la Bresse.

Ah, et puis zut, à peine venais-je d’écrire que Cabu me faisait plus sourire que rire que sort, ce 29 février 2012, le nº 4766 du Canard enchaîné. Et que vois-je en une ?
Carla Bruni prenant le petit Nicolas par le col pour le transporter, battant des pieds, mouches le suivant à la trace, à la buanderie.
Il pue. « Tu as encore été au peuple ! » nasille une Carlita se bouchant le nez.

Outre le trait, l’air penaud du Nikolou-Canaillou, c’est le sens de la formule, (quoique « été » et non « allé »), qui fait le Cabu ! Aller au dames, tel un DSK, passe encore… Renouer un peu avec Cécilia, soit. Même inviter Dominique Strauss-Kahn et Anne Sinclair à dîner, en catimini. Mais se commettre avec la plèbe…