20 ans après, on ne peut que se réjouir de la chute du Mur et  de la réunification de l’Allemagne ; mais à quel prix pour les Allemands de l’Est ?

 

 

  J’ai parmi mes amis allemands quelques Ossies (ex Allemands de l’Est), qui ont tous eu quelques petites histoires peu glorieuses à raconter sur leurs frères ouest allemands (Wessies) et l’accueil « chaleureux » qui leur a été fait !  

 

 

Karl, 53 ans : il a fuit Dresde et la RDA avec ses parents en 1965 ; réfugié à Heilbronn en Baden –Wurtemberg, un des lieux de résidence de ceux qui avaient eu la chance de réussir à fuir à travers la Tchecoslovaquie et l’Autriche,  il va affronter le mépris et la haine de ses camarades d’école ; ils sont pauvres ; les deux parents travaillaient en RDA et avaient des diplomes ; la mère ne trouvera qu’à faire des ménages et le père travaillera aux champs puis à l’usine; les voisins les maintiendront à l’écart ; ce n’est qu’à l’Université (à 20 ans) et surtout en tant qu’ingénieur dans des organisations internationales (en Belgique et aux Pays Bas) qu’il pourra oublier ce mépris en épousant une Britannique.

 Otto, 70 ans, un vrai Prussien au regard bleu gris qui souriait rarement m’a raconté les même déboires, un jour de nostalgie à Prague, en 88 : il fuit avec sa femme en 60, apres avoir cherché à trouver du travail correspondant à ses qualifications à Breme, il se rend aux Pays Bas où il vit toujours entouré d’amis hollandais et anglais; sa famille est restée à l’Est et il ne pourra leur rendre visite qu’au milieu des années 70 ; sa fille est médecin à Leiden. Dur de lui parler de l’identité allemande ! 

  89 : nous sommes tous excité par la chute du Mur ; le "Sekt" coule quasiment tous les week-end et on chante "Deutschland Uber Alles"; mais mes amis allemands de l’ouest,  une fois les grands sentiments commencent à acheter des terrains , appartements et maisons à Berlin est pour une bouchée de pain : le profit avant tout.  Le cout de l’immobilier et des locations flambent quand les salaires stagnent , malgré la conversion symbolique paritaire entre les deux Marks. 

91 : je cherche un appartement à Frankfurt ; heureusement que je suis française, je passe avant tout le monde, même les Ossies ; pour m’équiper d’une cuisine, il va falloir attendre 8 mois ou acheter Ikea ; les Ossies sont critiqués parce qu’ils dépensent l’argent du contribuable ouest allemand.

 92 : Deutsche Telekom s’installe à l’Est et il faut « éduquer » les Ossies aux méthodes de management et à l’efficacité ouest allemande ; mes amis ingénieurs iront donc à Dresde ou Berlin avec un salaire doublé réapprendre aux Ossies 2 fois moins payés comment travailler.

 Août 1992, Rostok :  des agressions contre des étrangers devaient marquer l’image de la ville. Une réponse de Rostock à cette situation fut l’initiative Multicolore et non brun. 

94 : la plupart des managers des entreprises est allemandes viennent de l’ouest ou sont les anciens cadres du régime communiste. Le chomage dépasse les 20 % à l’Est ; les jeunes passent à l’ouest . En cinq ans, toute la culture est allemande a été niée ou  remplacée par la culture « occidentale » et les chaines de magasin ouest allemands comme Quelle ou Kaufhof. 

Que n’aurais je entendu comme remarques ou blagues méchantes sur les Allemands de l’Est ! Woher weiß man das die Ossies nicht von den Affen abstammen? Sie haben es 28 Jahre ohne Bananen ausgehalten! 

Les Ossies se vengent en traitant les Wessies de BesserWesser (un jeu de mot signifiant arrogants je-sais-tout). 

Il y a tout de même une petite blague mignonne que je traduirais : "Fritzchen, -équivalent de Toto- quelle est la  différence entre le capitalisme and socialisme?" Fritz repond: "le Capitalisme  est l’ exploitation de l’homme par l’homme. Sous le socialisme, c’est l’inverse."   

 Il y a pourtant des entreprises brillantes à l’Est comme Jenoptik , un fleuron de l’optique de précision. 

 

2005 enfin, et une revanche avec l’élection d’Angela Merkel comme Chancelière d’Allemagne ; chapeau bas, M. Kohl, vous avez vraiment réussi la réunification envers et contre tous, et surtout les Allemands de l’ouest. 

 

Un sondage récent publié par le quotidien Berliner Zeitung révèle qu’une large majorité (67%) des Ossies sont d’avis que l’ex-RDA avait "davantage d’aspects positifs que négatifs", alors que leurs concitoyens de l’ouest du pays sont d’un avis contraire.

« Il y avait quelques problèmes, mais globalement on y vivait bien , on y vivait mieux que dans l’actuelle BRD », « la RDA avait surtout de bons côtés et on y vivait heureux et mieux que dans l’Allemagne réunifiée d’aujourd’hui » : pas étonnant si on analyse comment ils  ont été spoliés et traités par leurs frères!