Petite histoire de recherche d’emploi

Alors comme ça le gouvernement veut « aider » les gens qui font un effort pour travailler ?
Le problème ne se situe pas dans la notion de travail, figurez-vous qu’en France, mais ça vous le saviez déjà, cette notion est tellement ancrée dans les esprits que les gens n’acceptent pas les aides personnelles de l’Etat pour s’en sortir. Les tenants du libéralisme ont réussi à nous mater… est-ce qu’ils bossent eux, tous ces héritiers qui récupèrent les fortunes de papa pour les flamber sous nos yeux consentants ? A nous le travail éreintant qui procure la joie du devoir accompli, même si la compensation n’existe pas ou à peine (bosser et avoir juste le droit de se nourrir et payer des impôts).

Bon très bien, après tout je ne suis pas plus bornée qu’un autre, et j’aime les moutons, donc allons-y travaillons.
Mais passé la première porte d’agence pour l’emploi, il y a déjà un hic. Vous ne faites pas l’affaire.

Figurez-vous qu’aujourd’hui, je viens de recevoir une réponse (la seule bien sûr) négative de la part d’un distributeur de journaux qui a pignon sur rue, puisqu’il s’agit d’une filiale de la Poste. Oui, je suis diplômée, mais incapable de distribuer des prospectus publicitaires dans une boite aux lettres.
Je reviens un peu en arrière, et vous explique mes motivations et l’histoire :  je veux m’installer à mon compte, mais pour avoir le temps de développer mon activité, je cherche un emploi à mi-temps. C’est pas très compliqué, des petits boulots, il y en a à la pelle, et ça tombe bien, la boite pour laquelle je viens de postuler recherche du monde. Je me présente, ma candidature est jugée recevable, la responsable m’appelle pour me proposer un entretien.
Jusque là, rien d’anormal… même si le principe d’envoyer un CV et une lettre de motivation sur un boulot de 16h par semaine me hérisse les poils, je me prête au jeu. Je vous l’ai dit, le gêne du mouton est en train de sourdre petit à petit en moi.

Là où je commence à rigoler (jaune), c’est quand la recruteuse m’explique que je vais passer par une réunion d’information sur le métier (?), une évaluation (??) et enfin un entretien pour pouvoir prétendre au poste. J’ai failli m’étouffer au téléphone, mais je m’entends prononcer un « très bien » mélangé à un petit rictus (ça se voit pas ça au téléphone).

Une fois sur place, tout se déroule très bien… je note juste dans un petit coin de mon cerveau que l’entreprise embauche à temps partiel (c’est le libellé de l’annonce « contrat CDI 16h), mais qu’elle aimerait bien que vous en fassiez un peu plus. Traduction : une embauche à temps partiel = disponibilité totale. D’ailleurs c’est une des questions qu’on me pose « pourquoi vous avez noté que vous étiez disponible que la moitié de la semaine ? » …hum…

L’évaluation. Alors là, c’est cocasse, on est tellement professionnel dans cette boite, qu’on estime que si vous n’êtes pas capable de vous repérer sur un plan, ou de lire une feuille de route, vous ne pouvez pas exercer cette activité. Ca vous parait logique ? Rappelez-vous pourtant que lorsque les premiers distributeurs de journaux étaient payés à la tâche, donc exploité, personne ne leur demandait s’ils savaient lire un plan et repérer les horaires de bus …
L’entretien se passe bien, la responsable (qui n’en est pas une, elle fait tout le recrutement mais elle ne prend pas la décision finale…re-hum…) me dit que j’ai une bonne note -pardon, que j’ai correctement répondu à toutes les questions. Et elle me fait le coup du « parlez moi de vos qualités et vos défauts ».
J’ai évidemment dû merder quelque part, vu que nous étions quatre, dont deux personnes qui n’ont pas été capable de finir l’évaluation, et qu’il y avait deux postes à pourvoir.

Mais en fait, peut-être qu’au fond de mes yeux elle a vu le mépris que j’avais pour toutes ces entreprises qui utilisent le prétexte d’une crise de l’emploi pour ridiculiser l’être humain. Elle a sûrement vu que je ne me laisserais pas berner par le chantage à l’emploi contre quelques kopecks. Elle a expressément compris que le gêne du mouton n’avait pas encore totalement pris dans cet esprit peu enclins à s’abaisser sans broncher qui est le mien.

Oh je sais ce que vous allez me rétorquer.
« Tu veux pas accepter les règles du jeu, mais en attendant t’as pas de boulot »

Je ne sais pas ce qui est le mieux. Nous vivons dans un monde qui se craquèle. Les dernières lois pondues par l’Etat font cas d’un mépris complet de l’être humain. Alors quoi, on joue le jeu en espérant récolter les dernières miettes ? Combien de temps ça vous nourrit les miettes ? Je vous rappelle quand même que le boulot proposé n’est pas un emploi qui permet de vivre de façon normale dans notre société, puisque c’est un « 16h » au smic. Non, le système qu’on nous demande d’accepter est la base d’une idéologie d’asservissement de l’individu. Plus vous êtes dépendant, plus vous êtes acculé et plus vous êtes intéressant pour eux. Vous consommez comme on vous le demande (croyant avoir le choix), vous ne contestez pas ces choix imposés, parce que vous n’avez pas le temps, et parce que vous savez que votre place, si vous la laissez vous ne la retrouverez pas. Vous acceptez votre sort, sans broncher.

Alors comment se battre ? Difficile de trouver une réponse simple, dès que j’ai une solution, promis, je vous en fais part (et j’attends les vôtres).
En attendant, cela m’a décidé à agir en fonction de mes désidératas, et le Stop Pub que je voulais appliquer sur ma boite aux lettres depuis un moment va enfin servir à quelque chose. Si vous aussi ça vous chante, j’ai une très bonne adresse :
http://www.cyberacteurs.org/forum/viewtopic.php?f=19&t=10196

Dans l’attente (désespérée ?) de votre réponse, veuillez accepter, Madame, Monsieur, l’expression de mon profond respect……

10 réflexions sur « Petite histoire de recherche d’emploi »

  1. Petite précision pour le lien, faites plutôt un copié/collé de l’adresse, hélas comme à chaque fois ici, le clic ne marche pas à partir de cette plate-forme.

    Je me permets également de rééditer le lien de mon site, qui me permet d’avoir quelques lecteurs et qui est squeezé à chaque fois. Merci pour vos passages et vos commentaires… 😉

    [url]http://www.wix.com/sandrinegirardi/les-chroniques-de-gaia[/url]

  2. Salut Gaïä, et merci pour ton témoignage, pour la justesse de ton mépris sur l’inhumanité du libéralisme.

    Cependant, le travail est une notion bien plus large que celle que tu regardes par la lorgnette. Tout travail n’est pas avilissant, il en existe même qui permette de se faire plaisir, de communiquer avec les autres, de faire progresser un monde qui doit changer, etc…

    Pour t’installer à ton compte, je te souhaite beaucoup de succès, en adoptant une attitude plus réaliste, par exemple en construisant un tableau de bord plein de chiffre accroché à ton guidon et tu fonces ! Uniquement focalisé sur l’objectif et pas de sentiments, juste l’émotion des sensations fortes.

    Entreprendre, c’est assez magique, que vas-tu faire ?

  3. Ah mais il ne s’agit pas de travail Filtre, mais de l’accès à ce travail. Le fait de distribuer des prospectus n’est pas avilissant, vu que j’avais répondu à une annonce. Non, c’est le mépris par lequel on traite les demandeurs d’emplois que je dénonce ici. Par exemple, vous trouvez normal vous que la « recruteuse », qui vous pose toutes ces questions très intimes et et qui passe l’après-midi avec vous pour voir ce que vous valez ne soit pas celle qui décide ensuite qui elle va embaucher ? Comment faire confiance à un jugement humain de la personne qui est en face de vous, alors que de toute façon le recrutement se fait sur des critères « robotisés ».

    Et non, je n’accepterais pas un travail qui soit seulement « focalisé sur l’objectif sans sentiments ». Je l’ai fait, j’ai été commerciale, et je sais pourquoi j’en suis partie.

  4. Je comprends mieux ton épreuve, nul DRH ne peut s’extraire de son approbation à choisir dans un panel qu’on lui fournit, même si la méthode relève du siècle des Lumières. L’arbitraire conduit le fils du parvenu dans le chemin de ses ancêtres, quoi, tu n’es pas bien née ?
    On peut combler ces handicaps par un peu plus d’égoïsme, un peu plus d’hypocrisie, se « policer », faire apparaître son visage sous son meilleur fard, se cacher derrière les attentes de ses clients en oubliant tout leurs besoins, ou bien faire table rase de toute ces programmations neuro-linguistiques, et se tourner vers ses propres choix, sa propre lumière qui aboutit vers son avenir, ses espoirs, rechercher à se construire dans son entreprise, je ne sais, quelle est-elle ?

  5. Bonjour gAÏA,

    Je crois que Monsieur ou Madame Filtre ne comprends pas tout. Il ou elle a pourtant l’air très instruit…

    Comme quoi le bon sens!

    L’énoncé de l’annonce énoncée annoncée stipulait :
    MI TEMPS!
    Pas disponibilité totale… Simple non?

    Ce n’est pas par ce que l’on cherche du travail partiel que l’on doit courber l’échine devant l’arbitraire et la condescendance.

    Bonne journée.

  6. Bonjour Auguste Mouret,
    Pour Mr ou Mme Filtre, c’est la raison pour laquelle je n’ai pas répondu, à moment donné, quand on se rend compte que l’on est pas compris, il faut abandonner. Quitte à revenir à la charge après…
    Sinon, j’apprécie fortement votre conclusion.

  7. [quote]L’entretien se passe bien, la responsable (qui n’en est pas une, elle fait tout le recrutement mais elle ne prend pas la décision finale…re-hum…) me dit que j’ai une bonne note -pardon, que j’ai correctement répondu à toutes les questions. Et elle me fait le coup du « parlez moi de vos qualités et vos défauts ».
    J’ai évidemment dû merder quelque part, vu que nous étions quatre, dont deux personnes qui n’ont pas été capable de finir l’évaluation, et qu’il y avait deux postes à pourvoir[/quote][b][/b]

    Bonjour Gaïa,

    Il parait que maintenant,on pose ce genre de questions!!!
    C’est assez humiliant…sans doute que l’on veut voir si on sait « se défendre »!!

    je pense que j’aurais répondu:mes défauts? Lesquelles? Je n’ai que des qualités!!!

    A mon sens,surtout ne pas se laisser tomber dans le piège:cela ne regarde personne!!!

    Ou alors,faire une « exagération de ses qualités » et montrer simplement qu’on a réponse à tout!

  8. Bonsoir Mozarine,
    A vrai dire, j’ignore ce qu’il faut faire… il y a beaucoup de chose que les employeurs n’ont pas le droit de faire, mais leur principe est qu’il y a beaucoup de demande, pour peu de place. Donc ils se permettent tout. Et comme d’habitude, ce sont les grosses boites qui se permettent le plus de choses humiliantes.
    C’est le monde du travail, et je dois dire que je ne sais pas si j’ai envie d’en faire partie. Quand on dénonce le système, dur de faire semblant de l’accepter.
    Je travaille beaucoup, mais je ne suis pas payée, nous vivons hélas dans une société qui ne veut pas reconnaitre la culture et qui préfère donner ses largesses à de s gens qui ne produisent rien, mais qui sont des « beaux parleurs », des commerciaux nés. L’exemple le plus frappant est pour moi Bill Gates, qui s’est approprié une technique qu’il ne maitrise pas, mais qui a su la vendre. Le « créateur » de facebook a fait la même chose, sauf que lui s’est fait rattraper par ses camarades qui n’ont pas voulu le laisser seul récolter tout les lauriers. Ces deux personnes sont milliardaires, elles n’ont pourtant aucun talent, à part celui d’être de très bon manipulateurs… ça laisse songeur.

  9. [quote]’est le monde du travail, et je dois dire que je ne sais pas si j’ai envie d’en faire partie. Quand on dénonce le système, dur de faire semblant de l’accepter[/quote]

    Avons nous le choix,Gaia,d’en faire partie ou pas,il faut bien travailler…mais de préférence dans un métier que l’on aime…

    En tant qu’enseignante,j’ai eu pas mal de problèmes aussi mais j’ai toujours aimé ce que je faisais!

    Peut être faut il chercher quelque chose qui convient et en accepter les inconvénients…

    bonne soirée.

  10. Nous avons toujours le choix Mozarine. La question est de savoir ce que l’on veut vraiment… travailler, je travaille! Ce que je fais n’est pas « payé »,or il faut avoir des revenus, puisque la société nous l’impose.
    Le problème n’est ni de « chercher » quelque chose qui convient, ni d’en accepter les inconvénients, mais bien d’avoir la possibilité de chercher un travail (et avoir accès à ce travail, de nos jours nos efforts de recherche ne sont pas récompensés)Nous n’en sommes plus à chercher quelque chose qui convient. La société ne nous donne pas droit à l’erreur. Pouvoir faire une carrière dans un métier qui nous plait est une illusion pour la plupart.

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