Patrimoine des politiques : pédagogique Morano

Ce ne sont pas les déclarations des unes ou des autres qui changeront vraiment la donne : celles des bonnes intentions, celles des intérêts, celles de leur patrimoine. Mais il est très farce d’entendre Nadine Morano (UMP) considérer que la publication du patrimoine des élus et ministres équivaut à une « démarche absolument démagogique ». Est visé le gouvernement, mais aussi François Fillon, dont la déclaration tronquée à Pujadas a surtout pour effet d’embarrasser Copé, avocat, qui évoque « un numéro de voyeurisme et d’hypocrisie » et un « écran de fumée ».

Vous vous souvenez de l’épisode du « prêt familial » ayant permis à Jérôme Cahuzac d’acquérir un luxueux appartement parisien ? Relisez Come4News, et vous constaterez qu’il est au nombre des zones d’ombres de cette affaire. La très pédagogue Nadine Morano a considéré que publier patrimoine(s) et intérêts divers n’équivaudrait pas à « un certificat d’honnêteté dans la vie publique  ». Dont acte.
Aussi indique-t-elle une voie afin d’avoir une idée plus précise de ce que la classe politique dispose de biens et avoirs divers en début et fin de mandat(s) : « irons-nous jusqu’aux enfants, jusqu’aux conjoints qui n’ont pas choisi de faire de la politique ? ». Ni forcément d’ailleurs que parents ou fratrie se lance dans la politique… Ce serait quoi ? Trop injuste ?

On se tape sur les cuisses en constatant que certaines et d’aucuns, après des années, des décennies de mandats, n’ont même pas mis de côté ce qu’un cadre moyen en fin de carrière a économisé, tout en aidant ses enfants à s’installer. C’est une très bonne idée de demander aussi aux journalistes, y compris les modestes, de faire des déclarations. D’une part, à l’ACP, du groupe comprenant aussi le magazine Épargner et Le Journal des finances nous demandait-on de signer une clause nous empêchant d’investir en bourse en se servant des informations que nous aurions pu recueillir, mais il n’aurait pas été anormal de déclarer nos (maigres) patrimoines. Ensuite, entendre un Pujadas tout sourire répliquer à Fillon « ben dites-donc, pas rapport à moi, vous êtes un très petit joueur, ou un total panier percé, au choix… », cela n’aurait pas manqué de sel.

Je ne reproche à aucune consœur, aucun confrère, né avec une cuillère en argent dans la bouche et ayant su faire carrière, de pouvoir vivre très confortablement. Mais je vois bien, sur Rue89, appartenant au Nouvel Obs’, que ce ne sont pas les cadres ou cheffes de service qui vont examiner, avec leur consentement, les revenus et dépenses mensuelles de diverses personnes exerçant divers métiers. Il s’agit plutôt de pigistes (dernier exemple en date, Elsa Ferreira, qui titre « Ahmed, 2 800 euros dans les assurances, aide sa famille restée aux Comores »). Je verrais bien tel redchef de L’Obs’ se prêter à l’exercice avec une ou un pigiste, et vice-versa…

Comment voulez-vous que les ténors des médias soient encore sensibles à ce qui fait le quotidien des petites gens, comme on dit ? Même chose avec la plupart de ceux des divers grands partis (voire de ces toutes petites formations, et je ne parle pas de celle de Poutou ou Besancenot, plutôt de celles appelant systématiquement à voter pour un parti plus puissant).

« Tous pourris » ? C’est toujours le même argument : pas assez bien rétribués, « grands » journalistes ou politiques seraient trop enclins à se laisser corrompre. C’est quand même assez cocasse, quand on voit plutôt celles et ceux en bas de l’échelle faire preuve d’intégrité (pas toujours, mais… non, le tous pourris est abusif).

Moralisation, disiez-vous ?

Côté croquignol, et ridicule malgré lui, voici Serge Federbusch, d’Atlantico, qui pense avoir pris Anne Hidalgo la main dans le sac. Cette dernière aurait déclaré « je gagne 5 000 euros nets par mois pour mes mandats ». Inexact, admettons-le, avec Federbusch, ce serait plutôt aux alentours de mille de mieux.

Mais le pot-aux-roses serait qu’elle omis d’évoquer près de 1 600 euros mensuels découlant d’une retraite d’inspectrice, puis directrice du Travail… au bout de 29 ans de carrière. Comparez 29 ans de carrière de fonctionnaire cadre, depuis 1982, et ce que peut rapporter une carrière municipale n’ayant débuté qu’en 2001.

Mais pour Federbusch, président du Parti des Libertés (libéral, lui-même conseiller municipal parisien), ce n’est pas cela qui importe. Anne Hidalgo aurait triché. Bien sûr, on peut aussi considérer que la retraite d’Anne Hidalgo aurait pu être gelée, en prenant en compte ses autres revenus, mais cela ne fait ni chaud, ni froid, à un Federbusch, que des élus soient autant rétribués alors que des cadres de la fonction publique, après 29 ans, touchent moins de 1 600 euros du mois.

C’est là que se situe la question de la « République exemplaire ».

Si loin du peuple ?

Il n’y a pas qu’un Federbusch a trouver tout cela normal. Si vous cumulez les voix obtenues par Nicolas Sarkozy, François Hollande et Marine Le Pen, qui ne fait pas si mystère de la fortune de son père, voyez le résultat. Tous ces braves gens qui considèrent tout à fait normal les rétributions des élus. En fait, ils se disent peut-être que, si eux-mêmes pouvaient en bénéficier, ils s’en contenteraient volontiers, ou que, dans la position de celles et ceux qu’ils élisent, ils l’auraient certes bien mérité.

Or, voyez la composition du gouvernement, celles des deux chambres, qui se retrouve maire ou adjoint de grandes ou moyennes villes. Comment croit-on qu’à l’exception de quelques rares personnalités, des gens qui n’ont jamais été près du peuple (tiens, entre une Hidalgo et une NKM, fille de son père, d’utiles comparaisons vaudraient d’être établies), ou d’autres qui finissent par s’accrocher à leur(s) fauteuil(s), leurs multiples postes dérivés, soient encore proches des préoccupations du « vulgaire » ?

La vraie moralisation consisterait d’abord à ce que les fonctions électives ne soient guère plus rémunérées que celles de petits cadres du privé ou de la fonction publique. Il en est assez de surdiplômés et de toute façon, la compétence et les diplômes ne sont pas forcément liés.

Comme l’expliquait l’avocat suisse de Jérôme Cahuzac, s’il avait eu 15 millions d’euros à sa disposition, l’ex-député-maire, « ne se serait pas donné la peine de devenir ministre ». Ni vraiment maire, ni député d’ailleurs, sauf s’il aurait pu estimer que cela lui vaudrait la connivence de beaucoup. D’ailleurs (voir Morano supra), sa femme suffisait largement à tenir la boutique. On peut se demander ce qu’il en aurait été de toute cette affaire si Madame Patricia Cahuzac, cousine de l’épouse d’un avocat associé à un proche de Marine Le Pen, était restée en bons termes avec son époux.

Au fait, quand donc nos « moralistes » réclameront-ils d’urgence la réhabilitation de l’ex-inspecteur du fisc Rémy Garnier et tant d’autres lanceurs d’alerte de la fonction publique (voire du privé : vous entendez encore parler, vous, de l’affaire Castel Viandes, et de son ex-cadre licencié ? Et c’était quoi donc cette affaire Spanghero qui remonte à bientôt trente ans ?).

Autre chose : le gouvernement veut certes moraliser, mais le volet cumul des mandats semble encore une fois passer à la trappe, être repoussé, et il n’est pas vraiment question de limiter la durée des mandats successifs. Le renouvellement de la caste politique impliquerait une moindre rétribution des élus (les possédants ne fuiraient pas les partis, mais iraient peut-être chercher des chômeuses ou des mises au placard pour fournir les listes, faute de candidats parmi eux) et surtout, surtout, la fin des « sinécures » (être maire n’est cependant pas un boulot si paisible) qui durent, durent, durent. Là, il n’y a plus de Morano, ni vraiment personne…

Grand déballage…

Wauquiez, qui avait été l’un des rares à ne pas soutenir Cahuzac d’emblée, qui a publié son patrimoine, veut un grand déballage. Montebourg commencerait bien par faire sortir l’intégralité de la liste Faciani (ancien d’HSBC ayant craché partie du très gros morceau de quelque 9 000 Français évadés fiscaux, l’autre provenant de l’UBS), car cela pourrait faire rentrer à Bercy de trois à quatre milliards d’euros, somme que recherchait Cahuzac, mais qu’il n’entendait, pas davantage que Woerth, Pécresse, Baroin ou d’autres, aller trouver de ce côté.

Bernard Cazeneuve (PS) voudrait que la liste des Offshore Leaks soit communiquée au plus vite par la presse à la justice. Et il écarte l’idée de recréer une « cellule de régularisation » (soit celle que, voici quelques jours seulement, vingt députés UMP préconisaient, avec de forts abattements d’amendes pour les « repentis »).

Guaino (UMP) ne veut pas de transparence car il « n’est pas là pour se déshabiller en public ». Il préfère mettre les bouts si la loi était adoptée. Bon courage au candidat UMP qui tentera de lui succéder… Christian Jacob (UMP) voudrait que tous les Français publient leur patrimoine. Pas de problème, pour la plupart, le fisc est déjà largement au courant via les taxes foncières, les déclarations automatiques de revenus par l’employeur et des avoirs bancaires dans les banques. La seule chose qui m’embêterait, ce serait d’avoir à remplir de la paperasse. Mais comme tout est connu… où serait donc le problème ?
M’est avis qu’avec cette loi, si elle voit le jour, des politiques vont fréquenter très fort les casinos et le PMU, acheter des brassées de billets de Loto. Bercy va voir ses recettes grimper. Sébastien Proto, qui a favorisé, avec Woerth, les jeux en ligne, a peut-être finalement bien fait…

René Dosière (exclu un temps du PS car tantinet gêneur) se fait discret. Mais il plaide toujours pour la publication de l’usage de la réserve parlementaire et des « cagnottes de groupes » parlementaires. Il veut aussi se pencher sur le financement des associations (une piste : à Paris, le Lieu du Design, pour n’en citer qu’une). « J’entends bien poursuivre mes investigations sur ces divers aspects », écrit-il ; sachant fort bien que cela dérangera encore davantage à droite qu’à gauche, mais n’épargnant personne.

Plus le PS s’autoaccuse, plus la droite frémit

Gaëtan Gorce (sénateur PS de la Nièvre), va plus loin : « c’est la dérive clanique qui s’est emparée du PS ». Vu ce qu’il en est à l’UMP, dénoncer la « bourgeoisie d’appareil », c’est arroser très, très large. Il met les pieds dans le plat et, indirectement, ne s’épargne pas en dénonçant « professionnalisation à outrance de la vie publique qui fait que l’on devient toujours plus tôt, toujours plus jeune, dépendant, pour vivre, d’un mandat ou de celui ou celle qui l’exerce ?  ». À sa double initiale, il ajoute la double fonction de sénateur-maire (de la Charité-sur-Loire), mais il n’a pas tort de voir dans la parité et le non-cumul les risques de voir se produire « l’ascension de clones sans jamais contribuer à un quelconque renouvellement ».
Ce peut être effectivement l’un des effets pervers de ces mesures. On se forme une écurie, on va débaucher les poulains des autres, dont on fait dans l’ombre la carrière. Je l’ai vu faire dès les années 1980 : de jeunes loups et louves parachutés très loin au besoin, devenant adjoint aux Finances sans la moindre formation autre que celle, clanique, de la lutte des courants…

Cahuzac a pu tenir et mentir car il ne figurait pas sur les fameuses listes dont Bercy avait connaissance. Il pouvait espérer le non-lieu. Mais il n’a pas cherché non plus à rendre publiques ces fameuses listes (voire à les négocier avec Mediapart, sait-on jamais, en douce… qui aurait ou non pondéré l’opportunité de disposer d’une gorge profonde : perso, j’aurais réfléchi… et je ne sais quelle aurait été ma décision). Des fuites peuvent encore se produire si les membres du cabinet Cahuzac ne seraient pas recasés.

Jérôme Cahuzac avait été nommé pour ses talents (mnémotechniques et autres), sa connaissance des dossiers, mais aussi pour rassurer les marchés, ne pas s’aliéner frontalement le patronat, ni les avocats fiscalistes, les experts-comptables, les banquiers, &c. Ou encore le Royaume-Uni, le Luxembourg, l’Irlande, l’Autriche, Malte, les pays baltes ou, jusqu’à récemment, Chypre.

Duflot (Écologiste) résume très bien : l’affaire Cahuzac révèle l’incapacité de la politique « à changer la société ». Qui profite davantage du statut-quo ? Elle rappelle : « la droite a instillé pendant dix ans l’idée que les fraudeurs seraient les plus démunis, alors que les faits prouvent le contraire. ». Difficile à réfuter.
Dans un long entretien pour Mediapart, elle signale clairement qu’elle n’incitera personne à défiler aux côtés de Jean-Luc Mélenchon et du PCF (et d’autres), et souhaite « que tout cela se décante ».

Sur ce dernier point, qu’elle se rassure : de même que ni droite, ni gauche gouvernementale n’ont trop intérêt à renoncer définitivement au projet de l’aéroport de Notre-Dame des Landes (trop d’enjeux financiers pour les uns ou les autres), personne n’a trop envie de transformer la France en la Genève de Calvin. Ni vraiment de réformer les collectivité territoriales.

Isabelle Horlans, journaliste quelque peu au fait des coulisses, manie l’ironie douce : « Rendons grâce à Nicolas Sarkozy d’avoir voulu “éliminer les zones d’ombres de la finance internationale” mais n’oublions pas que son discours d’octobre 2008 resta lettre morte ». Dans une tribune du Club de Mediapart sur les diverses et multiples affaires politico-financières, elle conclut : « j’ai l’impression que ce billet pourra être actualisé et republié dans dix ans. J’espère me tromper&bnsp;». N’empêche, toute avancée est bonne à prendre, ne s’obtient que sous la pression d’un rapport de forces qui, s’il vient à faiblir, engendre des reculades.

Quelques erreurs

Le gouvernement commet, à mon sens, l’erreur de ne pas consulter le Front national à propos des nouvelles mesures de moralisation après l’avoir fait entendre dans le cadre de la commission Jospin. C’était l’occasion de mieux mouiller un parti qui n’a peut-être pas vraiment l’envie que l’on mette le nez dans ses affaires ou de démontrer sa « normalité » (par exemple, en constatant sa réponse sur l’existence de micropartis).

L’erreur, aux yeux de l’opinion, est peut-être tout simplement de consulter : il aurait été farce de voir la droite introduire une nouvelle motion de censure, car ne supportant pas des mesures trop radicales, ou se livrer à une bataille d’obstruction à coups d’amendements.

Un projet de loi de moralisation « consensuel » ? Mais qui peut y croire encore ? Quand on a une Pécresse déclarant « toutes les propositions sur la table ne servent qu’à faire diversion face à la gravité du séisme », tout le monde comprend bien qu’elle ne veut l’adoption d’aucune proposition.

Elle qui accuse Hollande ou Ayrault de n’avoir rien voulu voir n’avait absolument « aucun élément » sur les comptes de Jérôme Cahuzac (tandis que Michel Gonelle affirme que la direction des Douanes était au parfum). Hollande et Ayrault sont soit complices, soit des incapables, mais, à elle, on lui cachait tout, on ne lui disait rien. Ni complice, ni incapable, tout juste potiche, alors ?

L’Ordre des médecins était tout aussi totalement ignorant de l’existence de Cahuzac Conseil, connu de tous les laboratoires ou presque, il découvre, tout comme Hollande et Ayrault ont découvert, saisi comme eux de stupeur et tremblement. Pareil dans les ateliers (professionnels) du Grand orient de France. Là, je veux bien l’admettre : la cloison des obédiences entre les naïfs, les sincères, et les autres, est très, très étanche. Le frère Cahuzac (qui n’était guère présent), sera exclu des travaux, puis radié du GODF s’il ne bénéficie pas d’une relaxe ou d’un non-lieu judiciaire.
Rappelons que les parlementaires ne prêtent pas serment, tandis que les maçons…

Les consultations gouvernementales vont-elles « garder le silence vis-à-vis des profanes » (serment d’initiation maçonnique) et en particulier de la presse ? On ne saura pas qui appuiera quoi ou non et pourquoi ? La transparence sous le boisseau et derrière le rideau avant de la proclamer au grand jour ? Pour se préserver du « voyeurisme hypocrite » dénoncé par l’UMP.

Daniel Cohn-Bendit a estimé que « si quelqu’un a quelque chose à cacher, l’opération transparence, il n’en a rien à cirer ». Peut-être, mais pas du tout, du tout, si ce qu’il cache vient à être divulgué : les conséquences sont bien plus désastreuses.

On voudrait qu’au moins, toutes, je dis bien toutes les mesures les plus drastiques déjà adoptées en d’autres pays européens soient retranscrites dans les lois françaises. Ou, qu’au moins, face aux reculades des uns ou des autres, la presse enfonce le clou, en se livrant à d’utiles comparaisons. Oui, pourquoi ne pas faire en sorte, comme le juge inimaginable Christian Jacob, de se conformer à ce qui se fait dans certains pays nordiques ?
Gilbert Collard (apparenté FN) s’inquiète d’une « France du trou de serrure ». Pas d’une France de la double-fenêtre grande ouverte ? Pourquoi donc ?

L’un des moins vent debout contre la moralisation à droite est Patrick Devedjian : il sait ce qu’il doit à Nicolas Sarkozy, ses amis les Balkany et Ceccaldi-Raynaud. Ou encore Pierre Morel, aussi UMP, qui veut « tout mettre sur la table… les voitures de fonction et les trains de vie en matière de communication dans les collectivités, le personnel attaché à tel ou tel élu… » (soit les épouses, nièces, gendres de sénateurs, mais aussi les frais de sondages de l’Élysée, si je comprends bien).

En fait, à droite, il y a deux attitudes (sauf exceptions individuelles), soit la surenchère pour rendre toute mesure le plus irréaliste possible ou faire monter au créneau des socialistes peu chauds à tout déballer, ou l’opposition frontale à ce que quoi que soit change. Patrick Vignal (PS), veut bien que soit divulgué les acquis « pendant le temps du mandat », mais que rien n’apparaisse de ce qui fut obtenu avant : c’est vrai que pour défendre la veuve et l’orphelin dans le besoin, certains sont plus crédibles que d’autres.

Entre celles et ceux voulant des mesures dès 2014 (pourquoi pas auparavant) et après 2017, la répartition s’observe dans tous les grands partis. Il en est d’autres qui veulent bien consentir à des sacrifices, y compris au mandat unique… à condition qu’à la sortie, on soit encore mieux indemnisé.

D’autres veulent un référendum (forcément coûteux, pas si facile à organiser rapidement). Soit pour que les discussions ne s’enlisent pas, soit pour obtenir le temps de faire un peu le ménage, allez savoir les réelles motivations…

Guaino évoque la politique « sacrifice, don de soi » : il a bien tardé à monter à l’autel. Il a surtout sacrifié celles et ceux s’opposant à son soudain parachutage et qui auraient bien aimé consentir ce don à sa place. Ce « don » deviendrait servitude et non plus grandeur si une loi sur la moralisation venait à être votée ? Mais pourquoi attendre ? Ce ne serait pas un grand sacrifice que de créer un tel électrochoc.

Et Mélenchon au fait ?

Finissons-en – provisoirement – avec Jean-Luc Mélenchon. José Bové a estimé qu’au lieu de donner « un grand coup de balai », il pourrait au moins participer au toilettage législatif au Parlement européen : « malheureusement, sa présence, le moins qu’on puisse dire, est assez épisodique ». 
Ce n’est pas le seul à obtenir les suffrages et à ne rendre que le temps de présence nécessaire pour toucher quelques indemnités. Il vient à Strasbourg juste pour signer « sa feuille de présence en rentrant le soir », préférant passer sa journée à Paris. Voyez les fauteuils vides à l’Assemblée nationale ou au Sénat, ce n’est guère mieux. Cela ne confine-t-il pas légèrement à l’escroquerie quasi-généralisée, cela ?

Mais, surtout, surtout, quand Mélenchon invite Joly et tout le monde à manifester, il évite de dire ce qu’il lui semblerait nécessaire ou souhaitable pour moraliser la vie publique. Car il ne suffit pas de s’en remettre à la conscience du « bon peuple » : il ne suffit pas de remplacer une ancienne élite par une autre, mais bien, comme le dit Eva Joly « dresser un véritable cordon sanitaire entre la démocratie et les affaires ». Avant de remanier, il conviendrait peut-être de ne pas repousser sine die la modification des règles.

Déjà, qu’elle dise et redise (comme dans Metro) qu’un policier ou un procureur ne peut engager d’enquête pour fraude fiscale car « c’est réservé aux direction départementales des services fiscaux » (qui, en cas de personnalité sensible, font remonter à Bercy, pour savoir si c’est judicieux ou non). Une commission de contentieux décide de l’opportunité de traiter les dossiers. Les ministres peuvent aussi effacer gracieusement les ardoises (ex. Karl Lagerfeld sous DSK).
Quelle redise ce qu’elle pense du non-cumul des mandats et de son calendrier.
Mais surtout, si Jean-Luc Mélenchon estime qu’il s’agit là de broutilles, qu’elle dise à la tribune toutes les pistes permettant de moraliser l’exercice de fonctions politiques, et les détaille.

Sur Antenne 2, J.-L. Mélenchon dit passer son temps à faire des déclarations d’intérêts (dix fois), et souhaite des « référendums révocatoires » en cas de problème. Mais pourquoi donc ne pas mieux prévenir ces problèmes ? Il a remémoré qu’Hervé Morin savait pour Cahuzac, mais pas lui. Il a botté un peu – beaucoup – en touche en évoquant les banques et leurs filiales dans les paradis fiscaux. Mais publier son patrimoine, ce serait une gesticulation. Il n’aurait pas de bijoux, chevaux, valeurs… mais des dessins, de son cru, d’une valeur « inestimable ». Il aimerait que patrons de chaînes et chefs de service fassent connaître leur patrimoine. Pourquoi pas ?

Alimente-t-il la « machine à méfiance » ? Il veut bien faire comprendre qu’il faut une réponse politique et propose « une marche ». Oui, mais quels changements, au juste ? Eh bien, le temps lui aura manqué pour répondre. À l’issue de la marche, peut-être ? Qu’il laisse donc parler Eva Joly en ne se contentant pas d’opiner du chef mais en prenant position sur chacune des mesures. On n’en attend pas moins de lui…

P.-S. – pour qui ne verrait pas le lien avec l’illustration : Jean-Luc Mélenchon fait partie du groupe Gauche verte nordique au Parlement européen de Strasbourg tandis qu’Eva Joly émarge à l’Alliance libre européenne. Cinq assistant·e·s parlementaires (quatre accrédités, un local) pour Joly, un seul pour Mélenchon (un local, sous contrat de droit privé, donc). On verra ce qu’il en adviendra si Eva Joly ripe de groupe. Mais bon, tout cela, c’était pour vous signaler la parution, chez Michalon, des Nouveaux Cons, saison 2, de l’ami Étienne Liebig (voui, voui, Étienne, je vais te le chroniquer, mais j’en ai quatre autres en instance), qui, à propos des « nouveaux cons des instances européennes » consigne : « ils pourraient dénoncer le système mais la soupe est trop bonne pour qu’ils se la renversent sur les cuisses, fussent-ils verts, gauchistes ou communistes. ».
Et Jean-Marie et Marine Le Pen, donc, dont Louis Aliot, son compagnon, est assistant local…  

Auteur/autrice : Jef Tombeur

Longtemps "jack of all trades", toujours grand voyageur. Réside principalement à Paris (Xe), fréquemment ailleurs (à présent, en Europe seulement). A pratiqué le journalisme plus de sept lustres (toutes périodicités, tous postes en presse écrite), la traduction (ang.>fr. ; presse, littérature, docs techs), le transport routier (intl. et France), l'enseignement (typo, PAO, journalisme)... Congru en typo, féru d'orthotypographie. Blague favorite : – et on t'a dit que c'était drôle ? Eh bien, on t'aura menti !

3 réflexions sur « Patrimoine des politiques : pédagogique Morano »

  1. [b]83.872 euros de revenus locatifs
    5.627 euros en tant que député
    2.255 euros en tant que maire[/b]

    Le député Réunionnais Thierry Robert révèle son patrimoine et affirme qu’il quittera la France si les impôts ne baissent pas!

  2. D’un certain coté, le fait d’etaler son patrimoine au grand jour ne sert à rien si un organisme ne peut verifier s’il y a eu fraude avant ou pendant un mandat

  3. [b]N’oublions pas qu’Hidalgo n’a strictement rien fait dans le cadre de son poste d’inspectrice du travail, rien de rien pendant des années ! elle se moque de qui?[/b]

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