Dans un contexte où le folklore a pratiquement damné le pion au militantisme pur, il est difficile à ce jour au Cameroun de faire un distinguo net entre un vrai militant et un opportuniste politique.

Du petit vendeur à la sauvette aux ministres en passant par les médecins, professeurs d’universités et autres, la pratique de la politique du « ventre » est devenue presque formelle dans la société camerounaise. Un état de chose institué et entretenu par le régime en place, pour voiler les yeux de la conscience collective et surtout de la communauté internationale.

Aujourd’hui, pour bénéficier d’une promotion au sein de l’administration, il faut non seulement être militant du parti au pouvoir, mais aussi, être très actif sur le terrain. C’est ainsi que, chaque haut cadre de l’administration camerounaise s’attèle, notamment en cette période pré – électorale à organiser régulièrement dans sa région de naissance des meetings géants, pour montrer au « prince » qu’il est réellement « efficace ». À la question de savoir pourquoi  ils militent au sein du RDPC (parti du président Paul Biya), la réponse est presque la même : « … c’est le seul parti par lequel le bonheur peut venir ; ça ne sert à  rien d’aller militer au sein d’une opposition désorganisée en panne d’imagination… »

Récemment, plusieurs professeurs d’universités camerounaises ont signé un mémorandum pour appeler le président Paul Biya, pourtant au pouvoir depuis près de 30 ans à être candidat aux présidentielles de cette année. A quelques exceptions près, plusieurs d’entre eux auraient été contraints de le faire, pour garantir et sauvegarder pour certains leurs postes. Cependant, d’autres, même du parti au pouvoir, ont carrément refusé de s’engager sur cette voie purement sensationnelle ; c’est le cas de l’éminent professeur Charlemagne Messanga Nyamding qui a refusé de porter son nom sur cette liste parce que dit – il, « on ne peut pas conseiller à un Imam de se convertir à l’islam »

Si en occident et dans d’autres pays démocratiques la politique est avant tout une question d’idéologie, au Cameroun, les partis politiques s’érigent beaucoup plus comme des instruments de positionnement purement égoïste. Et voyant toutes les opportunités qu’offrent le parti au pouvoir à ses militants, les camerounais, meurtris pour la grande majorité par la misère, se trouvent obliger de prendre leur inscription dans le RDPC, tout simplement, dans l’espoir de bénéficier de certaines « faveurs » du régime. Même si l’on pense aujourd’hui que le RDPC est le parti au Cameroun ayant le plus de militant, il reste à confirmer la sincérité et la fidélité de ces derniers ; car il ne s’agit en principe que des militants de surface. Toute chose qui a poussé le président Biya à faire cette déclaration à l’occasion d’un congrès de son parti pour condamner cette attitude des « griots politiques » qui peuplent son parti : « … le RDPC doit être un parti qui pense plus qu’il danse… »

À seulement quatre mois de l’élection présidentielle, il devient important pour les camerounais de revenir à de meilleurs sentiments, en évitant de céder à la manipulation, et surtout en ne portant leur choix que sur des personnes défendant l’intérêt de la nation. Car, cinquante ans après l’indépendance, et au regard des défis qui interpellent le Cameroun, l’heure de la politique du « ventre » est totalement révolue !