C'est in extremis que le Parlement européen vient d'approuver une loi modifiant son règlement qui aurait permis à Jean-Marie Le Pen de présider la prochaine séance inaugurale en tant que doyen d'âge.

Dorénavant, la séance inaugurale du Parlement européen sera présidée par le président sortant, ou à défaut par l'un des vice-présidents sortants, ou bien en dernier recours par le parlementaire ayant exercé le plus long mandat.

Sans partager les idées du président du FN, on comprend mal la crainte du Parlement européen.

En effet, en 1989 le cinéaste Claude Autant-Lara, élu sur les listes du FN, avait présidé la séance inaugurale en tant que doyen d'âge et en avait profité pour dénoncer la terrifiante menace culturelle américaine dont l'Europe, si elle ne réagissait pas, ne se remettrait jamais. En réponse à cette sortie jugée inacceptable par la majorité des parlementaires de l'hémicycle, le règlement intérieur avait été modifié, interdisant désormais au doyen de prendre la parole lors de la séance d'inauguration. Ainsi, si Le Pen l'avait présidée, il n'aurait pu le faire que comme un pantin muet.

Sans doute les parlementaires ont-ils jugé inacceptable la présence de Le Pen sur la photo de famille et ils ont donc profité de leur dernière séance plénière pour modifier leur règlement intérieur claquant la porte de la tribune au nez du président du FN.

Qu'on approuve ou désapprouve la politique du parti d'extrême droite, il me semble qu'on peut malgré tout s'étonner de cette pratique du Parlement européen visant à écarter un député pourtant démocratiquement élu et représentant plus de 10 % des électeurs français lors des dernières élections présidentielles.

Je me demande si la pratique du micro fermé est vraiment démocratique, et si le Parlement européen ne possède aucun autre moyen pour combattre les idées de quelqu'un qui les dérange.

Si Jean-Marie Le Pen avait remporté les élections présidentielles en 2002, aurait-il également été interdit de tribune à Strasbourg et à Bruxelles ?