A l’occasion de la sortie du film de Martin Scorsese, Hugo Cabret, se déroulant dans le Paris de la Belle Epoque et mettant en scène George Meliès, l’envie d’en savoir plus sur ce personnage m’a titillé.
Si le 7ème art est ce qu’il est aujourd’hui, c’est un peu grâce à lui. Rien que pour cela, des millions de cinéphiles peuvent lui en être reconnaissant. Alors qui est ce père du cinéma ?
Il y a 150 ans, dans une riche famille de fabricants de chaussures de luxe, le petit Marie George Jean Meliès voit le jour. George s’intéresse très rapidement à l’art et alors que beaucoup de ses camarades, comme tous les enfants de son âge, souhaitent être pompier, soldat ou explorateur, lui, voulait devenir peintre.
Rangeant sa secrète ambition de côté et étant membre d’une entreprise familiale qu’il devra un jour prendre en main, il est engagé dans les usines de son père. Finalement, un mal pour un bien car dans ces ateliers, il va se forger des connaissances en mécanique, ce qui lui sera d’une grande utilité par la suite.
A cette époque marquée par l’hégémonie victorienne, tous les jeunes hommes de bonne famille se doivent d’aller au Royaume Uni, notamment à Londres, la capitale du monde. Gamin dans l’âme, il travaille dans un grand magasin où il y apprend la magie et perfectionne son anglais. La ville attire vers elle, les grands noms de l’illusion, de ce fait, il côtoie les sommités du domaine pour qui, il réalise les décors.
Son séjour anglo-saxon prend fin en 1885 et il revient en France riche de ses expériences. L’homme est élégant dans son costume 3 pièces, sa montre gousset et son bouc finement taillé, tout pour séduire une amatrice d’art, une pianiste parisienne avec qui, il se marie.
Profitant, une fois de plus de ses liens familiaux, il entre dans le journal anti-boulangiste, la Griffe, où son oncle est rédacteur en chef. De la pointe de son stylo et de ses crayons, il chausse la casquette de journaliste-caricaturiste sous le pseudo de « Géo Smile ». Un sourire pour égayer la vie politique houleuse du début de la IIIème République.
Emporté par sa passion pour la prestidigitation, il vend ses parts pour une fortune qu’il investit dans un théâtre. Dans ce lieu situé boulevard des Italiens, des numéros merveilleux y sont organisés. Les spectateurs sont totalement émerveillés et terriblement accaparés par le clou du spectacle.
Meliès innove en projetant sur écran des photos peintes sur verre. Les images sont fixes mais habilement mise en scène pour susciter de la poésie et de l’enchantement.
1895, une année qui marque la genèse pour les amateurs de salles obscures et de bobines. Pour la première fois au monde, le bruit d’un projecteur se fait entendre dans une salle du Grand Café, boulevard des Capucines à Paris. Les frères Lumières éclairent une nouvelle passion dans le cœur de George.
Le cinéma, tel sera son nouveau credo, sa motivation. Malgré les réticences de sa famille, réfractaire au cinéma, ne pensant qu’à un phénomène de mode, George se lance dedans à pieds joints.
Il rachète tous les procédés développés, l’Isolatograph, le Théatograph ou encore le Kinétrograph et fonde la société de production Star Film. C’est une affaire qui roule et pour attirer de plus en plus de public, il développe des œuvres de fictions.
Les effets spéciaux ne sont pas encore né mais cela ne serait tarder. Tous comme les bêtises de Cambrai ou la tarte Tatin, ils sont nés d’un incident. Alors qu’une caméra était en train de tourner, la manivelle se bloqua. Une fois le film tiré, en le projetant, un simple omnibus passant dans le champ devint, l’instant d’après, un corbillard.
Meliès, intelligent, comprit qu’il y avait une matière à creuser. Il crée un studio et fait tourner des acteurs dans des décors peints de ses mains. Un vrai travail d’artiste proche de ce que l’on peut voir actuellement chez Michel Gondry. Durant plusieurs années, il va créer plus de 600 courts métrages empreints d’onirisme, faisant voyager le spectateur comme dans un rêve éveillé. Son chef d’œuvre, Le voyage dans la Lune, de 1902, est un tel succès qu’il va être diffusé aux USA, une véritable consécration.
Le monde de l’époque est de plus en plus touché par le capitalisme qui s’insinue dans toutes les facettes de l’économie dont le cinéma. Meliès, tel un David contre Goliath, doit s’incliner devant les grosses entreprises. C’est ainsi qu’il revend Star Film à Pathé, son étoile s’est éteinte.
Les années 1920 sont les années folles mais pour Meliès, elles sont plutôt synonymes de traversée du désert. Un désert où ses traces sont suivies par des créanciers peu scrupuleux. Le génie du cinéma retourne à ses premières passions, les jouets, le journalisme et la magie.
Son nom commençait à être oublié de tous quand la vague surréaliste déferla sur l’Europe. Pour des Dali, des Buñuel, des Ionesco et consorts, Meliès est un maître, un guide, un modèle. Il revient en grâce et reçoit les honneurs qu’il a tant mérités. De cette façon, son nom ne risque plus jamais d’être omis puisqu’il récompense, depuis 1946, les meilleures productions françaises.
Voilà une brève histoire d’un pionnier du cinéma. Véritable touche à tout, il fut l’inventeur des trucages, des carabistouilles pour tromper les yeux mais nous enchanter.