Mais tout n’est pas terminé. Il reste maintenant trois étapes à franchir qui s’annoncent administrativement complexes et très longues à mettre en place.Tout d’abord, la société Monsanto, productrice du Mon810, dispose d’un délai de quinze jours afin d’établir sa défense sur les points qui lui sont reprochés dans la clause déposée par le gouvernement français. Ensuite, la France devra déposer concrètement son moratoire devant l’Union Européenne, en s’appuyant sur les nouveaux éléments listés par la Haute Autorité sur les OGM. Pour finir, Bruxelles se lancera alors dans l’étude du dossier afin de se prononcer définitivement sur la requête française. Cette dernière étape peut prendre plusieurs mois.
Ce chemin de croix administratif étant des plus longs, aucun agriculteur ne pourra acheter le maïs en cause pour la prochaine saison. La France ne cultivera donc pas d’OGM cette année.
Aucune culture OGM en 2008
Politiquement, il s'agit là d'un message fort. L’UE doit effectivement se prononcer d’ici peu sur le renouvellement d’autorisation du Mon810 au niveau européen et étudie également la possibilité de commercialiser le Mon811, « le petit frère du 810 » selon Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d'État à l'Écologie. La France affiche ainsi une position ambigüe : le gouvernement souhaite se protéger d’éventuels risques sanitaires futurs sans être totalement opposé à la culture OGM. En effet, rien ne laisse présager d’une disparition totale des OGM en France. Le gouvernement a tenu à faire passer le message en annonçant un budget de 45 millions d’euros pour la recherche sur les biotechnologies soit une enveloppe totale multipliée par huit. Le communiqué officiel abonde également en ce sens : « Les doutes sur le maïs Mon810 ne condamnent pas l’intérêt de cette technologie pour relever les défis alimentaires et environnementaux ». Une pirouette diplomatique visant à ne pas froisser de trop les pro-OGM mais qui montre bel et bien les hésitations persistantes au sein même du gouvernement. Les OGM relevant d'un intérêt écologique certain mais bien évidemment de gros enjeux économiques égalemment. La culture OGM permettant un rendement supplémanetaire de 5 à 30% pour les agriculteurs. Les défenseurs du maïs transgénique se faisant de plus en plus entendre face à la décision courageuse mais peut-être trop précipitée du gouvernement, le débat semble donc loin d'être clos.
Un symbole fort mais controversé
La décision de la clause de sauvegarde avait été décidée lors du Grenelle de l’environnement mais c’est bien la grève de la faim entamée par José Bové et ses compagnons qui a précipité l’échéance. Pour clore le débat, François Fillon, premier ministre, déclarait hier au Grand Jury LCI-RTL-Le Monde : «la majorité présidentielle est engagée par les conclusions du Grenelle de l’environnement», expliquant ainsi que le gouvernement n’avait aucunement l’intention de faire marche arrière. L’Europe devra donc délivré ses conclusions afin d’enterriner ou non la culture OGM en France. Mais ce-ci paraît des plus improbables puisque économiquement la France ne peut se permettre de rester en retrait sur les avancées scientifiques touchant au secteur agricole. Le Ministre de l'Agriculture, Michel Barnier, confirme que l'avis de la Haute Autorité sur les OGM ne doit pas "fermer la porte" aux cultures génétiquement modifiées. Hier, il soutenait encore que la France "(devait) prendre le temps d'aller au fond du débat politique, au bout de l'évaluation scientifique au niveau européen et au niveau national".
La recherche OGM se poursuivra donc en France en vue d'assurer une culture saine et ne faisant courir aucun risque pour l'environnement et les différents écosystèmes de l'Hexagone.
Antoine Ginekis